Mieux entendre : des solutions sur mesure

Les problèmes d’audition peuvent compromettre considérablement la vie sociale de ceux qui en souffrent. Pourtant, certains n’arrivent toujours pas à se résoudre à porter un appareil auditif.

Sommaire:

On estime qu’environ 10 % des Belges souffrent de problèmes d’audition mais ce chiffre augmente à une vitesse inquiétante. Avant, il était très rare de souffrir de problèmes d’audition avant 30 ans. Aujourd’hui, des jeunes de 18 ans accusent déjà des pertes auditives irréversibles, consécutives à des expositions prolongées au bruit.

 » Ecouter trop longtemps de la musique à volume élevé lèse les cellules sensorielles de l’oreille interne, qui perdent ainsi prématurément de leur efficacité, explique Bart Vinck, professeur d’audiologie à l’université de Gand. C’est ce qui explique que les jeunes souffrent de perte d’audition nettement plus tôt que les générations précédentes, dont l’usure des cellules sensorielles étaient simplement liée à l’âge. « 

Bien qu’un problème entre la partie externe de l’oreille (pavillon) et le cerveau (voir encadré) puisse être à l’origine de la perte auditive, dans la grande majorité des cas, celle-ci est causée par un disfonctionnement des cellules sensorielles. Les dégâts sont en général irréversibles. Peut-être, dans un futur lointain,arrivera-t-on à créer de nouvelles cellules sensorielles à partir de cellules souches ? Mais d’ici là, il faudra se contenter des moyens mis à notre disposition pour compenser la perte auditive.

 » Dans le cas d’une perte d’audition importante, on peut envisager la pose d’un implant cochléaire, un petit appareil électronique qui transforme immédiatement les sons en impulsions électriques envoyées vers le système nerveux, faisant ainsi le relais entre l’oreille et les cellules sensorielles. Cela ne rend pas une ouïe parfaite mais l’amélioration est notable. On croit souvent, à tort, que ce type d’implant n’est proposé qu’aux enfants. Or, on peut en bénéficier à tout âge et, dans certains cas, l’intervention est partiellement ou totalement remboursée. « 

Comment fonctionne l’ouïe ?

Les sons sont captés par l’oreille externe et le conduit auditif. C’est pourquoi une main placée en pavillon derrière l’oreille et les cornets acoustiques de nos aïeux aident effectivement à mieux entendre. A l’intérieur de l’oreille, les ondes sonores font vibrer le tympan (1) et sont transmises vers le limaçon (3) grâce aux os de l’oreille (le marteau, l’enclume et l’étrier (2)). C’est également là que sont situées les cellules sensorielles qui transforment les fréquences en impulsions vers le nerf auditif, qui lui-même transmet les informations au cerveau. Les problèmes d’ouïe peuvent être dus à des causes très diverses. Mais, en général, la perte d’audition est due à l’usure des cellules sensorielles qui n’arrivent plus à détecter certaines fréquences. A l’heure actuelle, il est impossible de réparer des cellules sensorielles endommagées. Les appareils auditifs, eux, captent les sons au niveau du pavillon, les filtrent, les amplifient et les envoient vers le tympan, afin de stimuler les cellules sensorielles.

Un pas à franchir

Solution plus abordable (même si, en matière de prix, tout est relatif) : l’appareil auditif. Sur les 10 % de Belges qui pourraient ou devraient porter un appareil auditif, seule une fraction en porte effectivement. Et dans cette minorité, nombreux sont ceux qui arrêtent de le porter. Si personne n’éprouve de problème à porter des lunettes, le port d’un appareil auditif, en revanche, constitue toujours un énorme pas à franchir. Même si les appareils auditifs de la dernière génération sont très discrets, le port d’une prothèse est assez mal vécu.

 » Le refus de porter une prothèse est fortement ancré, explique Bart Vinck. Il y a des animaux aveugles mais toutes les espèces sont pourvues d’une fonction auditive, de la puce au rorqual bleu. Il s’agit d’un sens primaire et l’absence d’ouïe hypothèque fortement les chances de survie. La honte de mal entendre est donc inscrite en nous. Il y a bien longtemps, pour fonctionner, les appareils auditifs avaient besoin de batteries volumineuses que les femmes cachaient dans un sac et les hommes dans un appareil photo. Cette image est encore tellement présente dans la mémoire collective qu’on a bien du mal à s’en défaire. « 

