Âge, sexe ou empathie... Comment bien choisir son médecin

Les 50+ n’accordent pas beaucoup d’importance au fait que leur médecin soit un homme ou une femme. Sauf s’il s’agit d’un problème intime. Un sur trois se sent plus à l’aise face à un médecin du même âge. Telles sont les conclusions d’un sondage mené par Plus Magazine auprès de 4.599 lecteurs.

Le fait de s’adresser au bon médecin a un impact énorme sur la santé et le processus de guérison. Car il faut pouvoir, dans l’intimité d’un cabinet médical, se mettre à nu dans tous les sens du terme. Taire des informations et ne pas oser de questions par pudeur est une très mauvaise idée : cela risque de fausser le diagnostic et le traitement. Or, pour parler à coeur ouvert, il faut se sentir en confiance. Nous avons interrogé un panel de 4.599 lecteurs pour savoir si l’âge et le sexe du médecin les influençaient au moment de choisir un généraliste ou un spécialiste. Et reste-t-il, lors de la consultation, des questions taboues ?

HOMME/FEMME?

62% des 50 + ont un médecin généraliste masculin, alors que 38 % consultent une femme. Si on prend en compte le sexe du sondé, on voit que 72 % des hommes vont chez un généraliste et que 44 % des femmes vont chez une généraliste. Pourtant, seul un quart des personnes interrogées ont consciemment réfléchi au fait d’avoir un médecin homme ou femme. Lorsque ce critère a influencé leur choix, la majorité avoue préférer un docteur de même sexe: 64 % des femmes donnent la préférence à une femme et 68 % des hommes à un homme.

« Cet élément joue toujours un rôle au sein de la relation patient-médecin. C’est compréhensible, mais ce serait dommage que la médecine gynécologique devienne le domaine quasi exclusif de femmes et, à l’inverse, que les consultations relevant du champ masculin (prostate, par ex.) soient l’apanage de médecins hommes, estime le Dr Dirk Avonts, rédacteur en chef de Huisarts Nu et médecin. Voici quelques années, un questionnaire a été soumis à des étudiants en dernière année d’études de médecine. Résultat: seule une petite minorité de futures diplômées avaient déjà pratiqué un toucher de prostate et peu d’étudiants masculins avaient eu l’occasion de pratiquer en gynécologie. Si on ne met pas un terme à cette tendance, on se trouvera dans une situation où les hommes n’auront plus aucune expertise en médecine des femmes, et vice versa. On aurait tort de se crisper sur la question du genre: les soins de santé n’ont rien à y gagner. Ce qui compte avant tout, c’est l’expertise du médecin. Les patient(e)s ont besoin d’une chose: savoir qu’ils (elles) sont en de bonnes mains. »

1 SONDÉ SUR 4 CHOISIT VOLONTAIREMENT UN GÉNÉRALISTE HOMME OU FEMME.

Bieke Purnelle, directrice de l’asbl Rosa (Centre d’expertise sur le genre et le féminisme), trouve très positif le fait que, pour la majorité des sondés, le genre ne joue effectivement aucun rôle dans le choix du médecin. « S’il y a un domaine dans lequel nous devons progresser en Belgique, c’est celui de la médecine genrée. En effet, une même pathologie peut se manifester très différemment chez une femme et un homme. Or, les tests scientifiques se font en majorité sur des hommes: les diagnostics et les traitements sont donc rarement adaptés aux femmes. Les médecins comme les patients doivent y être sensibilisés. »

Âge, sexe ou empathie... Comment bien choisir son médecin

LES PROBLÈMES INTIMES

Chez les femmes, le souhait de trouver un médecin de même sexe s’explique assez logiquement: elles sont près de 7 sur 10 à se sentir plus à l’aise avec une femme médecin dès qu’il s’agit d’un contrôle des seins, du ventre, etc. Les éventuels soucis psychologiques (19 %) sont également plus faciles à formuler face à une femme. Idem pour les problèmes relationnels (16 %). « Certaine patientes préfèrent consulter une femme pour tout ce qui relève de la sphère intime, alors que cela compte moins pour le reste, confirme Servaas Bingé, généraliste. Dans notre cabinet mixte, nous en sommes conscients et nous en tenons compte. Quand je sens que ça a de l’importance, je demande à ma patiente si elle ne préfère pas consulter une de mes consoeurs. L’important, c’est de pouvoir s’ouvrir à son médecin, et de ressortir du cabinet avec des réponses et une solution. »

