67 ans et au boulot ? Allez allez !

Travailler jusqu’à 67 ans. C’est la première mesure que communique ce nouveau gouvernement qui débarque comme un cow boy, à cheval dans le saloon.

Je ne comprends pas. Je ne comprends pas la tactique, s’il y en a une. Lâcher ça, brutalement, d’entrée de jeu, sans concertation, après avoir juré que ce n’était pas au programme, c’est évidemment ouvrir la porte à la révolution. Et cela n’a pas tardé. Car ce n’est pas un, ce ne sont pas deux mécontents qui se sont immédiatement fait entendre. Ce ne sont pas des isolés, des sans voix ni arguments. Et ils ne se tairont pas. L’automne sera chaud.

Que cela soit clair, je ne plaide pas ici pour ma chapelle. Mon souhait le plus cher – je le pense depuis que je suis en âge de travailler et je n’ai pas changé d’avis depuis lors – c’est de travailler le plus longtemps possible. A condition qu’un jour, on ne me trouve pas trop vieille pour ça. Car combien d’entreprises ne se séparent-elles pas de leurs collaborateurs avec l’âge comme seul critère ? Combien d’entreprises n’imaginent-elles pas des plans de prépension à des âges ridiculement bas, contraignant à l’inactivité professionnelle des gens au summum de leurs capacités ? Et qui auraient eu envie de continuer à travailler. Parce qu’ils aiment ça. Ou parce qu’ils ont les études des gosses à payer. Ce qui est légitime dans tous les cas.

Par ailleurs, qui a envie d’engager des 50 + ? Même si rien n’est impossible, essayez de (re)trouver du boulot lorsque vous avez franchi ce cap et que vous n’êtes pas un big boss. Je me souviens de cette phrase de Bart de Wever, à propos du chômage, qui était interpellante de vérité, lorsqu’il disait que tout le monde pouvait trouver du travail en Flandre, mais concédait volontiers qu’évidemment ça ne concernait pas les 50+. Tiens ! Eh bien, il faut croire qu’aujourd’hui Monsieur De Wever a trouvé un moyen de créer de l’emploi pour les 50+. On s’en réjouit.

Alors oui, c’est violent et creux de dire : l’âge légal de la pension passera à 66 ans en 2025 et à 67 ans en 2030. Qu’on essaie d’abord de garder les gens au boulot plus longtemps dans ce pays où l’âge effectif de départ à la retraite est de 59 ans. Car, les spécialistes le répètent à l’envi, c’est bien là que réside le problème. Même Alexander De Croo (libéral, non ?, ou je me trompe) a avancé il n’y a pas si longtemps de ça qu’il était inutile de reculer l’âge de la retraite alors que l’âge de départ réel était de 59 ans. Ne rien changer à cela, cela revient purement et simplement à ne pénaliser que ceux, trop peu nombreux, qui ont la chance d’avoir encore un emploi à 55 ans. Sauver le système des pensions, tout le monde le veut, mais restons cohérents !

Plutôt que de jouer les effets d’annonce, qu’on se demande pourquoi les gens ont envie de stopper. Et qu’on mette en place des mesures réalistes pour les motiver à travailler. Qu’avant de donner des leçons et de brandir des doigts accusateurs, on fasse preuve, aussi et surtout, d’un peu d’empathie. On fait quoi du quinqua qui, après une maladie, n’arrive plus à grimper sur les toits ? On le transfère  » dans les bureaux  » ? Dans la théorie, oui. En pratique, non. On lui propose une formation en fleurs de Bach en espérant qu’il retrouve un emploi ? Cela se fait, quelle violence !

Ce qui est clair, c’est que, comme le remarque le spécialiste des pensions Michel Jadot, qui voit un jeu de dupes tant pour la sécurité sociale que pour les travailleurs, cette mesure va se répercuter sur le chômage, les prépensions et les indemnités d’invalidité. On sait que le nombre des incapacités de travail de longue durée (nous nous sommes déjà penchés sur le sujet) ont déjà commencé à augmenter solidement.

Et puis, à épingler aussi cette mesure considérée comme positive : désormais les pensionnés qui veulent travailler après 45 ans de carrière pourront gagner plus. Un vrai cadeau ! Des pensionnés qui gagnent plus après la pension qu’avant, j’en connais des tonnes, merci, merci ! Allez allez, qu’on arrête de rire, que nos édiles et autres penseurs redescendent sur terre chez les  » vrais gens « . Que la Tour des pensions ne deviennent pas la Tour d’ivoire.

Mais comme la philosophie de Plus Magazine est d’avoir une vision positive de la vie, eh bien, voilà cette petite dernière pour la route... L’Institut belge pour la sécurité routière a pu choquer certains, il y a quelques jours, en conseillant aux 65+ de vérifier leurs réflexes (ce qui n’est de toute manière jamais inutile). Le futur gouvernement nous dit maintenant qu’à 67 ans, on est bons pour le service. Qu’à 67 ans, on est jeune ! Merci pour ça !

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