Aujourd'hui, en Belgique, plus d'un adulte sur trois est en surpoids (IMC entre 25 et 29,9) et 16% sont obèses (IMC ?30). Comme presque partout dans le monde, ces chiffres augmentent chaque année. "Les chiffres sont très alarmants", commente le Dr Yannick Deswysen, chirurgien oeso-gastrique aux Cliniques universitaires Saint-Luc. Pourtant, trop de discours tendent encore à moraliser l'obésité comme le résultat d'un défaut de volonté. Il "suffirait" de manger moins, mieux, de se bouger. Dans la réalité, les choses sont loin d'être aussi simples.
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Aujourd'hui, en Belgique, plus d'un adulte sur trois est en surpoids (IMC entre 25 et 29,9) et 16% sont obèses (IMC ?30). Comme presque partout dans le monde, ces chiffres augmentent chaque année. "Les chiffres sont très alarmants", commente le Dr Yannick Deswysen, chirurgien oeso-gastrique aux Cliniques universitaires Saint-Luc. Pourtant, trop de discours tendent encore à moraliser l'obésité comme le résultat d'un défaut de volonté. Il "suffirait" de manger moins, mieux, de se bouger. Dans la réalité, les choses sont loin d'être aussi simples."Il faut reconnaître l'obésité comme une maladie chronique, un problème de santé publique, estime Yannick Deswysen. Les personnes qui sont obèses ne le souhaitent pas et l'obésité ne va pas disparaître d'un coup de baguette magique. Même lorsqu'on opère, c'est un travail de tous les jours, qui nécessite un suivi médical." Étroitement liée à l'abondance de malbouffe dans nos sociétés industrielles, à la déritualisation des repas et à la sédentarité, l'obésité est aussi parfois liée à une histoire familiale, à des épreuves et des difficultés psychologiques, sociales ou économiques. Elle peut aussi paradoxalement être favorisée par les régimes à répétition avec leur cortège d'effets yoyo. Ses causes sont donc aussi complexes qu'en sortir est difficile. En Belgique, environ 1 personne sur 100 s'est fait opérer pour perdre du poids (chiffres 2020 du KCE, le Centre fédéral d'expertise des soins de santé). Cette chirurgie de l'obésité, dite chirurgie "bariatrique" s'adresse aux personnes présentant un IMC d'au moins 40 ou d'au moins 35 s'il existe d'autres comorbidités comme des apnées du sommeil, une hypertension artérielle non contrôlée, un échec antérieur de chirurgie bariatrique ou un diabète de type 2. "Il faut aussi que le patient ait déjà essayé sans succès de perdre du poids par une modification des habitudes alimentaires", précise le Dr Deswysen. Malheureusement, un certain nombre de ces interventions mène à des reprises de poids sur le long terme. C'est pourquoi le KCE préconise aujourd'hui un suivi médical, nutritionnel et psychologique avant l'intervention et pendant au moins deux ans après. Il est également recommandé de se faire opérer dans des hôpitaux et par des chirurgiens qui répondent à certains critères, notamment un nombre annuel minimum d'opérations bariatriques. L'intervention doit être d'autant plus réfléchie qu'elle comporte, comme toute chirurgie, un risque de complications. "C'est devenu une opération courante, avec plus ou moins 15.000 interventions de ce type en Belgique, mais ce n'est pas pour autant anodin", précise Yannick Deswysen. Deux à trois mois minimum sont ainsi nécessaires entre la première consultation et l'intervention. "Il est fondamental de bien sélectionner les patients, de leur permettre d'avoir une préparation avant la chirurgie. On travaille en équipe pluridisciplinaire, avec une psychologue, une diététicienne et parfois on décide de ne pas aller vers la chirurgie. Mais c'est déjà un énorme pas de venir consulter pour reconnaître qu'il y a un problème, c'est très courageux", applaudit le spécialiste.Si les interventions ne sont possibles qu'à partir de 18 ans, il n'existe pas d'âge limite légal. "Néanmoins, dans les faits, on n'opère pas des personnes au-delà de 60-70 ans car l'idée, c'est d'améliorer la qualité de vie mais aussi la quantité de vie." Et si les patients se sentent souvent "mieux dans leur peau" après une perte de poids, la chirurgie a d'abord des objectifs médicaux. "Elle permet de diminuer ou de faire disparaître certaines comorbidités, comme le risque cardiovasculaire mais aussi le risque de cancers puisque l'obésité est un facteur de risque pour de nombreux cancers", souligne le Dr Deswysen. Aide majeure dans la perte de poids, la chirurgie suppose d'importants efforts alimentaires sur le long cours. En post-opératoire, le patient doit se contenter de l'équivalent d'une sous-tasse à café d'aliments à chaque repas... Il augmentera ensuite progressivement les quantités jusqu'à revenir, environ un an plus tard, à une assiette "normale". Les bénéfices seront conservés, pourvu que le patient évite notamment les grignotages. "Une telle perte de poids représente un changement très important, avec des modifications au niveau relationnel, psychologique, des dynamiques de couple qui se modifient, etc., analyse le Dr Deswysen. Pour certains patients chez qui la nourriture pouvait jouer le rôle d'une compensation d'un mal-être ou d'un stress, il peut aussi y avoir des transferts d'addiction avec des problèmes d'alcool par exemple." Pour eux, la reprise du sport, dans un cadre d'abord médical, représente souvent un soutien important, tout comme le suivi psychologique. Le début d'un cercle vertueux qui permet de réaligner le corps et l'esprit, la confiance en soi et la santé.