Cela dit, d’autres raisons sont à l’origine de nos réticences face au port d’un appareil auditif.  » Beaucoup de gens croient que ces appareils fonctionnent comme une paire de lunettes et qu’il suffit de les porter pour voir ses problèmes d’audition résolus par miracle. Or, ce n’est malheureusement pas encore le cas. « 

Les premiers symptômes

 » La perte d’audition s’accompagne de diverses manifestations. Quand la perte auditive commence à s’installer, on entend de manière étouffée, comme si on avait baissé le volume. Survient ensuite la déformation des sons, qui empêche de faire la différence entre « fort » et « port » par exemple. On essaie alors de deviner de quoi on parle grâce au contexte mais, souvent, on se trompe... C’est la porte ouverte aux malentendus !

Quand on souffre de perte d’audition, on a du mal à distinguer les paroles de son interlocuteur des bruits ambiants. Or, si les appareils auditifs amplifient le volume sonore , ils ne solutionnent pas la déformation des sons et n’aident pas à isoler les paroles d’un interlocuteur quand il y a un bruit de fond. C’est d’ailleurs un défi sur lesquel planchent les fabricants.

Entendez-vous bien ?

Certains sites internet permettent de tester ses fonctions auditives mais ils ne sont pas très fiables et les résultats sont donc à prendre avec des pincettes. Basez-vous plutôt sur les difficultés de communication que vous (et votre entourage) avez remarquées.

  • Audition normale (perte de 0 à 20 dB) : vous entendez peut-être moins bien les hautes fréquences mais cela ne vous pose aucun problème dans la vie quotidienne.
  • Légère perte d’audition (de 21 à 40dB) : suivre une conversation normale ne pose pas problème, mais vous distinguez plus difficilement les sons atténués ou éloignés.
  • Perte d’audition modérée (de 41 à 70 dB) : si votre interlocuteur parle fort et que vous le regardez, pas de problème. En revanche, dans les autres situations, vous avez du mal à comprendre ce qui se dit.
  • Perte d’audition sévère (71 à 90 dB) : vous n’entendez que les sons forts émis près de vous et ne comprenez vos interlocuteurs que s’ils vous parlent dans l’oreille.
  • Perte d’audition très sévère (à partir de 91 dB) : vous ne comprenez rien de ce qu’on vous dit et ne percevez que les sons ambiants forts.

Si vous constatez une perte d’audition, consultez votre médecin avant de vous rendre dans un centre spécialisé. Parfois, un innocent bouchon de cérumen peut-être à l’origine des problèmes d’audition.

Un choix pas facile

Mieux entendre : des solutions sur mesure

Les appareils se sont notablement améliorés au fil des ans, mais le résultat est encore loin d’être parfait. Ceux qui espèrent retrouver immédiatement toutes leurs fonctions auditives risquent d’être fort déçus. Dans bon nombre de cas, on entend, certes, mais on ne comprend pas ce qui se dit. C’est pourquoi beaucoup renoncent à porter leur appareil. C’est dommage, car il faut se donner le temps de s’habituer à son appareil auditif et de vivre avec lui. « 

Lorsqu’on se décide à investir dans un appareil, il faut avoir des attentes réalistes et faire preuve de patience et de souplesse. Il est très important de choisir le bon type d’appareil. Lors d’une visite dans un centre d’audition, sur base d’un audiogramme, l’ordinateur déterminera le type d’appareil le plus adapté. Attention, ce résultat n’est pas à prendre au pied de la lettre.

 » Lors du choix d’un appareil auditif, les informations purement physiques comptent bien sûr, mais d’autres considérations telles que le mode de vie, par exemple, entrent aussi en ligne de compte. Celui qui participe régulièrement à des réunions ou à des réceptions aura d’autres besoins que celui qui vit dans un environnement plus calme. Certains appareils fonctionnent aussi avec une commande à distance. Ceux qui les portent peuvent peut alors sélectionner eux-mêmes les sons à amplifier. « 

Tester soi-même

Souvent, les appareils auditifs sifflent.  » Dans des appareils de très petite taille, le microphone et l’amplificateur sont si proches que cela crée un effet de Larsen. C’est fort gênant et, souvent, celui qui porte l’appareil ne remarque rien parce qu’il n’entend pas les sons qui se situent dans la fréquence de ce sifflement. L’entourage, en revanche, le remarque immédiatement et sait alors que la personne porte un appareil... Plus un modèle est sophistiqué, moins il risque de siffler, mais cela coûte cher et le remboursement consenti par la mutuelle reste très faible. « 

Analogique ou numérique ?

