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Des nouvelles solutions pour les pieds à problèmes

Les problèmes de pieds, comme l’hallux valgus, orteils en marteau... touchent de plus en plus d’hommes et de femmes. Bonne nouvelle : les traitements de la douleur et les techniques chirurgicales sont de moins en moins lourds et de plus en plus performants.

Longtemps les pieds ont été la partie la plus négligée de notre corps. Il fallait qu’ils nous fassent terriblement souffrir pour qu’on en tienne enfin compte. Mais les choses évoluent à mesure qu’augmente le nombre de ceux qui souffrent des pieds. A mesure aussi que les traitements spécialisés deviennent plus pointus.  » On parvient à traiter la grande majorité des problèmes, ce qui permet aux patients de rester actifs et en forme beaucoup plus longtemps « , explique Jan Fabry, chirurgien orthopédiste à l’UZ Bruxelles.

L’hallux valgus

Le port de sandales est à recommander dans le cas d’orteils tordus et d’oignons aux pieds, aussi appelés hallux valgus. Cependant, leur aspect peu esthétique en freine plus d’une. Cette affection fréquente se traduit par une déviation de la phalange inférieure du gros orteil vers l’extérieur par rapport au métatarsien. Celle-ci se manifeste sous la forme d’une excroissance installée sur la face interne de l’avant-pied.

 » Ce type d’oignon apparaît surtout chez les femmes et peut s’expliquer de plusieurs façons, dont l’une serait une malformation congénitale à l’origine d’une déviation de l’angle et de la distance entre le premier et le deuxième métatarsien, incitant le gros orteil à croître en biais, vers l’extérieur. Plus cet angle est court, plus on risque de souffrir d’un hallux valgus. Porter des chaussures mal adaptées est un autre un facteur de risque. Les femmes qui portent souvent des escarpins à talons hauts et bouts pointus risquent d’aggraver le processus.

 » Il s’agit d’une affection qui s’installe très progressivement, observe Jan Fabry. Beaucoup de patientes ne se plaignent que le jour où elles ne parviennent plus à enfiler leurs chaussures, parce que la douleur inflammatoire est trop importante. Elles consultent alors un podologue ou, selon la gravité du cas, un chirurgien orthopédiste. « 

Ecarteur ou opération ?

Un premier traitement chez le podologue consiste à réaliser sur mesure des écarteurs en silicone qu’on ajuste sur la zone affectée.

 » Cette technique, qui consiste à placer un écarteur en silicone entre le gros orteil et l’orteil voisin, ne convient qu’aux cas de hallux valgus non rigidifiés. C’est-à-dire que la déviation de l’os peut encore être corrigée en exerçant une pression. L’inconvénient ? Cette prothèse grossit le pied et il faut s’acheter des chaussures plus larges. A noter, l’hallux valgus réapparaît dès qu’on ne porte plus d’écarteur... « 

On peut aussi traiter l’hallux valgus de manière structurelle par la chirurgie qui donne, en général, de très bons résultats. Le taux de rechute est de 5 % dans les cinq à dix ans.  » Ce type d’opération a énormément évolué depuis une dizaine d’années. On commence par prendre une radiographie du pied en station debout, afin de calculer la charge que le pied doit soutenir. Sur base de ces données, on choisit la technique opératoire. Il s’agit vraiment d’une chirurgie sur mesure.

Chez certains, il suffit d’une intervention locale, au niveau de l’articulation de l’orteil, par exemple. Chez d’autres, il faut déplacer le métatarsien. On brise l’os en trois morceaux et on les déplace ensuite pour redresser l’orteil.

On ôte aussi partiellement l’excroissance osseuse.  » Souvent, le pied est un peu plus court qu’avant l’opération, ce qui facilite d’autant le choix des chaussures...

