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Stop aux infections urinaires

La moitié des femmes sont concernées, tôt ou tard, par les infections urinaires. Un problème qui peut hélas devenir chronique. Quels traitements privilégier ? L’extrait de canneberge est-il efficace? Comment bien uriner?

S’il s’agit d’un problème féminin très fréquent, les infections des voies urinaires n’expliquent pas toujours les troubles de la miction.  » Il y a parfois confusion, en particulier au moment de la ménopause, prévient le Dr Hendrik Cammu, gynécologue. La sécheresse vaginale est un problème typique de la ménopause. Or, cette sécheresse provoque des irritations qui peuvent causer des douleurs et une sensation de brûlure lors de la miction. Ou encore le besoin de faire souvent un petit pipi, y compris la nuit, ou l’impression de devoir uriner alors qu’on ne doit pas vraiment... Autant de symptômes qu’on interprète parfois à tort comme les signes d’une infection. »

INFECTION OU PAS ?

Pour savoir s’il y a une infection, il faut procéder à une analyse d’urines en laboratoire, ce qui prend deux jours. « Dans les faits, il est rare qu’on le fasse. Souvent (après un test d’urine réalisé à l’aide de bandelettes ou pas de test du tout), on prescrit sans attendre de la nitrofurantoïne, un antiseptique et antibiotique ciblé. Tout simplement parce que le test urinaire ne détecte que certaines substances, comme les protéines, les globules blancs et les nitrites présents dans les urines. Ce qui laisse une grande incertitude quant à la présence efective d’un agent infectieux. S’il n’y a pas d’infection bactérienne, on peut traiter les symptômes de sécheresse vaginale par thérapie hormonale locale (crème ou ovules). « 

NON, LES LUNETTES DE WC ET LES SERVIETTES DE BAIN NE SONT PAS DES VECTEURS D’INFECTIONS URINAIRES !

Avec l’âge, il est logique de ressentir plus souvent le besoin de se lever la nuit pour uriner.  » Le corps fabrique de l’ADH, une hormone antidiurétique qui divise par deux la production d’urine pendant la nuit, ce qui permet à la vessie de se remplir moins vite. Plus on vieillit, moins l’organisme synthétise d’ADH et plus on ressent le besoin d’uriner la nuit. Si cela perturbe votre sommeil, vous pouvez vous supplémenter en ADH mais c’est un traitement assez cher. »

LES FACTEURS DE RISQUE

Certaines femmes sont convaincues que les lunettes de WC et les serviettes de bain sont des vecteurs d’infections urinaires. C’est faux. Le risque de contamination via des toilettes sales est infime! « L’inflammation de la vessie est presque toujours une auto-infection, provoquée par des bactéries qui migrent depuis l’intestin. Comme les femmes ont un urètre plus court, les bactéries trouvent plus vite et plus facilement leur chemin. Il s’agit en général de bactéries E.coli.

Certaines souches d’E.coli sont plus susceptibles de provoquer des infections urinaires. Cette classe de bactéries abrite toute une variété de germes, certains bénéfiques, d’autres nocifs. Plus la bactérie parvient à se fixer sur la paroi interne de la vessie et à s’y multiplier, plus on court le risque de développer une infection localisée.

En cas de bactéries du genre Proteus, il convient de surveiller également les reins car ils peuvent y propager l’infection « , met en garde le Dr Cammu. Parmi les autres facteurs de risque d’infections, citons le fait de ne pas bien vider la vessie.  » C’est une mauvaise habitude que les femmes ont souvent acquise lors de leur scolarité. Elles est liée au stress des toilettes et à la nécessité d’aller vite. Or, le réflexe d’uriner doit se déclencher spontanément. S’asseoir correctement permet de détendre le plancher pelvien et de vider la vessie, à son rythme. Trop souvent, on leur a appris à pousser pour uriner et elles continuent à le faire. Ce qui empêche une vidange correcte des résidus néfastes. « 

Certaines femmes ressentent des brûlures après un rapport sexuel. Il peut s’agir d’une infection mais aussi d’une simple irritation due à la pénétration et à la sécheresse vaginale, voire à une allergie au sperme.  » Il n’est pas toujours évident de déterminer la cause. Il faut donc tâtonner pour trouver la meilleure solution. Parfois, l’utilisation d’un préservatif, uriner tout de suite après le rapport sexuel ou boire un grand verre d’eau avec un médicament qui limite l’élasticité de la vessie ou un médicament antibactérien (nitrofurantoïne) peut aider. « 

Le stress peut favoriser l'apparition d'infections urinaires. La relaxation peut donc aider.
Le stress peut favoriser l’apparition d’infections urinaires. La relaxation peut donc aider.© Getty Images

LES TRAITEMENTS QUI MARCHENT... OU PAS!

