Rupture d’anévrisme : des traitements plus performants

L’anévrisme est une dilatation de l’artère pouvant aller jusqu’à la rupture. Ses conséquences peuvent être graves. Peut-on le déceler à temps ? Comment reconnaître la rupture ? Quels sont les traitements ?

On parle d’anévrisme (le plus souvent cérébral, bien que l’aorte abdominale puisse également être touchée), lorsqu’une artère s’est dilatée de manière permanente, formant souvent une petite poche dans laquelle le sang rentre, circule puis ressort. Chez certains, cette petite poche restera telle quelle au fil des ans, mais chez d’autres, avec le temps et certains facteurs de risque, elle va grandir, augmentant le risque de rupture.

Pas de symptômes avant la rupture

D’où vient l’anévrisme ?  » Il est souvent congénital, c’est-à-dire qu’on naît avec, explique le Dr Jose-Antonio Elosegi, neurologue et chef de clinique au CHU Ambroise Paré à Mons. Un petit nombre, toutefois, se forme plus tard : on parle alors d’anévrisme acquis « . Mais la grande caractéristique de l’anévrisme est qu’il est asymptomatique : aucun signe ne permet de déceler son existence.  » On estime que 2 à 3 % de la population vit avec un anévrisme sans le savoir. On le découvre parfois par hasard, lors d’un examen de type IRM ou scanner qu’on doit passer pour une autre pathologie (migraine, sinusite, etc.), ou... au moment de sa rupture « .

Les conséquences de la rupture d’anévrisme peuvent être graves : si environ un tiers des patients s’en sort indemne, un autre tiers garde des séquelles neurologiques importantes à vie (hémiplégie, aphasie, troubles de la marche...).

 » En effet, lors d’une rupture d’anévrisme, le cerveau réagit en provoquant un vasospasme (rétrécissement des artères), pour empêcher que trop de sang ne s’écoule. Ce vasospasme est à l’origine des séquelles de l’anévrisme « , explique le Dr Elosegi. Enfin, un tiers des patients décède, souvent rapidement après la rupture. Il s’agit donc d’une urgence absolue : si un proche est immédiatement disponible, il conduit le malade aux urgences les plus proches. Sinon, il faut composer le numéro d’urgences médicales, le 112.

Des facteurs de risque à surveiller

Parmi les différents facteurs de risque, il en est un sur lequel on n’a évidemment aucune prise: l’âge.  » Bien sûr, on considère l’âge comme un facteur de risque parce que le plus souvent, la taille de l’anévrisme augmente avec l’âge. Et plus la dilatation est grande, plus la paroi à ce niveau est fragilisée, par rapport à la paroi normale « , souligne le Dr Elosegi. Très rare chez les enfants, la rupture d’anévrisme est plus fréquente dans la tranche d’âge 50 à 60 ans.

Mais d’autres facteurs, sur lesquels nous pouvons, par contre, avoir une influence, fragilisent la paroi artérielle.

– La tension artérielle : une tension artérielle élevée exerce une pression sur la paroi de l’artère.  » Donc plus la tension augmente, plus on risque la rupture. A savoir également, une tension artérielle qui augmente de manière chronique aura comme effet d’agrandir encore la taille de l’anévrisme « , précise le Dr Elosegi.

– Le tabac : on estime que le processus oxydatif du tabac abîme les artères et fragilise leur paroi. C’est donc un facteur de risque non négligeable.

– Le cholestérol : il contribue à fragiliser les artères.

Un mal de tête pas comme les autres

Le principal symptôme ? Un très violent mal de tête.  » Cette céphalée brutale, très violente, est un signe. Ce n’est pas un mal de tête comme les autres, souligne le Dr Elosegi. Les gens qui ont l’habitude d’avoir des maux de tête disent que celui-ci est tout à fait inhabituel : c’est comme quelque chose qui a explosé. La douleur peut se localiser n’importe où dans la tête, selon l’emplacement de l’anévrisme « .

Cette céphalée est parfois accompagnée de nausées, de vomissements, d’une raideur de la nuque, de photophobie (on ne supporte plus la lumière), de phonophobie (le bruit paraît insoutenable), et peut conduire, dans certains cas, au coma.

Chirurgie ou embolisation

A l’heure actuelle, il existe deux manières  » classiques  » de traiter un anévrisme rompu. Mais une troisième solution vient tout juste de faire ses preuves, pour des cas bien particuliers (voir encadré).

