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Compléments alimentaires, pas des bonbons !

Sur internet, en (para)pharmacie, dans les supermarchés... Les compléments alimentaires sont partout et promettent la santé. Mais peut-on pour autant les consommer comme on le désire ?

Le marché des compléments alimentaires est aujourd’hui florissant. Accessibles en vente libre, ces produits ne sont pas à proprement parler des médicaments, mais des micronutriments ou des extraits de plante, parfois hautement dosés, censés suppléer aux insuffisances de notre alimentation. En théorie, il n’y a là que de bonnes choses : des vitamines, des minéraux, des oligo-éléments, etc.

Le raccourci est vite emprunté : dans nos esprits, compléments alimentaires riment avec bonne santé. Quels que soient ceux qui sont consommés, l’effet sera bénéfique. Ou, tout du moins,  » cela ne pourra pas faire de mal « . On peut donc remplir son caddie (ou son panier en ligne) les yeux fermés, au gré de ses besoins supposés. Hé là, pas si vite !

Pour chaque nutriment, il existe des apports journaliers recommandés (AJR) qu’il est conseillé d’atteindre... et qu’il vaut mieux ne pas trop dépasser(1). Exemple avec les vitamines :  » Les vitamines A, D, E et K sont des vitamines liposolubles, explique Serge Pieters, professeur de diététique à l’Institut Paul Lambin. C’est-àdire qu’elles sont stockées dans les graisses et s’accumulent dans l’organisme si on en consomme trop. Il y a donc un certaine toxicité : une complémentation importante en vitamine E augmente, par exemple, le risque de cancer de la prostate. En l’état actuel des connaissances, la seule vitamine liposoluble en complémentation qui ne semble pas poser de problème est la vitamine D, prise pendant la mauvaise saison, lorsque la nébulosité est importante. « 

Compléments alimentaires, pas des bonbons !
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Attention au surdosage

Les vitamines du groupe B et la vitamine C sont quant à elles hydrosolubles : on a longtemps cru qu’une consommation excessive de ces vitamines ne portait pas à conséquence, puisque l’excédent était éliminé via les urines.  » Mais ce n’est pas si vrai : en cas de surdose, la vitamine C peut favoriser l’apparition de calculs rénaux et une augmentation de la tension artérielle. «  Le surdosage peut même provoquer un effet inverse à celui recherché : la vitamine C devient alors pro-oxydante !

Attention, donc, surtout lorsque plusieurs compléments sont consommés simultanément et/ou sur le long terme ! D’autant que certains contiennent de véritables doses de cheval, qui dépassent l’entendement : sur internet, il est facile de trouver des comprimés de 2000 mg de vitamine C... alors que les AJR pour un adulte sont estimés à 110 mg/jour.

A boire et à manger

Autre difficulté posée par les compléments alimentaires : il est compliqué de s’y retrouver dans la masse des produits disponibles sur le marché, tant la qualité et la composition peuvent varier. A moins d’avoir de bonnes connaissances en (bio)chimie, autant dire qu’il s’agit pratiquement d’une mission impossible ! Par exemple, ce n’est pas parce que deux produits affirment contenir du magnésium qu’ils seront équivalents.  » La plupart des minéraux sont vendus sous forme de sels, c’est-àdire associés avec un ou plusieurs éléments [sous forme d’oxyde, de chlorure, etc.], détaille Serge Pieters. Les molécules peuvent donc être différentes d’un produit à l’autre et, suivant les cas, les minéraux seront mieux ou moins bien tolérés/assimilés. « 

Compléments alimentaires, pas des bonbons !
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Par ailleurs, les composants d’un complément alimentaire peuvent entrer en interaction/compétition avec d’autres ingrédients, des médicaments ou l’alimentation. Le fer et le zinc ne peuvent pas être assimilés en même temps, le millepertuis contrecarre les effets des médicaments anticoagulants, tandis que le cuivre diminue l’absorption de fer (au contraire de la vitamine C)...

A tout cela, il faut ajouter que certains compléments alimentaires sont carrément déconseillés en cas de pathologies comme le cancer – la Fondation contre le cancer a publié une mise en garde sur son site -, ou de certains comportements comme le tabagisme. Une étude menée auprès de fumeurs bénéficiant d’une complémentation en vitamine A a ainsi dû être arrêtée en urgence, car elle se traduisait par une hausse importante des cas de cancer du poumon, par rapport au groupe de fumeurs sous placebo.

Vraiment utiles ?

Sous des dehors simples, les étiquettes flashy des compléments alimentaires recouvrent donc une grande complexité, à ne pas prendre à la légère. Qu’on ne s’y trompe ? pas : les compléments alimentaires peuvent être utiles dans certaines situations particulières, pour juguler certaines carences médicalement objectivables ou lors de troubles transitoires (grossesse, passage d’une alimentation carnée à une alimentation végétarienne, etc.). Mais en cas de suspicion de carence (dont les symptômes sont souvent diffus : fatigue, mauvaise immunité, nervosité, etc.), il est conseillé de demander un avis à un professionnel de la santé (médecin, pharmacien) avant de se lancer dans une cure temporaire de compléments. En tous les cas, l’automédication et l’achat de produits sur internet ne sont pas recommandés.

Reste une question : quid, si l’on est en parfaite santé et qu’on cherche simplement à booster son organisme avec l’un ou l’autre petit complément ? S’il est pris sans contre-indication, en respectant la posologie et les conseils d’un professionnel, les études les plus récentes ne relèvent pas d’effets négatifs sur le long terme... sans pour autant épingler de bénéfices flagrants pour la santé. Une alimentation équilibrée suffirait à obtenir tous les nutriments dont nous avons besoin...

(1) Liste des AJR disponibles via www.health.belgium.be > cliquer sur la loupe > AJR > Recommandations nutritionnelles pour la Belgique.

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