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Ostéoporose: les signaux qui doivent alerter

Au classement des affections les plus sous-estimées, l’ostéoporose trône en haut du podium. Cette maladie silencieuse touche tant les hommes que les femmes. Voici les signes auxquels être attentif.

Si, à première vue, l’ostéoporose ne semble pas très menaçante, on aurait tort de sous-estimer les conséquences de la décalcification osseuse. En Belgique, on estime à 600.000 le nombre de personnes qui y sont sujettes. Et, chaque année, on dénombre plus de 90.000 fractures dues à l’ostéoporose. « Dans le monde, on constate que le nombre fractures dues à l’ostéoporose augmente de manière exponentielle et que ce phénomène va s’amplifier dans les années à venir », prévoit le Pr Evelien Gielen (UZ Leuven), présidente du Belgian Bone Club.

UNE MALADIE INSIDIEUSE

« Trop souvent, le diagnostic n’est posé qu’après une fracture. Il peut s’agir d’un tassement vertébral spontané, par exemple, ou d’une fracture du poignet ou de l’épaule à la suite d’une chute. Même dans ce cas, on ne fait pas toujours le lien avec l’ostéoporose. Il arrive aussi que des patients se plaignent de douleurs lombaires sur une longue période. On pense à un lumbago, alors qu’il s’agit d’un tassement vertébral. Je reçois aussi des patients atteints d’ostéoporose qui ne présentent aucun signe de tassement vertébral. »

Même dans ce cas-là, il est primordial de pouvoir poser le diagnostic d’ostéoporose. Car sans traitement, la personne qui présente une fracture ou un tassement vertébral court un risque élevé de rechute. Les fractures du poignet, de l’épaule, de la hanche et des vertèbres sont les plus fréquentes, mais tous les os ou presque sont susceptibles de se casser sous l’effet de l’ostéoporose. « A l’exclusion des doigts, des orteils, des os du visage et des vertèbres cervicales. Ces fractures-là ne sont pas attribuées à l’ostéoporose. » Ajoutons que les fractures dues à l’ostéoporose peuvent entraîner une perte de centimètres (taille), une courbure du dos, l’immobilité, voire un manque de confiance en soi et des épisodes dépressifs.

En Belgique, on recense chaque jour jusqu’à 270 fractures dues à l’ostéoporose.

DES STRUCTURES VIVANTES

Avec l’ostéoporose, la masse osseuse se détériore à un rythme accéléré. Parallèlement, la microarchitecture de l’os est perturbée. L’intérieur de l’os est constitué de petits fragments ou barres osseuses entrecroisés qui soutiennent la partie externe de l’os et empêche celui-ci de se tasser. Ces fragments d’os ne sont pas des structures inertes. Ils contiennent des cellules qui décomposent et renouvellent régulièrement la moelle osseuse, ce qui est nécessaire pour éliminer les tissus osseux anciens et endommagés. Lorsque ce cycle continu de construction et de dégradation est déséquilibré et que la dégradation prend le dessus, des cavités apparaissent entre les fragments osseux et l’os devient plus fragile et cassant.

« Jusqu’à l’âge de 35 ans, le corps fabrique plus de tissu osseux qu’il n’en élimine. Ensuite, nous atteignons un pic de masse osseuse. Puis, chez tout le monde, le processus s’inverse. Chez la femme, cela s’accélère à partir de la ménopause. L’oestrogène, l’hormone féminine qui chute à ce moment de la vie, inhibe les cellules chargées de détruire le tissu osseux. Les femmes très minces (IMC < 20 kg/m2) courent un risque accru d'ostéoporose.

Les hommes, eux, ont en principe des os plus épais et plus solides et perdent moins de masse osseuse que les femmes. Ils sont donc protégés jusqu’à un âge plus avancé. A cela s’ajoute qu’à partir de 70 ans, le corps absorbe moins bien le calcium et se carence en vitamine D. Ce manque de calcium provoque un autre phénomène: l’activité de la glande parathyroïde augmente et cette hormone pompe du calcium dans les os. Avec pour conséquence une décalcification. »

Ostéoporose: les signaux qui doivent alerter
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LES HOMMES AUSSI!

Après la ménopause, en moyenne 1 femme sur 3 subit une ou plusieurs fractures dues à l’ostéoporose, contre 1 homme sur 5 après 50 ans. « Chez les hommes, l’âge n’est pas le seul facteur de risque. La prise prolongée de certains médicaments (cortisone, traitements hormonaux en cas de cancer de la prostate ou du sein notamment), une hyperthyroïdie ou hyperparathyroïdie, les rhumatismes, le tabac, l’alcool, le manque d’exercice physique, les troubles rénaux ou une prédisposition familiale jouent un rôle. Il faut se défaire de l’image – fausse – que l’ostéoporose serait une maladie féminine. A cause de cela, les hommes bénéficient moins souvent d’une densitométrie osseuse ou d’un traitement. »

PLUS QUE DE SIMPLES MESURES

Idéalement, il faudrait pouvoir détecter la maladie avant la première fracture. « Il existe un outil d’évaluation du risque qui vous permet de déterminer vous-même si vous êtes à risque d’avoir de l’ostéoporose ou de faire des fractures. C’est le cas? Prenez rendez-vous pour faire une densitométrie osseuse. Cet examen est recommandé aux femmes de plus de 65 ans et aux hommes de plus de 70 ans », insiste le Pr Evelien Gielen.

