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Le syndrome de l’intestin irritable impacte tant le corps que le mental

À cause des désagréments causés par la réaction imprévisible de ses intestins, sa vie sociale tourne au ralenti depuis des années. « Même si je sais comment réagit mon corps à certains aliments, je ne sors jamais sans être parée à une urgence », confie Nelly Penneman.

Douleurs abdominales et troubles intestinaux font partie du quotidien de Nelly Penneman depuis son plus jeune âge. « Enfant, je souffrais régulièrement d’infections de l’estomac et des intestins avec des épisodes de diarrhée, de constipation et de crampes douloureuses en alternance. J’étais parfois tellement déshydratée qu’il fallait m’hospitaliser. Les médecins essayaient de résoudre le problème avec des médicaments classiques mais comme la cause exacte n’était pas connue, le problème revenait sans cesse. Le diagnostic de SII n’est tombé que bien plus tard. C’est alors qu’a commencé la longue et laborieuse recherche d’un traitement adapté.

Un médicament qui donnait d’excellents résultats m’a momentanément soulagée, jusqu’à son retrait définitif du marché au bout de quelques années parce que soupçonné d’occasionner de graves arythmies cardiaques. J’ai donc dû changer de traitement mais dans le cas du SII, tout changement de médicament est assez délicat car les intestins doivent s’adapter et réagissent souvent aux nouvelles substances par des irritations.

Souper spaghetti

Les crises de douleurs abdominales et de crampes survenaient plusieurs fois par mois. Elles étaient très fréquentes pendant mes humanités, probablement à cause du stress. Je me suis souvent absentée mais faute de diagnostic précis, les professeurs ne se montraient pas très compréhensifs. Certains trouvaient que j’exagérais quand je me rendais de toute urgence aux toilettes pour la énième fois. Dans ces conditions, difficile d’expliquer en détail ce dont je souffrais. Quand le besoin pressant d’aller aux toilettes commençait à se faire sentir, c’était une question de minutes. Après, c’était trop tard.

Avec l’âge, les crises se multipliaient, jusqu’à plusieurs fois par semaine. Je refusais systématiquement les invitations aux fêtes et aux sorties par crainte d’une attaque soudaine de crampes ou de diarrhée. Un souper spaghetti chez des amis suivi par un cinéma s’est terminé dans les toilettes. Je n’ai rejoint mes amis qu’à la seconde moitié du film. Je me suis dit: plus jamais. Vers l’âge de vingt ans, je me suis isolée socialement. Je ne me sentais vraiment pas bien dans ma peau. Mes amis ont fini par me délaisser après plusieurs annulations de rendez-vous à la dernière minute. Le SII a un impact sur vos intestins, sur le corps tout entier et sur votre santé mentale, un mal-être général souvent sous-estimé. »

Certains amis ont fini par me délaisser après plusieurs annulations de rendez-vous en dernière minute.

Blanc de poulet et compote de pomme

Certains produits alimentaires favorisent le SII mais chacun réagit différemment aux aliments. « Depuis le temps, je sais quels aliments mettent le feu aux poudres. Les légumes comme les oignons, les poivrons et les choux de Bruxelles provoquent inévitablement des ballonnements, de la diarrhée et des flatulences très gênantes. Je ne bois jamais d’alcool et j’ai remplacé le café par le thé. Je mange rarement au restaurant.

Ma famille est au courant de mon régime alimentaire spécial et me soutient. Blanc de poulet, compote de pomme et purée, tel est mon repas de Noël en lieu et place de la fondue traditionnelle. C’est la seule façon de m’assurer un réveillon sans risque.

Même si je fais très attention à ce que je mange, les mauvaises surprises ne sont pas exclues pour autant. Il suffit d’un ingrédient qui ne me convient pas, d’un moment de stress ou d’une émotion pour que les problèmes ressurgissent. Le moindre pépin physique ou psychique rejaillit directement et en premier lieu sur mes intestins. »

Un libre accès aux toilettes

Vivre avec le SII demande pas mal d’organisation. J’ai toujours du Buscopan et de l’Imodium dans mon sac. Quand je sors, je prévois des vêtements de rechange et un essuie de toilette. Où que j’aille, je commence par repérer les toilettes. J’ai aussi adapté mes habitudes alimentaires. Quand je sors, soit je ne mange rien du tout, soit je grignote quelque chose deux heures avant. Si mes intestins commencent à gargouiller, c’est toujours dans le quart d’heure. La prise quotidienne de médicaments permet de contrôler assez bien la maladie. Pour savoir avec précision à quels aliments exactement mon corps réagit, j’ai l’intention de suivre le régime pauvre en FODMAP (glucides peu digestes) assez strict.

J’enseigne à des adultes. J’ai informé mes collègues et amis de ma maladie qui, heureusement, n’est plus taboue. Parmi les mesures qui pourraient grandement faciliter la vie des personnes souffrant de SII, citons notamment le libre accès aux toilettes dans les magasins et l’horeca, comme c’est déjà [théoriquement, ndlr] le cas pour les patients atteints de la maladie de Crohn. »

C’est quoi le SII?

Le syndrome de l’intestin irritable, qui touche 10% de la population, est une maladie chronique qui se caractérise par des perturbations du transit, ponctuées de diarrhée, de constipation, de douleurs et de crampes. La cause exacte n’est pas encore bien connue mais l’affection survient le plus souvent après une infection intestinale sévère ou un traumatisme. Aucune altération telle qu’une inflammation n’est constatée au niveau des intestins.

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