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Le bio est-il vraiment plus sain ?

Quand on opte pour une alimentation bio, on le fait généralement dans l’optique de manger plus sainement. Mais ses bienfaits sont-ils prouvés scientifiquement ? Pas si simple.

Les aliments issus de l’agriculture biologique sont généralement connotés comme sains, en tout cas meilleurs que leurs équivalents issus de l’agriculture traditionnelle. Pourtant, autant le dire tout de suite, aucune étude scientifique n’a démontré de façon indiscutable qu’il valait mieux se nourrir d’aliments bio. Mener une telle étude s’avérerait en effet très compliqué sur le plan méthodologique : la santé se joue sur énormément de facteurs, et les variables à prendre en compte au niveau de l’alimentation sont innombrables.

 » D’une manière générale, il n’existe encore que peu d’études sur l’impact du bio sur la santé « , reconnaît d’ailleurs François de Gaultier, agronome et coordinateur du bachelier de spécialisation en agriculture biologique à la haute école provinciale de Namur.

Mais faut-il pour autant considérer qu’une carotte bio équivaut à une carotte traitée avec des engrais de synthèse et des pesticides ? Pas vraiment : globalement, on remarque que les aliments bio contiennent généralement plus de constituants désirables et moins de composés indésirables que leurs homologues tirés de l’agriculture  » conventionnelle « .

L’INCONNUE DES PESTICIDES

Au premier rang des substances les plus décriées, on retrouve évidemment les pesticides de synthèse. En Belgique, en 2018, 68 % des fruits et légumes contrôlés par l’Afsca contenaient des résidus de pesticides. Selon l’Agence fédérale, il n’y a pas là de quoi s’inquiéter, puisque l’immense majorité des végétaux (98%) ne dépassaient pas les limites maximales en résidus (LMR) autorisées par la loi. Et même dans les rares cas problématiques, ajoute-t-elle,  » un dépassement de LMR ne signifie pas nécessairement – et même rarement – un danger pour le consommateur. « 

De fait, si l’usage de ces pesticides peut être à l’origine de maladies professionnelles chez les agriculteurs, qui les manipulent en grande quantité, l’impact de résidus sur les organismes des consommateurs est difficilement objectivable. Reste que leur innocuité est régulièrement remise en question.  » L’Afsca ne prend pas en compte que les consommateurs mangent plusieurs fruits et légumes, chacun traités avec des pesticides différents, déplore par exemple Marc Fichers, secrétaire général de l’Association Nature et Progrès. Il pourrait y avoir un effet cocktail avec l’ingestion de ces produits, chacun dans des doses tolérées. « 

Et si les quantités incriminées sont limitées, Marc Fichers rappelle que les pesticides de dernière génération agissent à très faible dose.  » Vous traitez un hectare avec 150 grammes de produit, dont à peine 30 g sont absorbés par les plantes ; c’est suffisant pour tuer les insectes sur toute la surface... Ces substances sont aussi beaucoup plus efficaces à petite dose mais sur le long terme. « 

A noter que l’agriculture bio est aussi touchée par le problème, puisque certains fruits ou légumes bio peuvent être contaminés par des cultures voisines, après récolte ou à cause de produits persistant dans le sol. Il y est toutefois bien moins criant, car la présence des pesticides y est quatre fois moins courante et les doses... en moyenne deux cent fois moindres.

MÉTAUX LOURDS & CO

 » Mais il n’y a pas que les pesticides, souligne François de Gaultier. On retrouve ainsi davantage de cadmium (un métal lourd) dans les végétaux issus de l’agriculture conventionnelle : la principale source de contamination provient de la réutilisation des boues de station d’épuration pour fertiliser les champs, ce qui est interdit dans l’agriculture biologique. Avec le bio, on effectue aussi une rotation lente des cultures, ça limite l’accumulation des fertilisants – qui contiennent eux aussi des métaux lourds – dans le sol. « 

Les produits estampillés  » bio  » renferment enfin statistiquement moins de nitrates, de mycotoxines ou d’additifs problématiques. Les quantités dont on parle ici sont négligeables, mais la différence existe !

NUTRITIVEMENT SUPÉRIEUR ?

S’il y a moins de substances indésirables dans les produits bio, quid au niveau nutritionnel ? Les aliments bio seraient-ils plus riches en nutriments ? Marc Fichers est ici moins catégorique :  » Il y a de mauvais légumes bio tout comme il y en a de mauvais conventionnels : si vous achetez un chou rave d’un kilo et demi, bio ou pas, ce légume aura été  » forcé  » et ses qualités nutritionnelles seront faibles ! « 

Une étude française a pourtant souligné que les produits bio contenaient en moyenne davantage de matière sèche (soit moins d’eau) que leurs homologues conventionnels et, partant, plus de nutriments.  » Pas de les quoi transformer en aliments miracles, mais autant de petites choses qui sont toujours bonnes à prendre, estime François de Gaultier. Les produits laitiers contiennent davantage de bons acides gras, d’autres produits montrent des taux de minéraux, de phosphore ou de fibres tendanciellement supérieurs...

C’est aussi le cas au niveau des antioxydants, et c’est facile à comprendre : on protège moins les plantes en agriculture bio, elles doivent donc secréter davantage de substances pour se défendre elles-mêmes des agressions extérieures ! « 

Sur le seul plan de la santé, si les différences entre produits conventionnels et bio sont, en l’état actuel des connaissances, relativement minimes, la balance des bénéfices semble donc pencher légèrement en faveur du bio.  » Mais ce n’est pas parce que vous achetez du bio que ce sera nécessairement sain, met en garde l’agronome. La malbouffe bio, trop salée ou trop grasse, existe elle aussi... « 

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