© GETTY IMAGES

Rangez et transmettez vos plus beaux souvenirs

Trier ses affaires, c’est aussi l’occasion rêvée de penser à ses proches. On jette un regard sur sa propre vie et on en profite pour ne laisser que le meilleur à ceux qui nous sont chers. Une nouvelle tendance venue de Suède

En suédois, le terme döstädning signifie littéralement  » rangement avant la mort « . Une expression qu’il ne faut bien sûr pas prendre au pied de la lettre !  » Il va de soi qu’il ne faut pas nécessairement s’y mettre à la veille de son décès. On peut s’y prendre à tout moment, car ranger facilite la vie et allège le quotidien « , précise l’artiste suédoise Margareta Magnusson dans son ouvrage The Gentle Art of Death Cleaning. En effet, ce qu’on peut accumuler au cours d’une vie est plutôt impressionnant. Vos placards débordent ? Vous devez emménager dans une maison ou un appartement plus petit ? Il est temps de trier vos affaires ! La différence avec un grand coup de ménage, c’est qu’ici on va prendre le temps de se retourner sur des tranches de vie et des souvenirs, parfois tristes mais souvent très joyeux.

Les objets sont souvent liés à des souvenirs. C’est pour cette raison qu’il est parfois si difficile de s’en séparer...

 » Ce rangement ne doit surtout pas être triste « , insiste Margareta Magnusson. Nele Colle, coach en rangement, plaide dans le même sens :  » J’ai souvent été frappée par la rapidité avec laquelle les personnes âgées se trouvent obligées de trier leurs affaires à la veille d’un déménagement. Or, prendre le temps de soupeser chaque objet, c’est aussi l’occasion de lui montrer sa gratitude pour services rendus, et cela facilite le fait de s’en débarrasser. « 

Pour les proches

Margareta Magnusson qui n’avoue, par coquetterie, qu’une fourchette d’âge (entre 80 et 100 ans) a elle-même été confrontée à l’obligation de faire du rangement suite au décès d’une personne chère.  » Vivre un deuil est déjà suffisamment dur. Or, on entend souvent parler de disputes entre enfants au décès des parents, parce que chacun veut garder le même objet en guise de souvenir. Donc mieux vaut prévenir. C’est le meilleur moyen de limiter les scènes pénibles. » Mère de cinq enfants, Margareta Magnusson a pris la décision de vendre un très beau bracelet qu’elle tenait de sa propre mère.  » Mes enfants ont été ravis de ma décision. Ce bracelet m’appartenait, j’avais le droit d’en disposer librement. « 

Margareta Magnusson va même plus loin : ranger avant votre décès peut aussi être une consolation pour vos proches.  » Ma mère avait rédigé de courtes lettres indiquant ce qu’il fallait faire de telles ou telles affaires. Cela m’a beaucoup réconfortée, comme si elle était encore là pour moi dans ces moments difficiles. « 

Nele Colle reconnaît qu’il peut être pénible de vider une maison au décès d’un proche.  » Cela implique de faire des choix, or choisir est une source de stress. Les proches sont éplorés et doivent en outre prendre des décisions importantes. Il faut savoir que moins on laisse d’affaires derrière soi, moins on risque de provoquer des disputes « , confirme-t-elle.

Tous les souvenirs ne se valent pas

La plupart des objets sont liés à des souvenirs. C’est pourquoi on a souvent du mal à se défaire de tel meuble ou de tel bijou.  » Pourtant, il faut être conscient que nos souvenirs n’en sont pas forcément pour les autres, prévient Margareta Magnusson. Tel membre de la famille peut avoir envie de garder un objet que les autres jugeront inintéressant. « 

En cours de rangement, on se trouve parfois confronté à un secret ou à une affaire délicate. Songez aux journaux intimes. Vous avez peut-être envie de relire votre prose mais souhaitez-vous qu’elle tombe entre les mains de vos enfants ? Quant aux souvenirs qui ne concernent que vous, comme des lettres d’amour ou des souvenirs intimes, Margareta Magnusson a une solution toute prête : les mettre dans une boîte qui pourra être détruite – ou pas – après votre décès. En attendant, vous pouvez les relire à volonté.  » Je sais que mes enfants auront sans doute envie d’ouvrir la boîte et de prendre connaissance de son contenu mais ils pourront aussi choisir de ne pas le faire. J’ai décidé moi-même de ce que les autres pourront jeter en toute conscience.  » Attention : cette boîte ne peut pas être trop grande. Une boîte à chaussures devrait suffire.