La convalescence

Ce type de chirurgie s’accompagne d’une assez longue revalidation.  » La durée varie au cas par cas, mais pour pouvoir marcher à nouveau sans douleur, il faut compter de quatre à six mois. Les pieds restent parfois gonflés pendant quatre mois, si bien qu’il faut porter de préférence des sandales ou des baskets larges. Les amateurs de chaussures élégantes ne vivent pas toujours très bien cette période intermédiaire.

Pendant la convalescence, il ne faut pas rester totalement immobile. On peut se promener ou rouler à vélo, par exemple. Mais on évitera de conduire une voiture pendant quatre à huit semaines parce que le maniement des pédales met la zone opérée à rude épreuve. « 

On déconseille toutefois cette opération aux personnes souffrant de problèmes vasculaires ou circulatoires. Il faut que la peau soit en bonne santé pour qu’elle puisse se régénérer. Ceux qui souffrent d’arthrite rhumatoïde et de diabète doivent parfois renoncer à ce type de chirurgie. Dans ce cas, on propose des chaussures orthopédiques, la seule alternative efficace.

L’hallux rigidus

Les hommes, en particulier les sportifs, sont les premiers concernés par l’hallux rigidus. Ici, pas de problème de déviation de l’orteil. Il s’agit d’une arthrose (perte de cartilage) qui raidit et immobilise progressivement le gros orteil. Elle s’accompagne souvent d’un oignon protubérant sur le dessus de l’orteil.  » Cette excroissance empêche de dérouler totalement l’orteil pendant la marche. Et c’est douloureux. Conséquence : on a du mal à trouver chaussure à son pied et on marche moins.

Dans un premier temps, on essaie de traiter le problème à l’aide d’antidouleurs et d’anti-inflammatoires, souvent associés au port de chaussures mieux adaptées. Par exemple, un modèle suffisamment large au niveau de l’avant du pied, avec semelle rigide. Quand on déroule la plante du pied, on allège nettement la charge sur le gros orteil.

Une autre solution, lorsque le cartilage de l’orteil est encore en bon état, consiste à ôter l’excroissance et redresser l’orteil. Si cela ne suffit pas à éliminer la douleur, on procède à une arthrodèse (blocage de l’orteil). Cela peut sembler impressionnant mais ce n’est pas grave. On n’immobilise que le gros orteil et le pied conserve sa mobilité et sa capacité à se dérouler. Autrement dit, on reste capable de marcher et même de courir, sans ressentir de douleur.

Pour une femme, nous déconseillons le port de hauts talons. Le talon ne peut pas dépasser 2 à 3 cm. L’arthrodèse est une solution vers laquelle se tournent volontiers les sportifs et les personnes très actives ou qui ont un métier physique.

Une alternative désormais plus rarement utilisée consiste à placer une prothèse articulaire.  » Les mouvements du pied risquent de déplacer certains composants de la prothèse, ce qui pourrait endommager l’os et compliquer la cicatrisation. En outre, on ne connaît pas encore les résultats à long terme de ce type d’opération. « 

Les orteils en marteau

En cas d’orteils en marteau, un des problèmes de pied les plus fréquents, se chausser est un véritable cauchemar. Les orteils se tordent et se recroquevillent progressivement, jusqu’à ressembler à des griffes.

 » Ici encore, il est difficile d’identifier une cause précise. En général, plusieurs facteurs interviennent dans l’apparition du problème. Les orteils en marteau s’accompagnent d’un affaiblissement des petits muscles intrinsèques (des muscles du pied qui ne se prolongent pas vers la cheville). La voûte plantaire a tendance à s’affaisser, puis le pied tout entier, avec le risque d’avoir des pieds plats. La douleur se localise au sommet des orteils recroquevillés et au niveau de la voûte plantaire. Les  » coussinets  » situés juste sous la peau ont tendance à disparaître. Quand on s’appuie sur ses orteils, le poids et la pression s’exercent donc directement sur les os, ce qui est douloureux. « 

Les orteils en marteau sont le résultat d’un lent processus, tout comme l’hallux valgus. On ne dispose actuellement ni de médicaments, ni d’une thérapie ciblée capables de guérir les petits muscles atteints. Mais il faut réagir vite pour augmenter les chances de réussite du traitement. Celui-ci consiste à porter des semelles de soutien avec un renfort destiné à creuser la voûte plantaire, à quoi s’ajoutent éventuellement des protections en silicone pour empêcher le frottement.