Nombre d’hommes (37 %) avouent préférer évoquer les sujets intimes avec un médecin de même sexe. « Je suis en traitement depuis des années chez un endocrinologue et un neurologue masculins. J’ai l’impression de parler plus librement des problèmes typiquement masculins avec un homme, témoigne un lecteur. Mon généraliste (que je consulte toutes les trois semaines) est aussi un homme. Pendant des années, j’ai eu une généraliste mais il me semble qu’un homme se montre plus compréhensif face à mes problèmes. »

ÉCOUTE ET EMPATHIE

Les 50+ attribuent aussi – peut-être à tort – d’autres qualités aux femmes médecins. Un sur trois est convaincu qu’une femme sera plus empathique et aura une approche plus personnalisée. Un sondé sur quatre attribue également aux femmes médecins la capacité à mieux cerner une situation et écouter son patient. Une attitude plus autoritaire reste associée aux médecins masculins dans l’esprit d’un quart des sondés.

 » Je suis persuadée qu’il y a des différences d’approche, abonde le Dr Lieve Van Ermen, 70ans, cardiologue et médecin du travail. Les femmes médecins de ma génération passaient plus de temps avec chaque patient, se montraient plus empathiques et tentaient d’aller au fond des choses. Les hommes, eux, gardaient plus de distance, ce qui n’invite évidemment pas à entrer dans des considérations trop personnelles. J’ai souvent recueilli des propos intimes de la part d’hommes et de femmes. Cela pouvait aller d’abus sexuels subis dans l’enfance jusqu’à des problèmes de couple ou des soupçons d’inceste, des informations que mes patients n’auraient pas pu révéler à leur conjoint ou à un médecin généraliste. J’étais bien souvent leur seule oreille. J’ai donc dû m’efforcer de soutenir et d’aider mes patients au mieux. Mais j’avoue que certains cas peuvent être lourds à porter. »

PRÈS D’1 SONDÉ SUR 2 PENSE QU’IL Y A DES DIFFÉRENCES ENTRE UN MÉDECIN JEUNE ET UN AUTRE, HOMME OU FEMME, PLUS ÂGÉ.

LE MÊME ÂGE

74 % ont un généraliste qui a plus de 40ans. 48 % estiment qu’il y a une différence entre médecins jeunes et plus âgés. Les trois quarts des 50+ sont suivis par un médecin un peu plus âgé. 8 sur 10 affirment ne pas avoir fait attention à l’âge de leur médecin au moment de le choisir. Mais un tiers déclarent se sentir mieux face à un médecin qui a plus ou moins leur âge. « La question de l’âge compte nettement plus que le fait de s’adresser à un ou une généraliste, assure Dirk Avonts, médecin. Nombre de mes patients ont vieilli avec moi, alors que les jeunes préfèrent un médecin qui a plus ou moins leur âge. Cela dit, il ne faudrait pas surestimer ce facteur. C’est un peu comme le choix d’un restaurant: on entre plus volontiers dans un établissement fréquenté par des gens de son âge. Mais si un patient plus âgé se rend compte que son jeune médecin est tout à fait compétent, cela suffit à gommer la différence d’âge. »

Âge, sexe ou empathie... Comment bien choisir son médecin

Servaas Bingé, lui, estime que l’expérience de vie a son importance.  » J’ai 38 ans et mon regard a pas mal évolué par rapport à la fin de mes études. Certains sujets me font réagir autrement, je ne donne plus forcément les mêmes conseils qu’avant... Surtout pour au niveau psychologique ou relationnel. J’ai, moi aussi, vécu quelques épreuves. Ces expériences me poussent à aider mes patients autrement. Je n’ai pas peur de puiser des exemples dans ma vie personnelle. Du coup, mes patients se sentent moins seuls, mieux compris, et ils se rendent compte que leurs problèmes ne sont pas insurmontables. »

