Aux Etats-Unis, on fête désormais son divorce et on n'hésite pas à commander un gâteau pour l'occasion ! © GETTYIMAGES

Quelques pistes pour se relever après un chagrin d’amour

La Saint-Valentin n’est pas une période facile pour ceux et celles qui sortent d’une rupture amoureuse. Les peines de coeur font en effet des dégâts. Voici comment s’en relever.

Dans les comédies romantiques, l’héroïne soigne ses bleus au coeur en restant à longueur de journée sur son divan en pyjama, un mug de thé à la main. Mais les chagrins d’amour peuvent en réalité être bien plus ravageurs. « Ce n’est pas une maladie, mais on peut être vraiment très mal après une rupture, analyse Hester Schaart, psychologue. Il existe d’ailleurs cinq des troubles psychiques décrits dans le manuel DSM 5: déprime, pensées obsessionnelles vis-à-vis de l’autre, stress post-traumatique (cauchemars, images tournant en boucle...), douleurs sans cause physique et besoin de faire son deuil.  » La psychologue pense qu’il faudrait accorder beaucoup plus d’attention aux personnes qui vivent mal un divorce ou une rupture.

UN DEUIL NON RECONNU

« J’ai traversé une période difficile après une rupture, raconte Hester Schaart. J’avais beaucoup de chagrin, j’étais dépressive. Ça m’a brisée. J’avais beau avoir quelques années d’expérience en psychologie, je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Je ne profitais plus de rien, je ne pensais qu’à cette relation qui avait capoté, en me torturant sur les raisons de la rupture. J’ai fini par faire une analyse et j’ai mis deux ans pour digérer cet épisode. »

Les ruptures très douloureuses sont comparables à la perte d’un proche. Il faut faire son deuil et franchir les mêmes étapes: déni, colère, négociation, chagrin/dépression et acceptation. A cette différence près que ressentir du chagrin après un décès est mieux accepté par l’entourage. Il y a des funérailles, l’envoi de faire-part, on peut évoquer des souvenirs communs, on vous demande comment vous allez... « Il existe des rituels pour dire au revoir à un défunt mais nous n’en avons aucun en cas de divorce ou de séparation, souligne Hester Schaart. Bien que ce soit aussi une période douloureuse, avec des soucis financiers, des incertitudes, un déménagement, de nouvelles dispositions à prendre pour les enfants... Tout cela représente une charge supplémentaire dans le processus de deuil. »

L’ANGOISSE DU LENDEMAIN

Quand on est resté longtemps en couple, on perd bien plus que la présence de l’autre en cas de rupture. On perd un avenir commun, un futur qu’on écrivait ensemble. Tout à coup, la vie prend un autre cours. Pour la personne qui est quittée, le processus est long et douloureux.

Il faudrait accorder beaucoup plus d’importance à ceux qui vivent mal une rupture

« Il va de soi que vous avez toujours un avenir. Mais dans une relation de longue date, vous vous êtes formé à travers la présence de l’autre. Quand il ou elle s’en va, vous vous rendez compte qu’il va falloir avancer seul(e). Vous vous posez des tas de questions: qu’est-ce qui compte vraiment pour moi? Comment continuer seul(e)? »

Même après une relation courte et passionnée, le chagrin peut être intense. « Je vois régulièrement des gens qui vivent une nouvelle relation prometteuse et passionnée après un divorce. A la ménopause, il n’est pas rare que les femmes renouent avec leur sexualité, Elles se redécouvrent, se sentent à nouveau désirables et désirées. Une rupture à ce moment-là peut donc être extrêmement mal vécue, comme une perte et un échec de plus. Viennent s’ajouter potentiellement à cela, la perte des parents et le départ des enfants. Cela peut être vécu comme une spirale de deuil, où tout semble s’écrouler. »

SOYEZ PLUS DOUX AVEC VOUS-MÊME

La première étape pour surmonter un chagrin d’amour consiste à reconnaître la rupture, la perte et le processus de deuil. « En prenant le temps de les ressentir, de les accepter et d’être doux avec vous-même, vous vous offrez de la reconnaissance. Vous pouvez approfondir ce sentiment, par exemple en parlant de tout cela avec quelqu’un », écrit le psychiatre Uus Knops dans la postface d’un ouvrage sur la rupture.

