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Monoxyde de carbone : attention aux intoxications chroniques !

Le monoxyde de carbone (CO) ne provoque pas seulement des intoxications aiguës pouvant mener au coma et à la mort. Il est aussi responsable d’intoxications chroniques difficilement repérables, mais dangereuses. Voici les clés pour les détecter.

Franca a été victime d’une intoxication chronique au monoxyde de carbone après avoir amélioré, en novembre 2016, l’isolation de sa salle de bain, pièce où se trouvait la chaudière au gaz. La nouvelle isolation empêchait les gaz de combustion d’être évacués vers l’extérieur de l’habitation et s’accumulaient à l’intérieur de celle-ci.

Franca et ses trois enfants ont d’abord commencé par se sentir légèrement indisposés :  » Nous avions des petits maux de tête, des nausées, nous nous sentions un peu faibles, mais ça n’avait rien de préoccupant. Nous pensions avoir attrapé un petit virus, fréquent à cette période de l’année. « 

Il est prudent de placer un extracteur d'air dans une pièce où se trouve une chaudière ou un chauffe-eau à gaz.
Il est prudent de placer un extracteur d’air dans une pièce où se trouve une chaudière ou un chauffe-eau à gaz.© ISTOCK

Même le médecin de famille n’a rien vu. Un jour, Franca s’est trouvée vraiment très mal en point.  » Mes enfants ne se sentaient pas bien non plus, mais pas aussi mal que moi. Mon médecin de famille est venu m’ausculter à la maison et a diagnostiqué une grosse gastroentérite, voire une grippe intestinale car j’en avais les symptômes : migraines importantes, sensation de faiblesse, rythme cardiaque rapide, nausées, vomissements, spasmes intestinaux, douleurs dans tous le corps. Il n’y avait aucune odeur particulière dans la maison et j’étais la seule malade de la famille. Mon médecin ne s’est pas alarmé. « 

Deux semaines plus tard, le 21 décembre 2016, Franca et sa fille, seules à la maison, se sont réveillées vers 8 heures du matin en se sentant très affaiblies. Elles avaient un gros mal de tête, des nausées, la jeune fille vomissait. La journée a passé. Mère et fille s’endormaient, se réveillaient, s’assoupissaient à nouveau.  » Nous avons commencé à ressentir une douleur intense au niveau de la poitrine. Elle s’est propagée aux membres supérieurs. Nous bougions au prix d’efforts énormes. « 

A ce moment-là, le CO accumulé dans leur organisme avait provoqué une apathie. Les deux femmes comprenaient que quelque chose n’allait pas, mais elles étaient incohérentes et sans réaction. Puis, coup de chance : une connaissance passe chez elles vers 16 heures et réalise que la situation est grave. S’ensuit un appel au 112. Face à l’énumération des symptômes, la réceptionniste comprend tout de suite qu’il s’agit d’une intoxication au monoxyde de carbone. Cinq minutes plus tard, les secours arrivent, stabilisent l’état des deux femmes avant de les emmener au CHR de la Citadelle, à Liège, où elles se voient administrer des antidouleurs et sont mises dans un caisson hyperbare pour réoxygéner rapidement leur organisme. Elles quittent l’hôpital le jour même. Tout se termine bien pour elles.

Éviter le piège de la gastro

Gaz inodore, incolore, insipide et donc indétectable, le monoxyde de carbone est appelé tueur silencieux.

 » Dans le cas d’une intoxication chronique au CO, les symptômes tels que des nausées, vomissements, céphalées, vertiges apparaissent beaucoup moins rapidement et clairement que dans celui d’une intoxication aiguë où ils surviennent très vite et peuvent conduire au coma et à la mort si les victimes sont soumises à une concentration rapidement importante de CO, souligne le Dr Stéphane Degesves, anesthésiste, urgentiste, Chef de service des urgences et du SMUR au CHR de la Citadelle à Liège. Le piège classique, c’est de relier les symptômes de l’intoxication au CO à une gastro-entérite. La seule différence réside dans le fait que l’intoxication au CO n’entraîne pas de modification des selles comme c’est le cas avec une gastro-entérite. « 

Les intoxications chroniques au CO sont souvent mal diagnostiquées car elles ne surviennent pas typiquement dans une salle de bain ou lorsqu’on remet le chauffage en route.  » Elles se produisent principalement au domicile et sur le lieu du travail, remarque l’urgentiste. Elles résultent de concentrations en CO dans l’atmosphère moins importantes que celles responsables d’intoxications aiguës. Une personne va être intoxiquée, par exemple, au travail en cours de journée. À la fin de celle-ci, elle sera nauséeuse et aura mal de tête. Le fait de rentrer chez elle va l’extraire de la source de CO et les symptômes liés à l’intoxication vont progressivement diminuer. « 

Mais attention ! En cas d’exposition répétée, le taux de CO ne revient pas à zéro.  » Il y a alors une accumulation progressive du CO dans le sang, qui peut produire des symptômes persistants et avoir des séquelles non négligeables à la longue sur le cerveau. « 

Ce qui doit alerter

N’oublions pas que le monoxyde de carbone est un gaz inodore, incolore, insipide et donc indétectable, d’où son nom de  » tueur silencieux « . En cas d’intoxication chronique au CO, les symptômes tels que céphalées, nausées, vomissements, vertiges, etc. surviennent de manière répétitive lorsque la victime se trouve dans un endroit précis et disparaissent légèrement, voire totalement, quand elle n’y est pas. Face à une alternance entre l’aggravation et l’amélioration de ces symptômes, il faut donc suspecter une intoxication chronique au CO. Il est alors vivement recommandé de contacter son médecin traitant pour faire un dosage sanguin de l’HbCO afin de confirmer ou infirmer l’intoxication chronique au CO.

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