© BELGA

La déclaration des droits de l’Homme a septante ans !

En ce mois de décembre, la Déclaration universelle des droits de l’Homme fête ses 70 ans. A cette occasion, Amnesty International a mené un grand sondage sur la perception que nous avions des droits humains. L’occasion d’épingler des différences significatives entre générations...

Ce 10 décembre, cela fait exactement 70 ans que la Déclaration universelle des droits de l’Homme a été adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies. A cette occasion, l’antenne belge francophone d’Amnesty international a envoyé à chaque foyer une copie de la déclaration (voir encadré) et réalisé une grande enquête auprès de la population francophone. Selon celle-ci, 75% des francophones de Belgique se disent globalement sensibles au respect des droits humains et aux valeurs véhiculées par la déclaration. Ils sont par ailleurs nombreux à remarquer une dégradation du respect global des droits humains (41%), que ce soit au niveau de la pauvreté (49%), de l’environnement (46%) ou encore de l’accès à la justice (41%). Une prise de conscience plutôt positive, mais qui ne touche pas toutes les tranches d’âge de la même manière : si jeunes et moins jeunes se préoccupent grosso modo des mêmes droits humains (droit à la santé, à l’éducation, à la paix, à la liberté d’opinion...), on remarque tout de même des différences générationnelles, principalement en ce qui concerne l’engagement pour défendre ces droits et l’accès à l’information.

Des canaux d’info différents...

37 % des moins de 35 ans n’ont ainsi jamais entendu parler de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme l’Homme (contre 11% de 55+) et ils ne sont que 35% à en avoir entendu parler dans les médias (contre 55% de 55+). La perception qu’ils ont d’une dégradation du respect des droits humains est par ailleurs moindre que chez leurs aînés. En cause ? Il existe de nombreux éléments de réponse, mais l’on peut ici épingler que ces deux générations « extrêmes » consomment des médias différents. « Il est plus compliqué pour les jeunes d’avoir accès à l’information de qualité, estime Philippe Hensmans, directeur de l’aile francophone d’Amnesty international en Belgique. Ils sont constamment bombardés d’informations, notamment via les réseaux sociaux, ce qui fait que les médias traditionnels ne les touchent plus. Ils ne s’y réfèrent qu’en cas de crise. Et puis, la capacité d’information et d’analyse des médias a fortement diminué, on est clairement dans l’infotainment, un mélange d’information et de divertissement. »

Un avis globalement partagé par Marc Jacquemain, sociologue et professeur à la Faculté des sciences sociales de l’université de Liège : « Vous aurez moins d’informations sur les droits de l’Homme et le respect de ceux-ci en surfant sur Instagram ou sur Facebook, que si vous regardez les émissions politiques à la télé ou êtes l’une des rares personnes à encore lire le journal ! Les plus jeunes partagent surtout des images, des vidéos courtes ou d’influenceurs : ils ne sont pas moins intéressés, mais leur environnement naturel n’a pas toujours beaucoup de contenu, de recul. D’où des différences nettes de perception entre générations, ce qui n’en fait pas pour autant des groupes complètement opposés... »

... et des modes d’action différents

A en croire l’étude, les 55 ans et plus seraient par ailleurs plus nombreux à vouloir s’engager pour défendre les droits humains (voir à ce propos, « La Révolution des 50+ » dans le Plus Magazine de décembre). En tout cas, ils seraient davantage prêts à s’impliquer que les moins de 35 ans. « En réalité, c’est à la fois vrai et faux : les deux générations ont des manières de réagir différentes, tempère Philippe Hensmans. Du côté plus âgé, on va plutôt s’engager sur des causes à long terme, parfois plus générales et plus lointaines, notamment via une organisation telle qu’Amnesty. Les jeunes, eux, passent très rapidement d’une cause à l’autre. Ils auront plus tendance à s’engager au niveau local, là où les effets sont rapidement perceptibles, ou pour une cause bien précise et limitée dans le temps – on l’a vu, ils étaient nombreux à se mobiliser pour demander la libération d’Ahmadreza Djalali [professeur iranien de la VUB, condamné à mort dans son pays, ndlr]. Il y a une plus grande volatilité dans leurs préoccupations, ils sont plus dispersés. L’engagement traditionnel ne les attire plus, un renouveau des structures comme la nôtre est donc nécessaire, pour les sensibiliser et les inciter à agir. C’est l’un de nos grands enjeux. L’autre, c’est d’offrir aux 45 ans et plus une capacité d’engagement, pour un engagement plus posé, réfléchi et pour lequel on dispose de plus de temps.« 

Relire les Droits de l’Homme

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la toute nouvelle Organisation des Nations Unies (ONU) travaille à l’élaboration d’un texte précisant les droits fondamentaux de tout être humain. Signé par la plupart des pays membres (avec de rares absentions, notamment l’Afrique du Sud, encore sous le régime de l’Appartheid), il précise que le fondement « de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde » se situe dans « la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables ».

Cette « Déclaration universelle des droits de l’Homme » comporte 30 articles, chacun énonçant un ou plusieurs droits, allant du droit à la vie et à la sûreté de sa personne à celui d’un jugement équitable, à la libre circulation, au mariage consenti, à la liberté d’expression, d’association, à la sécurité sociale, à la propriété, à l’éducation, à un salaire équitable... Des droits fondamentaux qui font tellement partie de nos vies que nous n’avons parfois plus l’impression qu’il s’agit d’un droit, mais d’un état de fait. D’où, peut-être, l’intérêt de la relire en ce mois anniversaire...

Contenu partenaire