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Mieux vivre avec le diabète

Vivre avec le diabète est de plus en plus simple, grâce à l’amélioration des traitements et à des pistes de recherche prometteuses.

On estime qu’entre 500.000 et 1 million de Belges souffrent du diabète. Un chiffre donné à la grosse louche, faute de données précises. Le diabète de type 2 en est de loin la forme la plus fréquente. Hélas, un adulte sur deux qui en souffre n’a pas encore été diagnostiqué... et n’est donc pas soigné. Des études internationales prédisent qu’à l’avenir, un adulte sur dix sera diabétique. Une tendance directement liée à l’augmentation de l’obésité et de la sédentarité.

Le diabète de type 2, auquel nous consacrons cet article, s’installe lorsque les cellules corporelles deviennent moins sensibles à une hormone, l’insuline. Cette substance agit comme une sorte de clé dont les cellules ont besoin pour absorber le glucose (sucre) dans le sang. Lorsque le sucre n’est plus suffisamment absorbé, le taux de glucose augmente. Plusieurs facteurs de risque entrent en jeu dans l’apparition de la maladie.

ÂGE ET HÉRÉDITÉ

« L’âge est un facteur crucial, car avec le temps chacun de nous développe une certaine insulino-résistance. Chez les personnes plus jeunes, le surpoids, la sédentarité et le manque d’exercice physique accélèrent ce phénomène de résistance à l’insuline. En principe, tout le monde risque devenir diabétique de type 2, mais il est heureusement possible de prévenir la maladie en adoptant un mode de vie sain. Le facteur héréditaire a aussi son importance. Si un de vos parents est diabétique, vous avez 50% de risque de le devenir », explique le professeur Chantal Mathieu.

Outre la résistance à l’insuline, le diabète de type 2 se signale par une défaillance des cellules bêta pancréatiques qui sont responsables de la production d’insuline. Deux processus se déroulent simultanément, sans qu’on s’en rende compte: outre la défaillance des cellules bêta, contre laquelle on ne peut pas grand-chose, il se produit également une accumulation de graisses dans la zone abdominale et dans les muscles. Cet excès de graisses augmente l’insulino- résistance en libérant des hormones pro-inflammatoires.

La maladie concerne autant les hommes que les femmes, avec une différence: « Les femmes qui ont souffert de diabète pendant leur grossesse courent un risque accru de diabète par la suite. Nous leur conseillons de faire un test glycémique annuel préventif chez leur généraliste. »

DÉPISTAGE PRÉCOCE

Détecter la maladie à un stade précoce n’est pas un luxe. « On pourrait se dire que ce n’est pas si grave, puisque des tas de gens vivent sans problème pendant des années en ne sachant pas qu’ils sont diabétiques. Mais le diabète est une maladie qui attaque lentement des organes essentiels, comme les yeux, les vaisseaux sanguins, les reins, les pieds, le coeur et le cerveau. Et ce, sans crier gare! Au moment du diagnostic, un patient sur cinq est déjà à un stade avancé. En traitant tôt, en incitant les gens à perdre du poids et à faire du sport, on peut prévenir ou limiter les dégâts. »

UN MODE DE VIE SAIN

Certaines recherches suggèrent qu’une perte de poids radicale (suite à un régime ou à une intervention chirurgicale) est encore le meilleur traitement, voire que cela pourrait guérir le diabète. Mais le Pr Chantal Mathieu tient à nuancer le propos: « Chez les personnes en surpoids, un régime agressif, qui vise à court terme une perte de poids de 10% voire plus, peut, en effet, faire disparaître le diabète, et surtout l’hyperglycémie. Mais on sait que la défaillance des cellules bêta est un enchaînement progressif, qui reste tapi à l’arrière-plan. Certaines personnes réussissent à faire reculer la maladie pendant des années, mais l’effet n’est malheureusement pas définitif. Cela dit, cette approche en vaut la peine, car, associée à une médication et à du sport, elle permet de normaliser le taux de sucre dans le sang. »

Pour ou contre le dépistage?

Il est recommandé à toute personne de plus de 45 ans, présentant au moins un facteur de risque accru, de consulter son généraliste chaque année pour faire un test de dépistage du diabète. Voici les facteurs de risque à tenir à l’oeil: un tour de taille de plus de 80 cm pour les femmes et de plus de 94 cm pour les hommes, une surcharge pondérale, une hypertension artérielle, un parent diabétique, un diabète gestationnel, une utilisation prolongée de corticostéroïdes.

Un dépistage régulier peut également révéler un prédiabète, soit le stade préliminaire de la maladie. À ce stade précoce, il est encore possible d’éviter le développement du diabète. « Des études ont montré que si vous changez votre mode de vie et faites au moins 150 minutes d’exercice par semaine, associé à une perte de poids de 5%, vous pouvez réduire considérablement le risque de diabète. »

Pour en savoir plus: rendez-vous sur le site internet de l’Association du diabète et déterminez votre risque personnel grâce à un test en ligne. www.diabete.be

MUSCU ET CARDIO

« Grâce à de l’exercice physique, on peut faire fondre la graisse stockée dans les muscles. D’autant que des muscles sollicités consomment beaucoup plus de sucre dans le sang. En perdant du poids et, surtout, en se débarrassant de la graisse au niveau du ventre, le corps redevient plus sensible à l’insuline. Cet effet n’est pas seulement observé chez les personnes qui ont récemment contracté le diabète, mais aussi chez celles qui en souffrent depuis longtemps. »

Tout exercice physique est bon à prendre. Si vous n’avez aucune expérience en matière de sport, mieux vaut commencer en douceur ou demander l’aide d’un coach. « Les exercices d’endurance (musculation) et de force (cardio) ont tous deux un effet positif. À noter que les personnes en surpoids ont des fibres musculaires qui les orientent plus vers des sports explosifs, comme la musculation. Donc si vous aimez soulever des poids, c’est parfait. Si vous êtes obèse, vous êtes physiquement moins bien équipé pour la marche ou la course à pied. »

QUID DES FRUITS?

