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Les anticorps pour combattre la sinusite chronique

16 % des adultes ont le nez bouché en permanence à cause d’une rhinosinusite chronique. Les avancées enregistrées dans le domaine des anticorps leur offrent de l’espoir.

Impressionnant ! C’est l’adjectif qui vient à l’esprit quand on pense aux progrès réalisés ces dernières années dans le traitement de la rhinosinusite chronique (ou RSC). On doit cette avancée notamment à l’équipe du Pr Claus Bachert, chirurgien ORL qui planche sur la recherche dans ce domaine depuis des décennies. La sinusite se caractérise par une inflammation des cavités crâniennes appelées sinus. Ces derniers sont remplis d’air et se situent de part et d’autre nez, à la hauteur des mâchoires, se poursuivent autour des yeux et vers le front, puis plus profondément dans le crâne.

L’inflammation de la muqueuse des sinus provoque nez bouché, difficulté à respirer par le nez, maux de tête et accumulation de glaires à l’arrière du nez et vers la gorge. Ces manifestations s’accompagnent d’une diminution ou d’une perte du goût et/ou de l’odorat.  » La sinusite aiguë est presque toujours virale et se manifeste souvent après un banal rhume. Elle peut être très accablante mais les complicationsgonflement des yeux ou atteintes cérébrales – sont exceptionnelles. Les symptômes régressent souvent assez vite et les antibiotiques sont inutiles « , précise le Pr Bachert.

Des polypes nasaux

Si les symptômes persistent pendant plus de trois mois, on parle de RCS chronique. « Il y adeux variantes : la RCS sans polypes (12 % de la population) est la plus fréquente. La variante avec polypes (4% de la population) s’accompagne d’une diminution ou d’une perte de l’odorat, analyse le Pr Bachert. Les polypes nasaux sont des micro-oedèmes installés sur la muqueuse des sinus qui peuvent boucher complètement le nez. Contrairement aux polypes de la gorge qui apparaissent pendant l’enfance, ils ne surviennent qu’au bout d’une vingtaine d’années, voire plus. On met souvent quatre ou cinq ans avant de les détecter, parce qu’il faut les procéder à une endoscopie nasale. « 

Poser le bon diagnostic, puis traiter

On pose le diagnostic de la RCS en interrogeant le patient.  » On propose un traitement de deux à trois mois avec un spray à base de stéroïdes à usage topique et/ou d’antibiotiques sous forme de macrolides faiblement dosés. Ensuite, on peut prescrire un CT Scan des sinus. Si les signes d’inflammation persistent malgré ce traitement, on est en présence d’une rhinosinusite chronique. En pratique, on brûle souvent les étapes et on prescrit trop fréquemment un CT Scan sans attendre d’en savoir plus. « 

Chez ceux qui présentent une RCS sans polypes, le traitement standard comprend en général le même spray local, plus un médicament complémentaire. Parfois cela suffit. Il arrive même que la sinusite chronique disparaisse d’elle-même. Mais il n’est pas rare que les symptômes reviennent.  » L’étape suivante consiste à opérer. On ouvre les sinus pour éliminer l’infection tout en préservant la muqueuse. En revanche, on déconseille de retirer le cornet nasal (concha nasalis superior). La muqueuse est importante, notamment pour des questions d’immunité et de microbiote nasal. « 

La solution des anticorps

En cas de polypes nasaux, l’approche est différente. On prescrit de plus fortes doses de stéroïdes topiques, associés à de la doxycycline (un antibiotique).  » Les polypes nasaux disparaissent rarement d’eux-mêmes et exigent souvent un traitement à vie. Ils s’accompagnent (dans 70 % des cas) d’asthme et d’allergies qu’il faut traiter « , souligne le Pr Bachert.

Si ce traitement ne donne pas les résultats espérés et que les polypes continuent de croître, on peut envisager une opération de reboot, une intervention assez lourde.  » Cette nouvelle technique est pratiquée sur une zone particulièrement délicate, à hauteur des yeux et du cerveau. Les ouvertures vers les sinus paranasaux sont élargies, les sinus sont débarrassés des polypes et de la muqueuse modifiée. Il s’agit en quelque sorte d’une remise à zéro, comme on le ferait pour un ordinateur qui plante. Par la suite, le patient est en principe tranquille pour de nombreuses années. « 

Aujourd’hui, on entrevoit une alternative à cette opération chirurgicale assez lourde. Une étude internationale menée par l’équipe du Pr Bachert a pu démontrer qu’un traitement à base d’anticorps monoclonaux – ou biologiques – permet de réduire les polypes nasaux et d’atténuer fortement les symptômes gênants.

 » Ce traitement novateur a déjà fait ses preuves contre l’asthme et l’eczéma atopique. Ses effets semblent tout aussi prometteurs pour la RCS avec polypes. C’est la première fois depuis longtemps qu’on peut proposer un nouveau traitement efficace avec peu d’effets secondaires. De vastes études de suivi sont en cours, afin de cibler les anticorps qui donnent les meilleurs résultats. Revers de la médaille : ce traitement coûte très cher. « 

L’écoulement nasal

Ce traitement prometteur n’est sans doute qu’une étape vers une seconde révolution, encore plus importante, attendue à plus long terme, assure le Pr Bachert.  » Plusieurs études sont en cours, menées sur des petites molécules aussi efficaces que les anticorps. A l’avenir, on pourra insérer dans la muqueuse nasale une série de bonnes bactéries capables de délivrer in situ un actif médicamenteux ciblé contre la sinusite. Dans ce domaine, l’immunologie se développe à pas de géant, ce qui nous permettra de limiter au maximum les interventions chirurgicales. « 

A faire pour éviter la sinusite chronique

  • Adoptez une stricte hygiène des mains.
  • Evitez de vous toucher trop souvent votre nez.
  • Cessez de fumer, car le tabac est une des causes peu connues de la RCS.
  • Adoptez le rinçage dynamique des fosses nasales pour plus de confort et d’hygiène. Vous pouvez le faire avec une douche pour le nez remplie de sérum physiologique, avec un spray d’eau saline ou encore avec une solution maison (9 g de sel pour 1 l d’eau). Bloquez le fond de votre gorge ou penchez la tête pour que le liquide s’écoule d’une narine à l’autre, mais pas vers la gorge. Désinfectez l’embout après utilisation.

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