Il existe bien des façons de se débarrasser des meubles et des objets qu’on ne souhaite pas conserver. Au lieu d’acheter des cadeaux neufs à chaque fête de famille, offrez de beaux objets.  » Les dernières années de sa vie, ma belle-mère nous donnait, à chacune de nos visites, une très belle assiette en porcelaine, une jolie nappe ou des serviettes fleuries. Elle a ainsi offert toutes sortes de choses utiles à d’autres ménages « , se souvient Margareta Magnusson.

Savoir donner

Mais il faut réfléchir à qui on souhaite donner tel ou tel objet.  » Au moment de faire son tri, il faut essayer d’imaginer à qui telle ou telle chose pourrait faire plaisir. Evitez d’offrir un objet qui ne correspond pas aux goûts ou à l’intérieur de la personne, ce serait une source de gêne « , souligne Margareta Magnusson. Si un membre de la famille semble intéressé par un objet auquel vous tenez tout particulièrement, sachez vous en défaire malgré tout. Dites-vous qu’il fera le bonheur d’une personne qui pourra à son tour y attacher des souvenirs.

 » Les gens qui ont du mal à prendre du recul par rapport à leurs possessions sont souvent les plus attachés au passé et les plus anxieux quant à l’avenir. «  Je pourrais en avoir encore besoin « , se disent-ils.  » A en croire Nele Colle, nous devons nous efforcer de jeter un autre regard sur nos possessions.  » Nous vivons dans une telle époque d’abondance que nous avons tendance à accumuler énormément de choses. Tant qu’un objet n’est pas usé ou cassé, on le garde pour le cas cas où... Pourtant faire place nette ne signifie pas forcément jeter. Il vaut mieux valoriser ce dont on a besoin et revendre ce qui ne sert plus. Et oser donner, même les objets auxquels on tient le plus. Cela n’a pas de sens d’accumuler des biens qui pourraient être utiles à quelqu’un d’autre. « 

Ceux qui éprouvent des difficultés à se séparer de leurs possessions sont aussi ceux qui sont le plus attachés au passé !

Qui êtes-vous aujourd’hui ?

Que vous ayez pensé à faire du tri ou non, il faudra malgré tout que vos proches fassent du rangement quand vous ne serez plus là. Or, il leur sera sans doute difficile de décider que garder ou non.  » Les enfants tiennent à leurs souvenirs de jeunesse et se disent qu’en jetant des objets, ils jettent la mémoire qui les accompagne. Or, si les objets peuvent être évocateurs, les souvenirs sont avant tout gravés dans l’esprit. Inutile de s’encombrer pour perpétuer le souvenir d’un être cher, assure Nele Colle. D’autant que les souvenirs s’attachent rarement aux possessions de la personne mais bien plutôt aux moments vécus ensemble. Nous voulons qu’on se souvienne de nous pour ce que nous étions, ce que nous avons fait, et non pour ce que nous possédions. Lorsque vous ferez votre tri, songez à la personne que vous êtes devenue. Si tel ou tel objet correspond à cette personne-là, gardez-le. Si ce n’est pas le cas, débarrassez-vous en. Je suis toujours soulagée lorsqu’on ne conserve de l’être aimé qu’un ou deux objets. On peut alors leur réserver une place de choix dans la maison. Qui a envie de laisser du désordre ou des choses qui encombrent pour tout souvenir ? « 

Comment s’y mettre

  • Prenez votre temps mais veillez à ne pas vous perdre dans vos souvenirs. Le plus important, c’est votre vie actuelle.
  • Ne tardez pas trop : plus vous prendrez de l’âge, plus ce sera difficile.
  • Commencez par la cave ou le grenier. Conservez les photos et les lettres. Elles sont porteuses de tant de souvenirs que vous n’arriverez sans doute à en jeter aucune.
  • Rangez ensuite une pièce de la maison à la fois et procédez par catégories (vêtements, meubles, documents...).
  • Prévenez vos proches que vous allez faire du rangement. Certaines choses les intéresseront sans doute et ils pourront vous aider.
  • Demandez l’avis de personnes extérieures, sans lien émotionnel avec le contenu de votre maison.
  • Prenez contact avec des associations, des clubs, des magasins de seconde main... Certains seront peut-être intéressés par ce que vous voulez donner.

Contenu partenaire