© Wim Kempenaers

Vivre avec le lupus: « Comme si un bulldozer m’avait roulé dessus » (témoignage)

D’aussi loin qu’elle se souvienne, Daniëlle Bijnens, 64 ans, a toujours dû vivre à l’abri du soleil. « Comme si mon corps savait que les rayons UV risquaient de provoquer des éruptions cutanées. Pourtant, il a fallu des années avant que le diagnostic de lupus ne soit posé. »

« J’étais encore à l’école primaire lorsque j’ai remarqué que j’étais toujours plus fatiguée pendant les mois d’été. Il m’arrivait aussi d’avoir régulièrement des maux de ventre, sans raison particulière. Les symptômes plus sérieux ne sont apparus que des années après, quand j’ai accouché de mes enfants. Les fortes fatigues ont persisté avec, en plus, toutes sortes de problèmes, comme des allergies alimentaires, que les médecins n’arrivaient pas à traiter. Mais j’avais une famille et un chouette travail, alors j’ai tenu bon. Finalement, il a fallu que j’aie plus de 40 ans pour qu’on commence à y voir clair, grâce aux recherches que j’ai menées moi-même. »

Compagnons d’infortune

Après une chute à vélo, Daniëlle s’est mise à souffrir de douleurs articulaires inexplicables. « J’ai consulté un rhumatologue mais, lorsqu’il a reconnu ne rien y comprendre après un an d’examens divers et de prise de cortisone, je me suis dit que j’allais poursuivre les recherches moi-même. Une amie m’a suggéré de me rendre dans une autre clinique, et c’est là qu’on m’a parlé pour la première fois de lupus. Après plus de trente ans! Ce qui complexifie les choses dans mon cas, c’est qu’en plus du lupus, je souffre aussi d’une maladie rare, la sclérodermie systémique, avec superposition des symptômes. »

Spécialiste de sa maladie

Daniëlle est devenue une vraie spécialiste de son cas médical. « C’est nécessaire, car cette maladie se manifeste de manière différente chez chacun, ce qui ne facilite pas la tâche des médecins. Aujourd’hui, mon cas est plus ou moins sous contrôle, grâce à une batterie de médicaments fortement dosés et à une thérapie immunosuppressive, mais cela affaiblit forcément mon immunité et il est impossible de prévenir toutes les crises. Celles-ci commencent en général par de la fièvre et une fatigue généralisée, un peu comme si un bulldozer m’avait roulé dessus.

Dormir ne suffit pas, car cette fatigue est provoquée par des inflammations dans tout mon corps. Parfois, les symptômes sont plus sévères, comme l’hiver dernier quand j’ai eu une double pneumonie. Dès que je m’expose au soleil, je développe un lupus érythémateux, j’ai le visage tout rouge et gonflé, avec le risque que cela touche aussi certains organes. Financièrement aussi, c’est lourd: les médicaments et les consultations chez les spécialistes coûtent cher. »

J’ai longtemps hésité à me faire aider, pourtant cela apporte une vraie différence en termes de qualité de vie!

Un manque de force

« A force d’expérience, j’ai appris à mieux m’organiser et je prévois régulièrement des plages de repos, mais avant c’était beaucoup plus difficile. Comme beaucoup, j’ai longtemps continué à travailler, tout en m’occupant de ma famille et d’une de mes filles qui a des soucis de santé. De la fin de l’automne jusqu’au printemps, j’y arrivais, puis j’avais une grosse baisse de régime et, arrivée aux grandes vacances, j’étais épuisée, à devoir m’aliter. Aujourd’hui encore, j’évite absolument le soleil, ce qui limite bien sûr ma vie sociale. J’ai du mal à accomplir des tâches physiques par manque de force musculaire. Je suis vite très fatiguée quand je m’occupe de mes petits-enfants, même si j’adore cela. »

C’est quoi le lupus?

Le lupus érythémateux systémique (LES) est une affection chronique qui provoque des inflammations au niveau de plusieurs organes (peau, articulations, sang, reins et système nerveux central). Le LES est une maladie dite auto-immune: le système immunitaire se retourne contre ses propres tissus et cellules. Lorsque les signes d’inflammation se prolongent, ce qui est souvent le cas avec le LES, cela peut provoquer des dommages durables aux tissus qui fonctionnent alors anormalement. C’est pourquoi le traitement consiste avant tout à freiner l’inflammation.

Le rôle de l’hérédité

« J’ai longtemps hésité à me faire aider, pourtant cela apporte une vraie différence en termes de qualité de vie! Personnellement, échanger avec des personnes atteintes de lupus comme moi m’a énormément aidée, car pour les amis et la famille ce n’est pas toujours évident de comprendre ce qu’implique la maladie, ni de vous voir un jour en forme et le lendemain épuisée. » La maladie est partiellement héréditaire mais des facteurs environnementaux, comme le stress, interviennent aussi. « Quand je repense aux problèmes dont ma mère se plaignait, je me dis qu’elle en souffrait sans doute, elle aussi. Mes filles, elles, ne veulent pas se faire tester. »

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