J’ai réalisé mon rêve de jeunesse

Avoir des rêves, c’est bien, les réaliser c’est mieux ! Certaines femmes ont fait de leur vie un rêve éveillé, d’autres y travaillent ardemment ou ont, au contraire, complètement renoncé à leurs ambitions. Mais est-il important d’aller au bout de ses rêves ?

Demandez à votre mère, votre soeur ou votre amie de vous parler de ses rêves de jeunesse et normalement, ses yeux devraient se mettre à briller... L’émotion affleure en effet souvent lorsqu’on se remémore ce qui nous faisait vibrer à l’âge de tous les possibles. Devenir une virtuose du piano, vivre une passion amoureuse, soulager la misère du monde, écrire un livre, être archéologue, ressembler à Jane Fonda... Grandioses ou modestes, déclarés ou secrets, raisonnables ou complètement fous, les rêves de jeunesse ont abreuvé l’imaginaire de la plupart d’entre nous. Parfois, ces rêves sont même devenus réalité en donnant aux femmes et aux hommes qui les portaient les ailes nécessaires pour aller décrocher les étoiles !

Une façon de construire une image de soi

 » Le rêve fait partie de la stratégie d’apprentissage des enfants, observe le psychologue Alain Moenaert. Tous les enfants se sont un jour imaginés dans la peau de l’un ou l’autre personnage parce qu’inventer sa vie future est une façon de commencer à se construire une image de soi-même.  » Ce qui explique probablement pourquoi le nombre de femmes qui affirment ne pas avoir eu de rêve de jeunesse est si faible : pas plus de 2,7% selon notre sondage. Mais peut-être les rêves de jeunesse de ces femmes-là sont-ils tout simplement tombés dans les abîmes de l’oubli ?

Nul besoin de nourrir de folles ambitions pour mériter sa place au panthéon. Une des plus grandes surprises de notre sondage tient en effet à la nature même des rêveries féminines, les plus récurrentes étant, dans l’ordre : trouver l’âme soeur (50%), fonder une famille (46%) et réussir sa vie professionnelle (42%). Des rêves qui, à première vue, peuvent sembler assez sages ou pragmatiques, mais qui, à la réflexion, se révèlent tout aussi exaltants et parfois, aussi difficiles à concrétiser que marcher sur la Lune ou décrocher le Prix Nobel de physique !

Dans le style terre à terre encore, une femme sur cinq (21%) rêvait de  » changer de milieu  » et 15% de  » devenir riche « . Le petit grain de fantaisie n’apparaît que dans le bas du classement avec 8% de jeunes filles qui se voyaient bien dans la peau d’une  » artiste « , tandis qu’une poignée d’autres ne s’emballaient qu’à la perspective de sillonner la planète, sac sur le dos, ou de rendre le monde plus juste à travers leur engagement humanitaire.

Un jour, mon prince viendra...

Au sommet de toutes les espérances donc, une femme sur deux n’avait qu’une ambition dans sa jeunesse : rencontrer le prince charmant, ce héros inaltérable qui, perché sur son cheval blanc (ou, plus moderne, au volant de sa Mercedes) viendrait leur apporter amour, aventure et sécurité. Fallaitil une preuve supplémentaire qu’aimer et être aimé reste le besoin fondamental, quel que soit son sexe ou son âge ? Non, mais ce qui est plus surprenant, en revanche, c’est la persistance du mythe de l’élu, de cet être unique fait pour nous et nous seule. La preuve : quand le prince rêvé se transforme en crapaud, beaucoup de femmes expliquent que  » ce n’était pas le bon « , ce qui annonce d’ailleurs souvent le début d’une nouvelle quête d’amour, tout aussi excitante qu’épuisante.

Après l’amour, c’est l’idée de fonder une famille qui transportait le plus les jeunes filles que nous étions, ce qui confirme l’importance de la maternité et des liens familiaux comme source de satisfaction et de stabilité. Parmi tous les rêves féminins, c’est au passage celui-là qui a le plus de chances d’être réalisé. 66% des participantes à notre sondage se disent comblées de ce point de vue, contre 57% seulement qui ont rencontré le grand amour et 41% qui estiment avoir réussi leur vie professionnelle. Celles qui se voyaient bien  » riches  » ou  » célèbres  » sont au contraire plutôt rares à avoir été exaucées : pas plus de 3% ! Mais 20% des femmes qui aspiraient à  » changer de milieu  » ont, elles, réussi leur pari (c’est probablement plus facile que de gagner le jackpot au casino ou devenir Sharon Stone !).

On y pense et puis... on oublie

Puisqu’il est admis qu’à l’enfance ou à l’adolescence, nous avons à peu près toutes eu envie de réaliser quelque chose, pourquoi, en devenant adultes, certaines d’entre nous se sont-elles démenées pour aller au bout de leurs rêves tandis que d’autres ont mis leurs aspirations au frigo ? Le manque de moyens (29%), le fait de ne pas avoir rencontré  » la bonne personne  » (23%), le manque de temps (15%), et enfin, la peur de l’inconnu (10%) sont les raisons les plus souvent avancées par les femmes pour justifier le fait qu’elles ont renoncé à leurs rêves de jeunesse.

