Des pompiers à la rescousse du Népal © FRANK BAHNMÜLLER

Défendre une bonne cause : de plus en plus nombreux à nous retrousser les manches

La période des fêtes de fin d’année est idéale pour récolter des fonds au profit d’une bonne cause. Cerise sur le gâteau, en plus de mettre la main au porte-monnaie, nous sommes de plus en plus nombreux à nous retrousser les manches. Certains lancent même leurs propres initiatives.

Cap 48, le Télévie, Viva for Life... Autant d’opérations caritatives devenues des classiques médiatiques : chaque année, au cours de grandes soirées diffusées en télé et/ou en radio, elles récoltent toujours plus de dons au profit des personnes handicapées, de la recherche scientifique ou pour de la lutte contre la pauvreté infantile. De ce côté-ci de la frontière linguistique, les grandes coupoles caritatives se chargent elles-mêmes de redistribuer l’argent récolté à différents projets ou institutions. Il n’en va pas de même en Flandre où, de plus en plus, les donateurs peuvent choisir la manière dont on utilisera leur don.  » Dans le cas de Music for Life (une action caritative menée par la radio Studio Brussel), par exemple, on incite les gens à se mobiliser pour une cause à laquelle ils peuvent s’identifier, note Dominique Allard de la Fondation Roi Baudouin (FRB) qui soutient de nombreuses oeuvres et veille à ce que l’argent arrive à bon port Il peut s’agir d’une action locale ou d’un projet qui leur tient à coeur. Les grandes campagnes médiatiques destinées à une bonne cause n’ont rien de nouveau. Mais ce qui nous frappe, c’est qu’on ne parle plus désormais de  » simplement  » rassembler des fonds; parfois, l’objectif est aussi de mener à bien des actions. Les gens organisent donc eux-mêmes des collectes d’argent pour nourrir le projet de leur choix. « 

La philanthropie de proximité

Ce concept de philanthropie de proximité, comme la définit Dominique Allard, n’a pas été inventée par les médias. C’est une tendance de fond.  » Voici trente ans, le «  Penser global, agir local  » n’était qu’une théorie. Aujourd’hui, les gens la mettent en pratique. Cela se reflète dans l’économie circulaire, mais aussi dans le secteur caritatif. Les personnes de 80 ans et plus épargnent davantage et font des legs, des donations à la fin de leur vie. Les jeunes générations, elles, donnent plus tôt, et pas de la même manière. Elles ont besoin de s’impliquer et optent pour des projets au sein desquels elles savent que leur don fera une différence. Agir localement présente un avantage : on voit directement à quoi sert l’argent.  » Cette implication passe aussi par un effort personnel : on ne se contente plus de faire un don, on veut consacrer un peu de son temps à la cause qui nous tient à coeur.

La couverture médiatique

La couverture médiatique dont bénéficient toutes ces petites opérations caritatives joue un grand rôle dans le développement et la multiplication des initiatives locales.  » Les médias crédibilisent les bonnes causes, explique Dominique Allard. Les plus grands organismes caritatifs doivent partiellement leur succès au fait que les dons sont fiscalement déductibles. Les petites associations, elles, ne peuvent pas se prévaloir de cet avantage. Les fonds qu’elles récoltent via telle ou telle action restent limités par rapport aux dons et aux legs. Mais ces actions les aident à se faire connaître. Le fait de mobiliser des gens pour une cause leur confère une légitimité et de la crédibilité, avec un effet boule de neige : cela suscite l’organisation de nouveaux projets. « 

Les Belges sont très généreux

A mesure qu’on dépense plus de temps et d’argent au bénéfice de petites associations, les grands organismes, comme 11.11.11 ou la Fondation contre le cancer, n’en pâtissent-ils pas ? La Fondation Roi Baudouin assure que non.  » Les Belges sont globalement très généreux. Ils feront un don fiscalement déductible à un grand organisme et y ajouteront un ou plusieurs extras au bénéfice de petites associations. Mais, en fin de compte, peu importe où va l’argent. Rien ne prouve que 5 millions d’euros partagés entre des centaines de petites associations locales seraient moins rentables que 5 millions versés à un seul programme de recherche contre le cancer. On aurait tort de hiérarchiser les nobles causes. Chaque euro dépensé pour un projet socialement valable, que ce soit près de chez soi ou à l’autre bout du monde, a de la valeur. »