Ce que l’on mange, et en quelle quantité, détermine en grande partie la capacité de chacun à contrôler sa glycémie. « Les recommandations nutritionnelles ont été revues et encouragent désormais un régime pauvre en glucides, avec une préférence donnée aux graisses et aux protéines saines. Mais les nutritionnistes mettent en garde contre certains aliments sains qui sont à éviter absolument quand on est diabétique. Les fruits riches en glucides (très sucrés) doivent être limités à une portion par jour. Et gare aux excès d’huile d’olive! » Des petits ajustements suffisent déjà pour faire une différence: songez à réduire de moitié votre consommation de pâtes, de pommes de terre ou de riz et à doubler vos portions de légumes.

QUELLE MÉDICATION?

La prise de médicaments est souvent nécessaire. D’énormes progrès ont été faits dans ce domaine, grâce aux incrétines et aux inhibiteurs du SGLT2, qui non seulement régulent le taux de glycémie mais protègent aussi d’autres organes, comme le coeur et les reins.

Les inhibiteurs du SGLT2 contrôlent le métabolisme du sucre par l’intermédiaire des reins. Ils empêchent le sucre d’être réabsorbé dans le sang. Conséquence: la personne élimine davantage de sucre via les urines et son taux de glycémie diminue. Cela contribue également à faciliter la perte de poids.

L’autre classe de médicaments, les incrétines, favorisent la production d’insuline, tout en réduisant celle de sa contrepartie, le glucagon, une hormone hyperglycémiante. En outre, ils inhibent la sensation de faim, ce qui entraîne une perte de poids supplémentaire. « À court terme, d’autres médicaments, aux effets impressionnants, issus de cette famille de molécules prometteuses, assureront des pertes de poids spectaculaires en cas d’obésité. Ces développements m’amènent à penser qu’à l’avenir, nous serons tout à fait capables de prévenir et de guérir le diabète de type 2. »

TECHNOLOGIE PROMETTEUSE

Les solutions technologiques viennent aussi à la rescousse, avec notamment des capteurs intelligents capables de mesurer le taux de glucose sous la peau, rendant de ce fait les piqûres au doigt (en grande partie) superflues. « Le port d’un tel capteur, qui ressemble à un disque blanc collé sur le bras, évoque un peu une montre de sport. Pour les personnes atteintes de diabète, cela leur permet non seulement d’obtenir des informations actualisées, mais aussi de se motiver. Et pour ceux qui doivent s’injecter de l’insuline, le capteur aide à ajuster le dosage avec précision.  »

LES YEUX, LES REINS, LE CANCER

Si vous êtes diabétique, faites contrôler vos yeux une fois par an, afin de détecter les dégâts aux petits vaisseaux sanguins qui risquent d’entraîner des maladies oculaires. Surveillez également votre fonction rénale (via un simple échantillon d’urine) et vos pieds, car les terminaisons nerveuses peuvent être attaquées. Soyez aussi à l’affût du moindre problème cardiovasculaire.

Ce que l’on sait moins, c’est que le dépistage du cancer chez les diabétiques, comme le cancer du sein, de l’intestin et du col de l’utérus, revêt une grande importance. Les personnes atteintes de diabète et d’obésité courent également un risque accru dans ce domaine.

Marc Bosmans (58 ans) « Le diagnostic a été un électrochoc »

« Il y a environ 18 ans, je souffrais d’une banale infection dentaire qui ne guérissait pas. C’est suite à une prise de sang que la cause a, par hasard, été révélée: sans le savoir, j’avais du diabète. Cela a été une grosse surprise pour moi, même si je ne suis pas le seul diabétique dans ma famille. La maladie a touché ma mère, ma soeur et mon frère. Après avoir arrêté de fumer, j’ai pris beaucoup de poids. Et, à l’époque, j’avais très peu le temps de faire du sport. Le diagnostic a été un coup dur pour moi, un électrochoc. Mon médecin m’a prévenu que si je ne changeais pas mon mode de vie, je serais bon pour des injections d’insuline dans les cinq ans. Le message est passé! J’étais bien décidé à faire tout ce que je pourrais pour contrôler la maladie.

J’ai suivi un régime pendant des semaines. Mon taux de sucre s’est amélioré mais une fois qu’on est diabétique, difficile de faire machine arrière. Après le diagnostic, je me suis mis au vélo. D’abord sur des petites distances, seul, puis en groupe au sein d’un club. Je fais maintenant du vélo quatre fois par semaine et je parcours facilement 10.000 kilomètres par an. Le sport m’a énormément aidé. Grâce à ça, cela fait 18 ans que j’arrive à me passer d’insuline, ma tension artérielle est de nouveau impeccable et je n’ai plus de petits bobos. Mentalement aussi, le sport m’a donné de la force. Je vois la différence avec d’autres diabétiques qui, eux, ne font pas de sport. Chez eux, c’est clair que la maladie évolue plus vite. En adaptant aussi mon régime alimentaire, j’ai perdu plus de 15 kilos. D’une manière générale, je mange très peu de glucides, sauf les jours où je fais du vélo de manière intensive. Surveiller mon alimentation, m’assurer que j’ai toujours des sucres lents et rapides dans ma poche, est devenu une seconde nature, mais cela ne veut pas dire que je vis comme un ascète. En fait, je suis en bien meilleure santé maintenant qu’avant le diagnostic. »

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