Lorsque les orteils en marteau sont encore souples, c’est-à-dire mobiles, il est possible de les corriger grâce à des transplantations microchirurgicales de tendons qui permettent de redresser l’os des orteils. Ceux-ci retrouvent ainsi une position plus horizontale. Cette transplantation se fait avec les tendons de la personne opérée : on prélève des tendons extenseurs ou autres et on les positionne dans les orteils de manière à les rectifier. « 

Les orteils rigidifiés

Des orteils rigidifiés exigent une autre approche.  » La chirurgie est possible mais elle doit s’appliquer à la carte. Il faut en effet combiner plusieurs techniques opératoires. Il n’existe pas de traitement universel. En fonction des causes de l’affection et de l’état général du pied, on adapte le traitement : on traite le tendon (on l’étire ou on l’enlève), on corrige l’articulation déformée,... On peut aussi raccourcir ou reconstruire le métatarsien. « 

La période de revalidation est comparable à celle qui suit les opérations de l’hallux. Les quatre à six premières semaines, on enveloppe le pied dans une sorte de basket à semelle en bois pour éviter qu’il ne se déroule. Mais on peut marcher.  » Il faut savoir que plus on est motivé, plus vite on se remet de l’intervention. Il faut bien sûr aussi faire preuve de réalisme par rapport aux résultats espérés. « 

Gare à l’arthrose !

Il arrive aussi que l’arrière du pied soit source de problèmes, en particulier de crises d’arthrose (destruction progressive du cartilage) localisées dans l’articulation de la cheville. Une source d’inconfort et de handicap.

 » Avant, on fixait la cheville de manière standard dès que la douleur et la gêne devenaient difficiles à supporter. Cela présentait l’inconvénient, chez les personnes actives, de déplacer la douleur vers d’autres parties du pied voire les genoux. Aujourd’hui, on prend en compte la mécanique de la jambe entière et l’étendue de l’arthrose dans l’articulation de la cheville. Les interventions au niveau de la cheville ont des conséquences sur les hanches et les genoux. Les connaissances en chirurgie de la hanche et du genou sont depuis quelques années appliquées au pied, ce qui ouvre de nouvelles perspectives. « 

On a ainsi découvert de nouvelles solutions pour ceux qui souffrent d’une arthrose partielle avec déviation de l’axe des membres inférieurs.  » On scie l’os et on le fixe à l’aide d’une plaque et de vis selon un angle calculé à l’avance. Les matériaux utilisés pour ce type d’opération et la manière dont on calcule l’angle ont beaucoup évolué. Pour un problème très localisé, on peut opter pour une transplantation de cartilage. « 

Une autre possibilité consiste à placer une prothèse qui remplace la partie d’articulation atteinte par l’arthrose. L’avantage de ces prothèses ? La cheville conserve sa mobilité, même si c’est dans une moindre mesure. Contrairement aux prothèses du genou et de la hanche, le placement de ce type de prothèses reste délicat.

Les prothèses ont une durée de vie limitée

 » La durée de vie de ces prothèses est plus limitée chez les gens actifs, qui ont plus de 55 ou 60 ans, et qui font du sport. Certaines parties de la prothèse peuvent, en effet, se détacher ou s’user. C’est pourquoi nous ne leur recommandons pas le placement d’une prothèse, ou alors on les avertit qu’ils devront modifier leur mode de vie. En revanche, pour ceux ont un mode de vie plus calme, les prothèses peuvent apporter un soulagement. Mais il faut savoir que la durée de vie d’une prothèse ne dépasse pas les quinze à vingt ans. Il est ensuite possible, dans certains cas, de la remplacer. Quand ce n’est pas possible, on procède à la fixation de l’articulation de la cheville. « 

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