 » En grandissant, beaucoup d’enfants désapprennent à rêver car ils ont entendu leurs proches dire que ce n’était pas raisonnable, pas réaliste, que ce n’était pas pour eux, analyse le psychologue Alain Moenaert. Sous la pression, ils finissent donc par avoir des rêves socialement et culturellement acceptés, comme se marier, avoir une belle maison, une belle voiture...Or, un rêve n’est pas fait pour être raisonnable ! D’ailleurs, la plupart de ceux qui ont réalisé des choses extraordinaires ne se sont pas demandé si leur rêve était réalisable, mais comment ils pouvaient y arriver ! Raisonner en fonction des moyens dont nous disposons est une des astuces que nous utilisons le plus souvent pour rétrécir nos rêves « , conclut le psychologue. Il est vrai que lorsqu’on rêve d’aller à Pékin et qu’on constate, penaud, qu’on n’a pas assez d’essence dans son réservoir, on a finalement assez peu de chances d’atteindre son objectif, non ?

 » La plupart des gens heureux ont réalisé leur rêve  »

Mais est-il vraiment important de réaliser ses rêves de jeunesse ? La majorité des femmes qui ont répondu à notre questionnaire estiment que  » oui  » (67 %) avec un bémol cependant, puisqu’elles ajoutent :  » quand c’est possible ». Les obstacles matériels et psychologiques comme la peur, le manque de confiance, le poids des habitudes, la pression de l’entourage, font que nous ne sommes pas facilement prêtes à lâcher la proie pour (peut-être) l’ombre... Quitte à passer à côté d’une expérience.

Seule une femme sur cinq – une sur trois chez les francophones – pense qu’il faut toujours aller au bout de ses rêves, et est prête à faire d’importants sacrifices pour y arriver : quitter son confort matériel, rompre avec ses proches, prendre des cours du soir, travailler dur...Une femme sur dix ne se pose de son côté même pas la question, estimant que les rêves ne servent qu’à une chose : alimenter l’imaginaire !

Mais qu’en pensent les psys ? Doit-on vraiment se défoncer pour donner corps à ses rêves ?  » Certaines femmes sont parfaitement heureuses sans rêve, constate Alain Moenaert. Elles ont perdu le contact avec le sens de leur vie mais ne s’en aperçoivent pas nécessairement. Pour les autres, ça dépend du moment où elles se trouvent dans leur cycle de vie. Grosso modo, avant l’âge de 40 ans, on est piloté par les autres, on ne choisit pas vraiment sa vie.Au-delà, on traverse souvent une crise existentielle où revient la question des rêves et aspirations personnelles.Moi, ce que je constate, c’est que la plupart des gens heureux ont réalisé leur rêve de jeunesse, même s’ils l’ont adapté en cours de chemin. Ils ont le sentiment d’être à leur place parce qu’ils font quelque chose qui leur correspond.  »

Pour les unes, ce sera vivre par et pour leurs enfants, pour les autres, se lancer à plus de 40 ans comme styliste ou professeur de danse au Maroc.

Encore plein de rêves dans la tête

Que l’on vive ou pas sa vie rêvée, ce qui est plutôt rassurant, c’est qu’en avançant en âge, l’usine à rêves ne semble jamais devoir mettre la clé sous la porte ! A 40, 50 ou 60 ans, les femmes sont, en effet, près de 73% à déclarer qu’elles ont encore des rêves à concrétiser. Celui qui revient le plus souvent ? Sans conteste  » voir le monde, voyager « , suivi, en toute logique, par le rêve d’avoir une seconde résidence à l’étranger, ou sur la côte belge pour les moins aventurières. Et pour que ces rêves d’exotisme aient une chance de se concrétiser, il faut bien sûr de l’argent, c’est pourquoi nous sommes nombreuses aussi à espérer être  » financièrement plus à l’aise « . Enfin, dans les rêves altruistes, c’est l’espoir de voir un jour nos enfants heureux qui nous motive le plus.

 » Poursuivre ses rêves et aller au bout de sa légende personnelle est un moteur fabuleux, s’enthousiasme Alain Moenaert, ne serait-ce que parce qu’on vieillit mieux quand on n’a pas de regret.Mais il ne faut pas être aveugle pour autant car certains rêves d’enfance ne pourraient plus être satisfaisants à l’âge adulte. Il faut se poser la question de savoir si la réalisation d’un rêve est la chose la plus essentielle que nous ayons à faire pour nous sentir à notre place, pour nous apporter la satisfaction. Si c’est le cas, alors il faut foncer !  »

Pour se sentir enfin  » à sa place  »

Puisque selon le psychologue Alain Moenaert et l’écrivain Antoine Filissiadis, les gens les plus heureux sont souvent ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont réalisé leur rêve, voici quelques réflexions à l’attention des femmes qui s’interrogent sur le bien-fondé de leurs rêveries de jeunesse ou... de maturité.