Le contrôle social

Savoir qu’on se mobilise avec d’autres dans un même but est agréable. Faire un don via son ordinateur est un acte individuel. Se retrouver entre amis et connaissances est un événement social.  » C’est le petit plus de la philanthropie, estime Karen Dobbé, coordinatrice régionale de la collecte de fonds pour la province d’Anvers (Kom op tegen Kanker). Qu’une action remporte du succès et rapporte de l’argent est enthousiasmant. Mais il s’agit avant tout de convivialité, de créer du lien et de soutenir ceux qui en ont besoin. « 

C’est aussi ce qui fait la valeur d’une bonne cause.  » La Fondation Roi Baudouin se contente de vérifier que telle ou telle action est bien à visée socio-culturelle. Nous ne contrôlons pas le bon déroulement du volet financier. Pour cela, nous comptons sur la cohésion interne qui se met naturellement en place. Quand il y a des dérives, elles sont en général détectées et résolues au sein du groupe. « 

8 conseils pour réussir son action

Envie de mettre sur pied une action caritative au profit d’une asbl ou d’un projet humanitaire/animalier ? Voici les conseils de Karen Dobbé, impliquée dans la lutte contre le cancer.

1. Choisissez une cause qui vous tient à coeur

Ce qui mobilise nos membres, constate Karen Dobbé, ce sont les récits autour du cancer. 90 % d’entre eux ont été malades ou ont un proche confronté à la maladie. En agissant, ils sont dans le concret, dans l’action positive par opposition à l’impuissance qu’ils ressentent ou ont ressentie face à la maladie. Cela donne du sens à leur combat contre le cancer.

2. Travaillez main dans la main avec l’association

Prenez contact avec l’association (ou l’organisme) pour lequel vous voulez mettre en place une action. Elle pourra attester que vous agissez en son nom quand vous chercherez des sponsors ou des subsides. De plus, les membres de l’association pourront vous mettre en contact avec d’éventuels autres bénévoles, afin que vous mettiez sur pied une action plus solide.

3. Informez-vous auprès de votre commune

Chaque commune a son guichet consacré aux activités diverses, où vous pouvez poser toutes les questions voulues sur les subsides, les assurances, la législation, les droits d’auteur à verser à la Sabam, etc.

4. Organisez une activité qui vous plaît

Quand il y a à boire et à manger, cela attire toujours du monde. Mais il n’existe pas de formule magique pour attirer les gens. L’important, c’est que vous y preniez du plaisir. Veillez à ce que l’activité reste accessible. Si son organisation prend des proportions folles, vous vous sentirez dépassé et vous n’aurez peut-être plus envie de recommencer.

5. Prévoyez un plan d’action

La force d’une activité philanthropique réside dans son plan d’action. Réfléchissez à l’avance aux personnes à contacter pour obtenir de l’aide, aux sponsors éventuels, à la salle que vous pourriez occuper gratuitement, aux subsides...

6. Servez-vous de votre réseau

N’hésitez pas à mobiliser vos amis, votre famille, vos collègues, des amis d’amis... Vous seriez surpris de voir comme l’aide peut parfois venir de loin.

7. Tenez une comptabilité transparente

Ouvrez un compte bancaire distinct pour votre événement, afin de ne pas mélanger l’argent versé par les sponsors avec vos activités bancaires personnelles. Soyez clair avec vos sponsors, dites-leur ce qui donne droit à une attestation fiscale ou non.

8. Communiquez jusqu’au bout

Faites une communication après la tenue de l’événement. Mentionnez les gains et remerciez toutes les personnes qui vous ont soutenu. Vous pouvez le faire dans une parution locale ou régionale, ou encore via les réseaux sociaux, même en cas de très petite cagnotte. Ce n’est pas le montant qui compte mais l’engagement. Plus on fait de promotion autour d’une action philanthropique, mieux c’est.

Sur le site internet www.bonnescauses.be vous trouverez la liste de toutes les oeuvres que vous pouvez soutenir.

Des pompiers à la rescousse du Népal

« Nous avons déjà sillonné une dizaine de fois le Népal, sac au dos. En 2014, une caserne de pompiers nous a ouvert ses portes et nous avons été très surpris de constater la vétusté de l’équipement : des véhicules hors d’âge, un simple t-shirt, des tongs et un casque de vélo pour toute protection. Nous avons eu envie de faire quelque chose pour améliorer les conditions de travail de ces pompiers népalais racontent Johan Schots, 46 ans, Bert Poelmans, 47 ans, Edward Savat, 33 ans, et Yves Vermeulen, 50 ans, les pompiers belges qui ont créé Firefighters for Nepal (F4N).

