Anne Vanderdonckt

Confiné, pensionné, même combat!

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.

Déformation professionnelle sans doute, cette inédite expérience du confinement m’est immédiatement apparue comme un parfait stage de préparation à la retraite.

On est quel jour, déjà ? Le confiné rencontre très rarement un embouteillage sur le chemin entre sa salle de bains et son ordi de télétravailleur posé sur un coin la table du living. Il pourrait donc très bien se lever une heure plus tard, ou plus si affinités. Attention, piège ! S’extraire de la douceur de sa couette seulement quand on le sent, parce qu’il n’y a pas la sanction de la pointeuse, c’est risquer le décalage horaire perpétuel et la perte de repères. D’où ces retraités zélés qui, au grand dam des travailleurs, continuent à pousser leur chariot le samedi matin dans les grandes surfaces bondées parce que cela marque une balise dans leur semaine. Samedi, c’est courses. Dimanche, c’est frites. Lundi, c’est lessive...

Et tous les jours, c’est apéro ! Car il faut quand même/enfin profiter de la vie, hein. Attention, piège ! Le confinement comme la pension, c’est un peu le Canada Dry des vacances : ça en a un petit goût mais c’est tout. Et nombreux sont les néo-pensionnés à s’être retrouvés, un an et 365 verres plus tard, bardés de 10 kilos que la nature n’avait pas prévus au programme avant de devoir s’imposer une draconienne reprise en mains.

Et tous les jours, c’est 24/24 ensemble. Eh oui, le boulot n’est plus là pour faire diversion. Le couple dont, en temps normal, chaque membre vaque de son côté, est désormais privé de cette parenthèse conjugale quotidienne. Et, tout guilleret de pouvoir enfin profiter de la présence aimée, en arrive à se courir très rapidement dans les pattes. Attention, piège. Donc, d’abord, il convient de se définir un territoire et de respecter celui de l’autre. Ce qui est évidemment plus facile quand on dispose d’espace. J’en profite pour m’insurger avec force contre ce lieu commun selon lequel, à la pension, les gens auraient besoin de moins de m2. Combien de prises de bec serait évitées si chacun disposait d’un endroit à soi, ne fût-ce que l’équivalent d’un placard à balais. Ensuite, même si le couple entretient des passions communes, que chacun veille à s’adonner à un loisir personnel de son côté, ait un cercle d’amis propre. Question de souffler, mais aussi de pouvoir échanger ensemble nouvelles et potins, de faire rentrer de l’air frais, de pouvoir avoir le plaisir de se retrouver. Enfin, il est indispensable de considérer l’autre au moins avec autant de respect que ses collègues. En d’autres mots, on prend soin de son apparence, on s’habille certes de manière moins formelle qu’au bureau, mais sans laisser-aller.

Et ce jour-là, on met le turbo. Tout content, le confiné entend enfin parler de déconfinement. Et se rend alors compte avec effroi qu’il n’a toujours pas, comme il se l’était promis, imprimé ses photos, nettoyé le grenier, ouvert l’application de méditation téléchargée le 13 mars. Le confiné commence alors à s’agiter. Avant de se dire que, finalement, à sa pension, il sera toujours temps... Ou pas.

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