? Les femmes plutôt bien dans leur peau ont une chose en commun : elles sont en adéquation avec leur métier, leur fonction sociale, leur rôle familial... Se sentant  » à leur place « , elles ne cherchent pas à tout prix à changer de mari, de milieu social, d’emploi, de quartier ou de pays. Et si réaliser ses rêves n’était au fond qu’un des moyens de  » trouver sa place  » dans ce monde ?

? On peut se sentir  » à sa place  » dans un environnement précis (à la campagne, dans une ville, un pays...) ; dans une activité professionnelle ; dans certaines actions (créer, venir en aide à autrui, élever ses enfants...) ; entourée de certaines personnes (ses parents, ses enfants, ses amis). Parce que dans ces circonstances ou environnements, on se sent  » en sécurité « .

? Devenir  » quelqu’un « , c’est accepter sa (ses) différence(s) individuelle(s). C’est donc aussi accepter de ne pas plaire à tout le monde à cause de ses envies, ses préférences, son mode de vie, ses fantaisies, ses rêves. Chercher à plaire aux autres et s’épuiser à gagner leur reconnaissance nécessite presque toujours de gommer ses aspérités, de cacher ce que l’on est vraiment au fond de soi.Or, tous les psys sont d’accord : on ne peut pas être heureux avec une image truquée de soi-même !

? Est-il bien raisonnable de se laisser dominer par les  » rêves sociaux « , soit les signes extérieurs de réussite (belle maison,mari aimant, grande famille unie, super job dans une multinationale) ? Mesurer sa propre valeur à l’aune de ces critères-là peut faire beaucoup de tort à l’estime qu’on a de soi-même.

? Aujourd’hui, il faut être le meilleur en tout et si on refuse ce jeu et ces valeurs-là, on prend le risque d’être exclu. Un exemple : les femmes au foyer. Même si le rêve de toujours de ces femmes était précisément de se consacrer à leur mari, leurs enfants, leur foyer, elles souffrent d’un manque cruel de reconnaissance et de statut social. Mais pourquoi diable leurs rêves seraient-ils donc moins valables que d’autres ?

? Devenir enseignante, épouser le médecin du village, avoir une seconde résidence à la mer : étaient-ce vos rêves ou... ceux de vos parents ? Il est très important de distinguer ses rêves propres de ceux que les autres ont projeté sur nous. Ce  » débroussaillage  » est un des meilleurs moyens de se connaître et de s’affirmer. Chercher à développer ses projets personnels permet en effet de ne plus se contenter de la vie que les autres ont choisie pour nous, d’être acteur plus que spectateur de sa propre existence.

? Réaliser ses rêves est-il le chemin le plus court vers le bien-être ? Si rien ne prouve cette assertion à 100 %, ce qui est sûr, en revanche, c’est que passer sa vie à regretter des choses et des actions qu’on n’a pas accomplies, ça ne rend pas gai non plus ! Ne dit-on pas que pour bien vieillir, il vaut mieux vieillir sans regrets ?

? Bien sûr, la vie ne peut pas être un rêve éveillé en permanence, il y aura toujours des situations et des gens qui vous mettront mal à l’aise parce qu’ils vous obligent à jouer une partition que vous n’avez pas envie de jouer.Mais l’important n’est pas d’être bien absolument dans tous les domaines (boulot, famille, amis, santé, situation financière...) mais de se sentir en parfaite sécurité dans certains pans de sa vie, auxquels on peut se raccrocher en cas de coup dur ou de déception.

? Attention à la fuite en avant : avoir pour rêve de s’exiler dans un autre pays ou quitter son foyer ou son job sans savoir pourquoi et vers quoi on va peut être source de graves désillusions. On ne soigne pas son malaise intérieur par la dérobade ! Demandez-vous plutôt quel pan de votre vie peut ou doit être changé ou adapté pour que vous vous sentiez plus  » raccord  » avec vousmême.

? On le sait, on reproduit souvent inconsciemment les comportements hérités de nos parents. Si vous avez eu des parents ou un mari qui vous  » coupaient  » les ailes, essayez d’en décortiquer les mécanismes pour ne pas infliger ce conditionnement à vos propres enfants. Bannissez de votre vocabulaire les phrases comme  » Ce n’est pas fait pour toi « ,  » Tu ferais mieux d’étudier ça « ... Elles rétrécissent les rêves et réduisent l’horizon futur des enfants.

? Le sens de la vie : voilà bien un grand mot ! Si les philosophes s’interrogent depuis l’origine des temps sur cette question existentielle, il faut peutêtre se résoudre à admettre que ce sens n’est peut-être pas donné,mais qu’il faut l’inventer soimême. Pour quoi suis-je faite ? Dans quel environnement, dans quelles circonstances, auprès de qui je me sens bien et je m’accomplis ? Dans une activité artistique, en m’occupant des déshérités, en faisant en sorte que mon foyer tourne bien ? A méditer...

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