Le psychiatre conseille aussi à ceux qui vivent une séparation douloureuse d’essayer de repérer les éléments de perte sur lesquels ils ont prise et ceux qu’il faut accepter. « Parfois on doit admettre que l’autre puisse prendre une décision incompréhensible à nos yeux. »

Hester Schaart estime que parler apporte un énorme soulagement. Parce que tout ce qui nous passe par la tête aide à structurer notre pensée, à y voir plus clair. « L’idéal est d’avoir un ami qui répond présent, même tard le soir, parce que le chagrin frappe souvent dans ces moments-là. » Mais il n’est pas toujours facile de s’ouvrir à un proche, un ami ou un membre de la famille parce que la rupture s’accompagne souvent d’un sentiment de honte...

DITES OUI à LA NOUVEAUTÉ

Autre pas important à franchir pour se retrouver après s’être séparé de la personne à laquelle on s’identifiait: instiller de la nouveauté dans sa vie. Et redevenir celui ou celle qu’on était avant. « Si vous aviez la trentaine au moment de la rencontre, vous avez certainement eu le temps d’expérimenter bien des choses qui en valent la peine, remarque Hester Schaart. Mais vous allez malgré tout devoir vous lancer de nouveaux défis. Ce qui vous permettra de constater que la vie offre des secondes chances...

Le chagrin aide à mieux se connaître. On découvre comment on gère la peine et les galères: de quelle façon en ai-je parlé aux enfants? Ai-je osé dire les choses telles quelles sont? Ai-je ressenti autre chose que de la colère? ». « Les séparations portent en elle de la sagesse. Mais on ne la découvre que plus tard « , affirme quant à lui Uus Knops

UN COEUR RECOLLÉ

Quand peut-on dire qu’un coeur brisé est recollé? Comment sait-on qu’on est passé au-dessus de son chagrin? « Faire son deuil n’est pas un parcours linéaire, observe Hester Schaart. Il y a des moments intenses, d’autres où la douleur s’allège, avant de s’abattre à nouveau sur vous.

Quand vous cessez de regarder sans cesse en arrière, que vous êtes davantage dans l’ici et maintenant, que l’avenir retrouve des couleurs, vous pouvez vous dire que vous avez fait votre deuil. Quand vous êtes à nouveau bien avec vous-même et reconnaissant de ce que vous avez vécu. Quand vous cessez de penser de manière obsessionnelle à votre ex, en entendant une chanson à la radio, par exemple... Alors vous pouvez vous dire que vous êtes redevenu celle ou celui que vous étiez avant. » En plus sage.

Un rituel de séparation

« Les rituels de passage trouvent leur source dans un besoin universel: donner forme à un moment de rupture ou à une réalité mouvante, analyse Uus Knops. Ils permettent en outre de donner du sens à ce qui s’est passé. Un rituel bien mené peut être franchement thérapeutique. »

Au Japon, on détruit les alliances au cours d’une brève cérémonie. Dans certaines tribus africaines, les femmes se mettent en cercle autour de celle qui est quittée. Aux Etats-Unis, on organise des  » divorce parties ». En Belgique, on n’en est pas encore là. Maarten Peeraert, conseiller en rituels, a cependant mis sur pied un rituel de divorce. « Idéalement, il faudrait organiser le rituel de divorce lorsque le chagrin est passé, pour que les émotions ne fassent pas obstacle. Soit environ un an après la séparation. L’idée est que les ex-conjoints se souviennent des bons côtés de leur relation et puissent sincèrement se souhaiter le meilleur pour l’avenir. C’est aussi l’occasion de prouver aux enfants que vous resterez ensemble des parents pour eux. Souvent, la communication n’est pas optimale entre les ex. Si bien que chacun reste figé dans l’idée qu’il se fait de l’autre, même s’ils ont évolué depuis la séparation. Un rituel permet de rendre visible cette évolution et d’aider les ex-conjoints à se reconnecter à un autre niveau, plus profond. Si vous avez encore beaucoup de chagrin ou que votre ex ne veut pas entendre parler de rituel, faites-le sans lui, ce sera bénéfique et sans doute surtout thérapeutique. »

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