Cet examen osseux permet de mesurer la densité du système osseux au niveau des vertèbres et de la hanche. Il prend environ 10 minutes et est totalement indolore. Le bas du dos est soutenu de façon que le dos reste bien à plat. La quantité de rayonnement reçue est très faible, inférieure au rayonnement naturel auquel nous sommes exposés chaque jour. Ce test permet de détecter une éventuelle ostéoporose. « Il peut toutefois y avoir ostéoporose malgré une mesure osseuse normale. C’est le cas des femmes post-ménopausées et des hommes de plus de 50 ans qui souffrent de fractures spontanées ou, par exemple, après une légère chute ou un choc.

C’est pourquoi outre la prise des mesures, nous examinons l’ensemble des facteurs de susceptibilité pour estimer le risque de fracture. »

Une fois le diagnostic posé, il y a plusieurs mesures à adopter pour prévenir ou freiner la maladie: arrêter de fumer, bouger davantage et se supplémenter en calcium et vitamine D. « Certaines personnes arrivent à stabiliser leur masse osseuse grâce à une alimentation adaptée et à de l’exercice physique. »

Fractures en hausse avec le Covid

La pandémie de coronavirus a eu des effets indirects sur les personnes souffrant d’ostéoporose. L’année passée, les médecins ont remarqué que nombre de leurs patients avaient arrêté leur traitement. « Certains traitements contre les fractures osseuses ne peuvent pas être stoppés trop longtemps sans que cela ait des conséquences fâcheuses, met en garde le Pr Evelien Gielen. Nous avons ainsi constaté une augmentation des nouvelles fractures et des complications qu’on aurait pu prévenir en temps normal. »

LES TRAITEMENTS MÉDICAMENTEUX

S’il existe un risque élevé de fracture, il faut se tourner vers un traitement médicamenteux. Les traitements les plus courants visent à ralentir le processus de dégradation de l’os (antirésorptifs). Ils peuvent être administrés sous forme de cachets ou par perfusion. Ces traitements, surtout sous forme de cachets, exigent une grande régularité. Comme l’ostéoporose est une maladie silencieuse, beaucoup oublient souvent de prendre leur médicament et les effets secondaires sont parfois dissuasifs. Le traitement peut aussi se faire par le biais d’injections effectuées deux fois par an.

« Il est important de réévaluer le risque de fracture tous les deux à cinq ans afin de juger de l’efficacité du traitement et de la nécessité ou non de le poursuivre. Si les médicaments contre l’ostéoporose empêchent la dégradation du tissu osseux, ils présentent l’inconvénient d’inhiber l’élimination (bénéfique, elle) des restes d’os dégradés. A terme, cela risque de provoquer l’apparition de bosses indésirables. C’est pour cela qu’on préconise parfois l’interruption du traitement au bout de quelques années. Mais ce n’est pas possible dans tous les cas, et il faut impérativement en parler avec le médecin traitant. »

Les personnes atteintes d’une ostéoporose sévère et qui font des fractures à répétition sont traitées par thérapie anabolique, qui stimule la production de nouveau tissu osseux. « Pour l’instant, nous ne disposons que d’un médicament et les conditions de son administration sont très strictes. Mais bientôt, pour ces patients, une nouvelle thérapie de reconstitution des os sera disponible en Belgique. »

LES HORMONES

Les femmes qui prennent un traitement hormonal substitutif contre les soucis liés à la ménopause sont protégées contre l’ostéoporose. Pour elles, la prise de médicaments n’est pas recommandée. « Mais nous ne prescrivons pas pour autant ce type d’hormones en traitement de première intention contre l’ostéoporose. Les femmes de moins de 65 ans qui souffrent d’ostéoporose et ne prennent aucun traitement hormonal peuvent se voir prescrire un modulateur sélectif des récepteurs aux oestrogènes qui, comme son nom l’indique, agit sur les récepteurs d’oestrogènes. Cela permet de réduire le risque de fracture vertébrale sans devoir subir les inconvénients d’une hormonothérapie. »

Comment freiner l’ostéoporose

  • Toutes les activités mettant les os à l’épreuve ont de l’intérêt, car elles limitent la perte osseuse. Pour avoir un effet sur la masse osseuse, il faut pratiquer un sport assez intensif. Pensez au jogging ou à la marche rapide (+ de 6 km/h).
  • Ces efforts doivent être complétés par un programme d’exercices d’équilibre (tai chi ou yoga) et d’entraînement musculaire. Car des muscles bien développés protègent et renforcent les os, et aident également le corps à mieux anticiper toute situation, y compris à prévenir les chutes.
  • Consommez suffisamment de calcium. Mettez 5 produits laitiers au menu chaque jour.
  • Un apport suffisant en vitamine D est très important. Pour y arriver, on s’expose au soleil en marchant, visage et bras découverts aussi souvent que possible, entre 11 heures et 15 heures. On consomme aussi des poissons gras, des oeufs et de la viande. On peut se supplémenter pour éviter tout carence.
  • Pour vérifier votre risque par le biais d’un test, surfez sur https://riskcheck.osteoporosis.foundation

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