OUI

  • LE WASH-OUT

Boire beaucoup et uriner souvent, dès les premiers symptômes permet de faire un grand nettoyage. Une récente méta-analyse a démontré que cela permet de tuer dans l’oeuf un début d’infection ou de guérir plus vite une inflammation installée. Dès les premiers signes d’irritation, buvez minimum 1,5 à 2 litres d’eau par jour pour chasser les bactéries E.coli. « 

  • LES ANTIBIOTIQUES

Dans la plupart des cas, les antibiotiques sont inutiles : l’infection guérit d’elle-même. En cas de fièvre, de douleurs, de sang dans les urines ou de symptômes qui persistent plus de trois jours d’affilée, il faut consulter.  » On envisage d’abord un traitement à base de nitrofurantoïne, un antibiotique sélectif. Et on utilise les antibiotiques à large spectre, comme la fosfomycine qu’en dernier recours. Si on en prend dès le début, une prise peut certes suffire à guérir mais on risque de créer une résistance. A éviter donc, surtout en cas d’infections récidivantes. « 

Chez les femmes qui ont des récidives – trois infections ou plus par an – le traitement sera plus compliqué.  » Il faut avant tout exclure les autres causes d’infection possibles. Je pense aux calculs rénaux ou aux troubles neurologiques. On ne dispose hélas pas encore de traitement idéal ou de médicament préventif contre les infections récidivantes. En prévention, on pourrait prescrire un antibiotique pour éviter les rechutes mais il est rare qu’on choisisse cette option, car cela oblige à augmenter toujours plus les doses. Mieux vaut proposer un oestrogène vaginal ou se résoudre aux antibiotiques lorsqu’une nouvelle infection se déclare », précise le Dr Cammu.

  • LA RELAXATION

« La vessie est le miroir de l’âme « , dit un proverbe anglais. Avec raison. « Le stress et les angoisses ont un impact réel sur le fonctionnement des voies urinaires. Les muscles lisses, comme la vessie et les intestins, sont sensibles au stress et s’emballent en cas de nervosité. Certains événements pénibles, par exemple un deuil ou une séparation, peuvent provoquer des ennuis urinaires sans que la vessie elle-même soit atteinte. Une fois qu’on a compris l’origine du problème, la relaxation peut aider. « 

NON

  • LES PRO- ET PRÉBIOTIQUES

On les a longtemps tenus en haute estime mais, depuis peu, les spécialistes font machine arrière : il semblerait que les probiotiques (bonnes bactéries intestinales) et les prébiotiques (fibres alimentaires précurseurs de bonnes bactéries) n’aient guère plus qu’un effet placebo sur les germes et les infections récidivantes des voies urinaires.

  • LES CANNEBERGES

 » Les produits à base de canneberges ne font pas mieux qu’un placebo. Il y a quelques années, on ne jurait que par l’extrait de canneberge (ou cranberry) pour sa capacité supposée à acidifier les parois de la vessie et donc à limiter l’adhésion des bactéries sur la muqueuse. Mais des études sont venues battre cette théorie en brèche.

Cela dit, par manque d’alternative efficace, beaucoup de gens continuent à se supplémenter et affirment se sentir mieux. Mais, selon moi, on peut juste parler d’un effet placebo. »

  • LES PLANTES & COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES

A en croire l’une ou l’autre (petite) étude, les compléments alimentaires à base de mannose (un sucre) seraient efficaces contre les récidives. « L’efficacité du mannose n’a pas été démontrée, je ne le recommanderais donc pas. Mais ce type de complément ne peut pas faire de tort, alors pourquoi pas... A côté de cela, il existe des tas d’autres extraits végétaux mais qui n’ont pas plus d’effet qu’un placebo. »

  • LE VACCIN

 » Il existe aussi un vaccin oral contre l’inflammation de la vessie : on est sensé le prendre pendant trois mois pour être protégé. Là encore, sans preuves scientifiques suffisantes. »

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