Les appareils les plus petits et donc les plus discrets sont également ceux qui sifflent le plus et réclament la meilleure électronique. Il faut aussi faire son choix entre un modèle analogique et un modèle numérique.

 » Le Centre fédéral d’expertise des soins de santé mène actuellement des recherches sur l’efficacité des appareils auditifs, en particulier sur la différence entre les modèles analogiques et numériques. Bien que rien n’ait encore été démontré avec certitude, il semblerait qu’ils se valent.

Les appareils analogiques amplifient le signal original, alors que les modèles numériques extraient de courtes séquences sonores pour ensuite les assembler. A priori, un appareil numérique supprimera donc plus facilement les bruits de fond. Il est donc très important de tester différents modèles d’appareils et de choisir celui qui répond le mieux à ses besoins. Les appareils auditifs les plus chers ne sont pas forcément les meilleurs. »

Outre les performances auditives, on doit également tenir compte des aspects pratiques. Certaines personnes ne jurent que par les appareils qui disparaissent entièrement dans le conduit auditif, d’autres préfèrent les modèles qui se fixent derrière le pavillon. Certains optent pour un coloris voyant, d’autres pour la discrétion : c’est une question de goût.

Il faut également faire son choix parmi toute une série de gadgets. Le chargeur de certains modèles recharge la batterie et sèche aussi l’appareil, ce qui réduit les problèmes d’humidité, à l’origine de pannes. Certains appareils peuvent être connectés sans fil, via Bluetooth, à un GSM, un ordinateur ou un lecteur MP3. Bien pratique, par exemple, pour écouter de la musique sans gêner ceux qui n’ont pas de problèmes d’audition.

S’adresser à un malentendant

Ceux qui ne souffrent pas de problèmes d’audition imaginent mal les difficultés qu’éprouvent les malentendants pour suivre une conversation. Voici comment leur faciliter la vie :

  • Il faut que la personne voie votre bouche quand vous lui parlez. Tournez la tête dans sa direction.
  • Ajoutez des mimiques à votre discours. Si vous riez en annonçant une bonne nouvelle ou prenez l’air grave pour aborder un sujet sérieux, vous réduisez le risque de mauvaise compréhension ou de malentendu.
  • Prenez le temps d’expliquer les choses et cadrez votre sujet. Sauter du coq à l’âne peut être s’avérer perturbant. Evitez aussi les jeux de mots.
  • Si votre interlocuteur vous a mal compris, répétez la même chose, de la même façon, mais plus lentement. Si au bout de trois fois le message n’est toujours pas passé, utilisez d’autres mots ou écrivez-les. Vous pouvez tracer les chiffres avec vos doigts et montrer les choses pour plus de clarté.
  • Tenez compte du fait qu’un malentendant aura plus de mal à vous comprendre dans un environnement sombre, mal éclairé.
  • Les bruits de fond sont perturbants et irritants pour ceux qui entendent mal. La tendance qui consiste à diffuser de la musique dans les lieux publics complique la vie des malentendants qui peinent à distinguer les sons d’une conversation dans cette véritable « soupe » sonore.

Attention à l’isolement

Les appareils auditifs sont chers, les batteries aussi et ils ne permettent pas de retrouver une ouïe parfaite. En dépit de ces défauts, il serait dommage de s’en priver.

 » Nous vivons dans la société de la communication et il n’est pas facile de s’y intégrer quand on souffre de problème d’audition. Un appareil auditif permet d’éviter de sombrer dans l’isolement. Ici, à l’université, nous avons mené une vaste étude sur la façon dont les gens réagissent à un handicap. Résultat : la majorité s’irrite très vite de devoir se répéter sans cesse face à quelqu’un qui ne les comprend pas. Un aveugle ou un handicapé en chaise roulante suscite davantage de compréhension. Il est vraiment déplorable que les appareils auditifs coûtent si cher et que la mutuelle ne rembourse qu’un faible montant. « 

Le remboursement de l’assurance-maladie obligatoire est respectivement de 615,50 et 1.218,32 euro pour un ou deux appareils auditifs, à condition que le patient consulte un audiologue conventionné.

Certaines assurances complémentaires prévoient un remboursement supplémentaire dans le ticket modérateur. On trouve des appareils auditifs à partir de 650 euro (parfois dès 500 euro. Il s’agit alors de modèles non remboursés) mais les prix grimpent sans problème jusqu’à 2.450 euro. Le prix comprend obligatoirement une garantie d’entretien.

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