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Surfer sur les réseaux sociaux sans se laisser submerger

Tout le monde, ou presque, a déjà mis le doigt dans l’engrenage des réseaux sociaux. Mais quelle est la réelle portée de nos activités sur ces plateformes? À quoi servent-elles réellement? Et comment éviter les mauvaises surprises?

Il n’aura fallu que quinze ans pour que les réseaux sociaux deviennent une composante indissociable de nos sociétés. Ces plateformes sont aujourd’hui utilisées par tous, toutes générations confondues: selon l’agence de consultance Kepios, 8,83 millions de Belges sont utilisateurs actifs de réseaux sociaux. Parmi eux, environ 35% ont plus de 45 ans. Mais si les réseaux sociaux sont devenus communs dans notre environnement, nombreux sont ceux qui les utilisent de façon « naïve », ignorant la portée réelle de leurs actions en ligne.

AU PEIGNE FIN

Bien sûr, les réseaux sociaux sont très plaisants, ont beaucoup de qualités et, ce qui ne gâche rien, ils sont gratuits pour les utilisateurs. On en oublierait presque qu’il s’agit avant tout d’entreprises destinées à faire du profit. Comment? En promettant aux annonceurs publicitaires d’atteindre le public le plus à même d’être réceptif à leurs produits. « Il y a, derrière, toute une machinerie qui interprète nos actes pour fournir des publicités ciblées, affinées selon notre profil, explique Jérôme Naif, social media manager pour l’agence de stratégie digitale Mountainview. La navigation et la consommation de contenu n’y est pas neutre. Tout est traqué, mesuré, interprété. » Le moindre like, le plus petit commentaire.

L’intelligence artificielle et les algorithmes sont en effet capables d’analyser de très nombreux paramètres et d’en tirer des informations. En postant simplement une nouvelle photo de profil, par exemple, une plateforme est en mesure de déterminer si l’utilisateur a des lunettes, le contenu de l’arrière-plan, mais aussi toute une série de métadonnées, comme la date et le lieu où a été prise la photo, l’appareil utilisé, les applications qu’il contient... La reconnaissance faciale permet de reconnaître l’utilisateur sur le cliché, ainsi que les autres personnes éventuellement présentes. L’utilisateur peut donc transmettre involontairement des éléments sur lui, mais aussi sur d’autres personnes. « Or, tout ce qui est posté sur un réseau social est enregistré, c’est là pour l’éternité, ça ne disparaît pas, met en garde Pierre-Nicolas Schwab, docteur en économie et en sciences de gestion. Ça pose question, notamment en ce qui concerne le droit à l’image des enfants, qui se retrouvent souvent involontairement sur ces photos... »

Tout ce qui est posté sur un réseau social est enregistré, ça ne disparaît pas

Les réseaux sociaux sont aujourd’hui en mesure d’obtenir subtilement une quantité phénoménale de données à notre propos. « Sachant cela, vous pouvez restreindre les informations que vous donnez volontairement à Facebook. Par exemple, rien ne vous oblige à mentionner vos études, votre situation maritale, qui sont vos enfants, etc. », suggère Jérôme Naif.

COMME UN FEU DE BROUSAILLE

Puisque les utilisateurs s’y retrouvent souvent entre amis ou en famille, il est aussi tentant de penser que les réseaux sociaux sont composés de milliers de petites « bulles », au sein desquelles les informations et propos échangés gardent une portée limitée. « En réalité, lorsque j’interagis sur un réseau social, certains actes sont publics, accessibles à tout un chacun, souligne le social media manager. Tout le monde n’a pas conscience de la dimension que peut prendre un post, un commentaire. Or, l’engagement, c’est-à-dire le fait de liker, de partager une info, de la commenter... est beaucoup plus marqué chez les 65+. »

D’où, parfois, de belles surprises, lorsqu’une demande d’aide est relayée au-delà des espérances, mais aussi de potentielles expériences effrayantes. « J’ai le souvenir de ma mère qui avait simplement partagé son offuscation à propos d’un magasin et s’inquiétait de la proportion que cela prenait... Sur une plateforme comme Facebook, qui regroupe 9 millions d’utilisateurs en Belgique, un simple post de ce genre peut toucher tout le pays, être partagé plus de 10.000 fois. Et à partir du moment où un contenu devient viral, vous perdez tout contrôle dessus, ça peut partir n’importe où, n’importe qui peut le reprendre. »

UN ESPACE PRÉSERVÉ

Certaines informations accessibles publiquement peuvent aussi être détournées à des fins malhonnêtes: harcèlement, usurpation de profil... « Un vélo volé, vendu sur Marketplace (la plateforme de vente de Facebook, ndlr), l’était avec un faux profil, comportant des photos volées d’un 50+, un âge qui a tendance à créer un sentiment de confiance... » Il est donc capital, quand c’est possible, d’afficher un profil public, visible par tous et relativement peu fourni, tout en se ménageant un « pré carré », un profil privé, accessible seulement aux proches et où eux seuls pourront accéder à des informations à caractère sensible*. « Si vous tenez à partager des photos de vos (petits-)enfants en ligne, mieux vaut le faire dans ce cadre, car il existe des sites de pédopornographie à l’affût de ce genre de clichés, ajoute Pierre-Nicolas Schwab. Sur un profil privé, seuls vos proches y auront accès. Eux... et le réseau social en tant que tel, ne l’oublions pas! »

Enfin, si vous tenez absolument à vous exprimer de façon publique, sous un article d’actualité par exemple, gardez à l’esprit qu’une saute d’humeur ou des propos polémiques pourraient bien vous jouer des tours plus tard... Comme le dit l’adage, les paroles s’envolent, les écrits restent: s’exprimer en ligne peut porter à davantage de conséquences qu’une phrase malheureuse lâchée autour d’une conversation orale à bâtons rompus. Il existe de nombreux exemples de personnalités médiatiques poussées à la démission après exhumation d’un vieux tweet, même des années après sa rédaction!

QUEL RÉSEAU POUR QUOI FAIRE?

Effrayant, cet article? Peut-être bien... Mais il doit avant tout être lu comme une mise en garde, visant à un usage raisonné des réseaux. Moyennant quelques précautions (voir encadré page 32), il serait dommage de se priver d’outils incroyablement pratique et plaisants. Et, pourquoi pas, de se laisser tenter par une incursion sur une nouvelle plateforme? Découvrez dans les pages suivantes un bref descriptif des principaux réseaux sociaux utilisés en Belgique...

*sur plusmagazine.levif.be/reseaux, découvrez pas à pas la marche à suivre pour créer un profil privé et limiter la portée de vos publications.

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