La chirurgie ou (exclusion microchirurgicale)

C’est le traitement le plus ancien. Le principe est d’isoler la poche anévrismale.  » On pose un clip en métal à la base de l’anévrisme, pour le fermer. C’est un traitement assez lourd pour le patient, car il nécessite non seulement une anesthésie générale, mais surtout l’ouverture du crane (craniotomie). Il est donc moins utilisé qu’avant, mais a tout de même sa place dans des cas bien précis « . La chirurgie nécessite 10 à 15 jours d’hospitalisation.

L’embolisation (neuroradiologie interventionnelle)

Cette technique est plus récente. Ici, on ne cherche pas à isoler l’anévrisme, mais à le remplir avec des filaments de titanium (appelés  » coils « ) pour empêcher le sang d’y pénétrer.  » On accède à l’anévrisme par une sonde qui remonte jusqu’à la tête à partir de l’artère fémorale. De cette manière, on remplit l’anévrisme : le sang ne peut plus y entrer, et continue à circuler dans l’artère. L’embolisation, moins envahissante que la chirurgie, est de plus en plus utilisée « . Pour ce traitement, le patient est hospitalisé 48 heures, est ensuite soumis à un suivi par IRM après 3 mois, puis 5 à 6 mois, enfin une fois par an, pour vérifier que tout est bien en place.

Pourquoi choisir l’une ou l’autre ?  » Aujourd’hui, on préfère l’embolisation, moins agressive pour le patient. Mais on a toujours recours à la chirurgie si l’anévrisme est de grande taille (plus de 15mm), par exemple, ou selon sa localisation, s’il est difficilement atteignable avec une sonde, précise le Dr Elosegi. Ce sont les deux critères de choix. A long terme, de toute façon, les deux traitements sont d’efficacité comparable « .

Une nouvelle technique pour les anévrismes compliqués

Ces traitements standards sont difficilement applicables, car moins efficaces et associés à un taux de complications plus élevé, dans deux cas : lorsque l’anévrisme est fusiforme (en forme de fuseau, sans qu’il y ait formation d’un sac), ou lorsqu’il est de très grande taille et qu’il peut alors comprimer des structures cérébrales.

Mais une nouvelle technique, le stenting, semble tout à fait prometteuse pour ces cas particuliers. Comment se passe l’intervention ?  » Le patient est sous anesthésie générale. On introduit, par voie endovasculaire (comme pour l’embolisation), un stent cylindrique à maillage très serré, qu’on fait remonter pour le placer au niveau de l’anévrisme, explique le Professeur Boris Lubicz, qui dirige le service de neuroradiologie diagnostique et interventionnelle à l’hôpital Erasme et est l’un des principaux auteurs d’une étude multicentrique sur les résultats de ce nouveau traitement. Grâce à ce maillage très serré, le sang ne pénètre presque plus dans l’anévrisme, et celui-ci finit par cicatriser spontanément en quelques semaines. Ce traitement offre une sécurité plus élevée, et la récupération du patient est également meilleure « .

La recherche se penche néanmoins sur les problèmes de tolérance qui surviennent parfois après quelques semaines : la solution résiderait dans l’amélioration du revêtement du stent.

Cette nouvelle technique est disponible un peu partout en Belgique, et le stent coûte 12 000 euros, remboursés par la sécurité sociale.

Le cas de l’anévrisme non rompu
Il arrive donc qu’on découvre la présence d’un anévrisme à l’occasion d’un examen pour un autre problème de santé. Comment vit-on en sachant cela ? Faut-il prendre des précautions particulières ?  » On peut vivre quasiment comme tout le monde, selon moi, affirme le Dr Elosegi. Bien sûr, mieux vaut contrôler sa tension artérielle, éviter de fumer, et surveiller son cholestérol. Mais c’est vrai, cela reste une épée de Damoclès pour le patient... Faut-il intervenir et opérer ? Je crois que ça dépend un peu de chaque patient, de la manière dont il arrive à gérer cette situation. L’attitude qui prévaut, c’est qu’on n’opère pas systématiquement un anévrisme qui ne pose pas de problème, car toute opération représente un risque aussi. Bien sûr, si l’anévrisme fait déjà plus de 15mm, le risque de saignement est important, et on choisira sans doute d’opérer, après discussion avec le patient. Par ailleurs, plus le patient est jeune, plus on aura tendance à opérer. Il est quand même recommandé d’être vigilant en cas d’effort physique intense, qui fait monter la tension. Et n’oublions pas que les relations sexuelles aussi sont un effort physique ! « 

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