Témoignage: « C’est souvent à 50 ans qu’on arrête de boire »

Si on rencontre généralement l’alcool avant ses 20 ans, quand la consommation devient problématique, il faut parfois des décennies avant d’agir. Et parfois, la seule solution, c’est l’abstinence complète. Une responsable des AA nous raconte son expérience.

« À la cinquantaine, il y a comme un déclic, raconte Colette, retraitée. Elle anime un groupe d’Alcooliques anonymes (AA) en région bruxelloise et se charge aussi, avec d’autres, de la communication des AA. Nous constatons que l’âge auquel les personnes rencontrent l’alcool, c’est vers 20 ans. Mais quand il commence, petit à petit, à avoir des effets négatifs dans la vie, quand il devient une prison, il faut des années avant de réagir. Les problèmes de santé arrivent (maladies nerveuses, système digestif, foie). Les ruptures familiales surviennent aussi. »

« Dans certains cas même, certains ont des ennuis avec la justice pour des actes commis sous l’emprise de l’alcool, poursuit Colette. En ce qui me concerne, j’avais les comportements d’une hyperémotive. Cela effrayait mes enfants. Et je commençais à avoir des ennuis au boulot à cause de mon manque de concentration, de cette mémoire qui flanchait et de cette foutue émotivité à fleur de peau. »

J’avais les comportements d’une hyperémotive. Cela effrayait mes enfants.

Pour les AA, la seule façon de sortir de l’impasse quand l’alcool en devient une, c’est de devenir abstinent et de le rester. Il existe pour ce faire des centaines de groupes en Belgique. Ils sont composés d’une dizaine de personnes. Ces dernières tentent ensemble de ne plus succomber à l’alcool grâce à la libération de leur parole et grâce à la force des témoignages des autres.

Particulièrement vers 45/50 ans

« Mais un constat étonnant ressort de la composition de ces groupes, c’est l’âge des participants, poursuit Colette. Nous avons réalisé une photographie de la population des AA sur base volontaire. Quelque 1.400 personnes ont répondu. Et c’est particulièrement vers 45/50 ans que les personnes veulent reprendre leur destin en main. »

De tous les milieux sociaux

« Ces personnes qui poussent la porte de nos réunions sont vraiment de tous les milieux sociaux, poursuit-elle. Tout le monde est le bienvenu. La seule condition, c’est le désir d’arrêter de boire. On accueille chacun, on essaie de savoir ce qu’il vient chercher. Le reste se déroule sous forme de témoignages. Et ce ne sont pas des spécialistes qui parlent, mais des alcooliques qui ont trouvé le chemin de la sobriété ou qui cherchent à arrêter de boire. Chacun y va de ses trucs pour remettre de l’ordre dans sa vie et résoudre tous les problèmes que l’alcool a posés ou accentués. »

« L’alcool, c’était pour faire face aux difficultés à la vie »

« Il y a parfois des histoires très difficiles à entendre. C’est bateau à dire, mais beaucoup utilisent l’alcool pour faire face aux difficultés à la vie. Évidemment, de notre côté, nous ne pensons pas que c’est un bon moyen. Nous, nous voulons vivre heureux pour toutes les années qui nous restent. Nous voulons remettre en place des relations riches et épanouissantes. L’important pour un AA sera donc de ne pas boire le premier verre. Le sevrage pourra être extrêmement difficile. Tous les efforts accomplis pourront s’effondrer après ce premier verre, car il y en aura un second et ainsi de suite. Il faut savoir que la dépendance à l’alcool est aussi liée à une vulnérabilité génétique et que nous sommes inégaux devant le produit. »

On ne vous regarde plus comme un extra-terrestre...

« Heureusement, conclut Colette, les moeurs évoluent et on ne vous regarde plus comme un extra-terrestre quand vous refusez un verre de bulles à un anniversaire. L’entourage l’accepte très vite. Chez moi, par exemple, mes enfants ont été tellement contents que je devienne quelqu’un de plus équilibré que ça n’a vraiment pas posé de problème. »

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