Défendre une bonne cause : de plus en plus nombreux à nous retrousser les manches
© FRANK BAHNMÜLLER

Nous avons sollicité plusieurs corps de pompiers et entreprises pour obtenir des équipements et du matériel de lutte contre le feu. Nous avons rassemblé le tout et sommes allés l’apporter à nos confrères népalais. En accord avec plusieurs corps de pompiers sur place, nous avons mis sur pied une formation de cinq jours, dans le but d’apprendre aux pompiers à se servir de leur nouveau matériel. Lors de notre prochaine visite, nous emporterons un container que nous transformerons en pièce de simulation d’incendies. Qui sait, à terme nous créerons peut-être une véritable école de pompiers.

Nous payons de notre poche nos frais de transport et de séjour. Chaque euro récolté va aux pompiers népalais. Au début, nous ne pensions pas agir sur le long terme. Tant mieux, car cela nous aurait peut-être effrayés. En tant qu’hommes du feu, notre métier est d’aider, nous y sommes habitués, mais c’est émouvant de voir à quel point nos efforts aident les pompiers et la population làbas. Nous sommes à fond dans notre mission. Lors d’un incendie, nous devons nous faire confiance aveuglément. Il en va de même pour nos confrères népalais : s’ils partent à dix combattre un feu, nous voulons les voir revenir tous sains et saufs à la caserne.

Les Népalais nous sont reconnaissants et cela fait chaud au coeur. Ils n’ont rien mais ils nous accueillent avec générosité et nous font même de petits cadeaux. Nous ne les aidons pas pour obtenir cette reconnaissance mais cela nous encourage à donner deux fois plus de nous-même. Nous avons désormais mis tout un réseau sur pied. Au Népal, nous coopérons avec plusieurs corps de pompiers et associations. En Belgique aussi, nous constatons avec joie que les gens offrent facilement et spontanément leur aide. C’est merveilleux de voir les choses bouger ! »

www.f4n.be

Dominique Filliers a créé le Fonds Jan Filliers

« Grâce ce fonds, nous voulons perpétuer le souvenir de mon mari, explique Dominique Filliers. Il est décédé dans un accident de car qui a impliqué toute notre famille. Mon fils, qui avait alors 15 ans, a perdu un bras et a dû suivre un long programme de revalidation. Nous avons eu la chance de bénéficier d’un large réseau. Nos amis et notre famille nous ont spontanément offert leur aide. Nous le devons en bonne partie au caractère de Jan qui était quelqu’un de bien. Il adorait être entouré, tout en étant toujours prêt à aider les autres. Lorsqu’un ami de la famille m’a proposé de créer un fonds, j’ai pris le temps de la réflexion. Quelques mois plus tard, après que les enfants aient donné leur feu vert, j’ai sauté le pas.

Défendre une bonne cause : de plus en plus nombreux à nous retrousser les manches
© FRANK BAHNMÜLLER

Le fonds a pour vocation d’aider les accidentés qui ont des lésions ou des traumatismes durables. Nous comprenons ce que c’est pour l’avoir vécu. Au début, on se dit :  » Ma vie est fichue « . Les conséquences sont extrêmement lourdes mais un avenir reste possible. Le fonds appuie financièrement la concrétisation d’un projet, qu’il s’agisse d’aides techniques qui permettent de poursuivre ses études, de cours de musique pour une personne incapable de se rendre à l’académie, de la mise sur pied d’une pièce de théâtre ou de nouvelles infrastructures pour la sécurité routière... Ce sont les gens qui viennent nous solliciter avec une idée précise.

Les cinq premières années, nous avons consacré toute notre énergie à la collecte d’argent. Nous avons ainsi organisé cinq concerts au profit du fonds et sommes allés présenter notre projet auprès de diverses associations et de clubs. Si on ne le fait pas, les gens pensent très vite que le fonds a cessé d’exister. C’est pourquoi nous avons mis sur pied un événement d’ampleur en collaboration avec le Circus Ronaldo. Désormais, je me consacre surtout à la visibilité du fonds pour qu’on sache où nous trouver. Il est primordial de communiquer, afin que les associations pensent à votre projet dans le cadre d’une bonne cause. Cette année, des amis de mes enfants ont reversé les bénéfices de leur festival au Fonds Jan Filliers via Music for Life. C’est important, car si nous devions tout récolter seuls, nous aurions un travail monstre. »

www.fondsjanfilliers.be

4Balzanes vien en aide aux chevaux maltraités

« J’ai été sensibilisée assez jeune à la problématique des chevaux usés et dont on se cherche à se débarrasser, raconte Sandra Godfroid, fondatrice de l’association 4 Balzanes. J’ai commencé par racheter d’anciens chevaux de manège, à titre privé. Puis, j’ai vu comment cela se passait dans les abattoirs pour les vieux chevaux. Mes fonds propres ne suffisaient plus pour venir en aide à ces animaux et, pour faire un appel au don, il me fallait une structure juridique. C’est ainsi qu’est née  » 4 Balzanes « , il y a dix ans.

