Anne Vanderdonckt

Moi, je mettrais moins de sel...

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.

Hier, quand on évoquait les couples fraîchement pensionnés, la problématique de l’adaptation à ce nouveau passage était traditionnellement illustrée par un  » ... Et maintenant, il vient tournicoter autour de vos casseroles « . Solution ? Très simple : envoyez-le promener le chien, nom d’un homme !

Aujourd’hui, le nouvel homme a fait de la cuisine son territoire, à l’égal de sa femme (je sais, je sais, pas tous). En quelques années, cuisiner est devenu un plaisir, un art, un artisanat, une passion. Comme en témoignent le nombre d’émissions de télé, la starification des chefs, les piles de livres et le foisonnement de sites consacrés à la confection de nourriture. Les hommes, donc, se débrouillent très bien, et pas seulement pour cuire le mammouth au barbecue en tongs et bermuda. En couple, en fonction des aléas du boulot de l’un et de l’une, ils cuisinent tant le week-end quand on met les petits plats dans les grands, et que pleuvent les compliments, qu’en semaine quand il s’agit de confectionner un modeste stoemp-saucisses prosaïquement destiné à caler les estomacs.

Après ce petit préambule sociologique, je vous propose maintenant un exercice de décryptage iconographique. Observez bien la photo ci-dessus, qui illustre cette page. Que voyez-vous ? Un couple, disons néo-pensionné. Monsieur est en train de trancher des légumes, ce qui, comme on le sait, pour se vider la tête, équivaut à une séance de méditation. Remarquez qu’il a néanmoins un petit air légèrement agacé. Car quand on cuisine, on cuisine. Les câlins, c’est bien gentil, mais ça déconcentre. Et clac, v’là le couteau qui confond votre doigt avec le poivron. Peut-être aussi Madame a-t-elle lâché une réflexion de ce type : Ah bon, tu salis tout un robot pour râper trois carottes ? De la lotte ? Mais tu as vu le prix ! Ce n’est pas avec notre petite pension... Moi, je mettrais moins d’huile. Notez la main gauche de Madame qui vient traîtreusement en rajouter une couche : tu n’as pas un peu grossi toi, d’ailleurs ? Autres hypothèses : peut-être Madame avait-elle envie de se mettre aux fourneaux aujourd’hui. Ou bien, est-elle simplement heureuse de ne pas devoir cuisiner. Autre élément : on aurait pu inverser les personnages. Elle, l’air légèrement agacée etc.

En résumé : quand les deux membres du couple aiment cuisiner, et que pensionnés, ils en ont désormais davantage le loisir, la cuisine devient un terrain potentiellement explosif. Pour la paix des ménages : décidez, dès le début de votre nouvelle vie, d’un tour de rôle, laissez celui qui officie faire à sa guise (vaisselle comprise, évidemment). Prenez exemple sur le petit singe qui ne voit rien, n’entend rien et surtout ne dit rien. Servez chaud. Souriez. Profitez.

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