Anne Vanderdonckt

Partir sans un bruit? Non, ça ne va pas!

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.

La première phrase, c’est elle qui vous incite à acheter le roman que vous compulsez en librairie.

Les dernières lignes, ce sont elles qui contribueront à vous laisser une impression durable. Si le dénouement est décevant, tout ce qui aura été écrit avant en sera affaibli. Une bonne fin, c’est comme un bon dessert, cela vous laisse un souvenir heureux... et oublier que le steak du plat de résistance était un peu trop poivré.

Une carrière professionnelle, c’est pareil. Il y a eu un premier jour, une entrée dans un monde complexe dont il faut apprendre les codes, avec un accueil, chaleureux ou inexistant, qui donne le ton de cette première expérience. Puis, tout un parcours semé de victoires, de déceptions, de deuils, d’adaptations multiples. Et enfin, la veille de la pension, un dernier jour, celui où l’on vide son bureau ou son casier et où tout ce qu’on accomplira sera étiqueté « dernière fois ». Un jour essentiel, symbolique. C’est pourquoi on le couronne par une fête qui marque le passage vers une autre tranche de vie.

Avant d’en ouvrir une autre, c’est une porte qu’on tire. Le rôle de l’entreprise et des collègues est d’aider à ce que ce passage se fasse harmonieusement et que la porte se ferme en laissant un sillage joyeux qui effacera les points déplaisants. Il y aura donc des discours où seul le positif sera énoncé, des blagues, des souvenirs partagés autour d’un verre, des cadeaux. Emotion. Certaines entreprises en ont fait un point fort de leurs relations humaines, d’autres non, mais rares sont celles à zapper complètement cet événement important pour le travailleur en partance, et presque tout autant pour ceux qui restent. D’ailleurs, lorsque l’entreprise se montre déficiente, spontanément, les collègues s’y substituent.

Un des effets du covid, c’est qu’il n’est plus possible (ni verre, resto, bises ou rassemblement) d’honorer comme il se doit un parcours professionnel et relationnel. On voit ainsi, ces derniers mois, des départs en catimini... « Ah bon, Machin est pensionné? ! » Se promettre qu’on fêtera plus tard? Oui bien sûr, mais si on pourra éprouver du plaisir à faire la fête, celle-ci aura perdu de son sens quand le pensionné aura déjà entamé sa nouvelle phase de vie.

Au fil des histoires qu’on m’a rapportées, j’ai été touchée par ces sexagénaires qui le lundi télétravaillent dans leur salon et le mardi s’y retrouvent pensionnés avec des possibilités très réduites de se lancer dans de (nouvelles) activités, sans même pouvoir envisager de faire un voyage transitionnel ou de câliner leurs petits-enfants.

Il est donc plus important que jamais de marquer le coup de manière à ce que le néo-retraité ne reste pas sur une impression d’inachevé. Un apéro virtuel ; des cadeaux et souvenirs ; des blagues téléphoniques ; des cartes signées par tous, des fleurs livrées à domicile. Mettons l’imagination au pouvoir pour que les départs à la pension demeurent mémorables, malgré tout. 10 ans, 20 ans, 30 ans... dans une entreprise, et partir sans un bruit: non, ça ne va pas! Et non, le covid n’aura pas le mot de la fin!

PS: Plein de bonheur à notre iconographe, Françoise Plume dont l’expérience et le rire inimitable nous manqueront!

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