Défendre une bonne cause : de plus en plus nombreux à nous retrousser les manches
© FRÉDÉRIC RAEVENS

Depuis lors, l’association s’est bien développée et s’est installée dans une ancienne ferme près de Soignies. On s’y occupe de pas moins de 80 animaux, dont 50 chevaux et quelques ânes, chèvres et moutons. Nous sommes devenus un refuge officiel : le ministère du bien-être animal nous contacte lorsqu’il y a des saisies et que des animaux maltraités doivent être pris en charge. Le plus souvent, ils arrivent chez nous très maigres, couverts de vermine ou avec des problèmes vétérinaires importants.

Pour permettre à ces animaux de se refaire une santé avant de retrouver un foyer, ou pour leur assurer la meilleure fin de vie possible, aucun salarié : l’association ne fonctionne que grâce à des bénévoles. Mon compagnon et moi nous occupons des animaux soir et matin avant de partir travailler. Le reste des tâches est rempli par une vingtaine de membres qui s’engagent à nous consacrer au moins un jour par semaine et se relaient au quotidien. Nous n’avions pas pensé à cela au début, mais les animaux ne sont pas les seuls à profiter de cet engagement. La plupart de nos bénévoles ont plus de 50 ans : le fait de venir leur permet d’avoir une activité utile et d’en retirer une grande satisfaction, car les animaux sont toujours reconnaissants, toujours heureux de les voir. Parfois, pour nos membres, cela constitue carrément un nouveau départ, une reprise de confiance en soi.

Pour subvenir aux besoins des animaux, nous organisons un parrainage des chevaux, des opérations temporaires et acceptons les dons. Mais nous manquons surtout de volontaires : si vos lecteurs sont intéressés, qu’ils n’hésitent pas à nous contacter ! »

www.4balzanes.be

Lili à l’infini, face au syndrôme de Rett

« Jusqu’à neuf mois, notre fille Lili a évolué normalement, se rappelle Sébastien Dricot, à l’origine de l’asbl  » Lili à l’infini « . Mais petit à petit, nous nous sommes rendu compte que quelque chose clochait : elle était hypotonique, ne se retournait pas... Quelques mois plus tard, la nouvelle tombait : notre petite Lili souffre d’une maladie génétique rare, le syndrome de Rett. Le neuropédiatre nous a dit que notre fille ne marcherait ni ne parlerait jamais, qu’elle perdrait progressivement l’usage de ses muscles... Rien qui ne laisse de la place à l’espoir et, logiquement, nous nous sommes d’abord effondrés.

Défendre une bonne cause : de plus en plus nombreux à nous retrousser les manches
© FRÉDÉRIC RAEVENS

Mais, rapidement, nous avons refusé de nous résoudre à ces prévisions pessimistes et avons chercher à nous renseigner un maximum. Nous avons appris que des enfants souffrant de ce syndrome pouvaient continuer à se développer, pour peu qu’ils soient suffisamment stimulés. Nous avons découvert la méthode Son Rise, une stimulation intensive et individuelle de l’enfant par le jeu. Mettre en place cette méthode coûte une fortune et, quelques mois à peine après le diagnostic, nous avons créé une asbl. Au moyen de petites opérations d’abord (souper spaghetti, soirée thématique...), puis d’événements plus importants (la Lili Run, un jogging caritatif), nous avons pu obtenir des moyens. L’objectif : repousser toutes les limites, essayer tout ce qui existe et mettre en place ce qui n’existe pas, pour inciter Lili à progresser. Des bénévoles formés s’engagent à jouer avec notre petite fille, des séjours dans un centre spécialisé à l’étranger sont planifiés. Avec succès : Lili se tient debout, parvient à se déplacer sur un vélo adapté ; elle est désormais scolarisée en première maternelle.

Au-delà de Lili, notre asbl a aussi pour vocation de venir en aide aux parents dans le même cas que nous, pour qu’ils puissent profiter de notre expérience, connaître les petites choses que les médecins ne leur diront jamais et qui font de grandes différences. Par ailleurs, une autre association, Eudaimonia, vient de voir le jour, afin de permettre à d’autres enfants souffrant de pathologies similaires de bénéficier des  » recettes  » employées pour Lili au sein d’une structure d’accueil. »

Sur Facebook :  » Lili à l’infini asbl  » et  » Eudaimonia asbl  » www.eudaimonia.be

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