L’expérience joue effectivement un rôle, estime Mark, un lecteur. « Il y a quelques années, quand mon marqueur de prostate (PSA) a subitement augmenté, mon jeune médecin m’a assuré qu’il n’y avait rien d’alarmant. Quelques mois plus tard, le PSA avait triplé, mais, selon lui, il n’y avait toujours aucune raison de s’en faire. Je restais dans la norme pour un homme de 65ans. Or, mon médecin avait perdu de vue le fait qu’un triplement du chiffre était bel et bien alarmant. J’aurais dû consulter d’urgence un urologue. On aurait alors pu détecter mon cancer de la prostate à un stade précoce. Dans l’intervalle, j’ai commencé à avoir de fortes douleurs à l’aine et à la fesse. D’après une consoeur de mon médecin, généraliste au même cabinet, c’était un problème de hanche. Elle m’a conseillé de consulter un orthopédiste et un kinésithérapeute ! Finalement, un spécialiste a conclu que mes douleurs résultaient d’un cancer de la prostate qui avait eu le temps d’essaimer autour de l’os. Un diagnostic d’autant plus effrayant que j’étais victime d’une erreur de jugement de la part d’un jeune médecin et de sa consoeur. Je pense que ni lui, ni elle n’avaient assez d’expérience en matière de problèmes de santé masculins liés à l’âge. Depuis, mon jeune généraliste m’a présenté ses excuses et m’a fort soutenu psychologiquement. J’ai retrouvé toute ma confiance en lui ! Mais pas en ce qui concerne sa consoeur... « 

POUR LES 50 +, L’IMPORTANCE D’UN MÉDECIN HOMME OU FEMME SE POSE SURTOUT POUR LES CONSULTATIONS INTIMES. SEULE UNE MINORITÉ DE NOS SONDÉS DÉCLARENT S’ÊTRE DÉJÀ SENTI GÊNÉS FACE À LEUR MÉDECIN.

UN SENTIMENT DE GÊNE

Avez-vous déjà ressenti de la gêne à consulter votre médecin pour un problème bien particulier ? Non, à en croire nos lecteurs. Seuls 14 % des sondés disent s’être déjà sentis mal à l’aise. Les 50 + n’ont quasi jamais reporté de consultation sous prétexte d’une gêne en présence de leur médecin. « Ce genre de tabous appartient au passé, y compris parmi la patientèle plus âgée, confirme le généraliste Servaas Bingé. J’aborde de la même manière un problème ORL qu’un trouble de l’érection ou des symptômes liés à la ménopause. Cette façon de faire met le patient à l’aise et incite à dialoguer naturellement. « 

Gynécologie: une femme svp !

Plus de 50% des femmes optent pour une femme gynécologue. Chez les femmes de 50 à 60ans, ce chiffre monte à 60 %. Près de 4 sur 10 pensent qu’une gynécologue sera plus compréhensive et près de la moitié disent se sentir plus à l’aise face à une femme pour aborder des sujets intimes.

« J’ai toujours eu un gynécologue très compréhensif, mais lorsqu’il a pris sa pension, j’ai continué avec son jeune remplaçant, raconte Liliane, une lectrice. J’étais en pleine ménopause. Quand je lui ai parlé de mes bouffées de chaleur et de mes sautes d’humeur, il ne m’écoutait pas vraiment. Lorsque qu’il m’a prescrit un traitement hormonal de substitution, j’ai décidé de consulter une femme pour un second avis. Elle m’a prescrit le même traitement mais après une consultation pleine de bienveillance et d’écoute ! « 

« Les patientes apprécient surtout d’être prises en charge par un médecin expérimenté, qu’il s’agisse d’une femme ou d’un homme, particulièrement à la période de la ménopause, en cas de cancer ou d’intervention complexe, raconte un gynécologue. Il faut bien sûr que le courant passe, ce qui met la patiente en confiance. Mais c’est diffcile à prédire ». Le Dr Sevilay Altintas, professeur d’oncologie médicale (UZ Antwerpen), partage cet avis. « Un médecin considère les seins et l’utérus comme des organes mais, pour les patientes, toutes sortes de sentiments y sont également très liés. Par pudeur, certaines femmes ont sans doute un peu de mal à confier leurs problèmes de ménopause à un jeune gynécologue plutôt qu’à une femme spécialiste. Elles se disent souvent qu’une femme vit en partie les mêmes choses et les comprendra donc mieux.

Lors d’une consultation, le patient apprécie que le médecin sache se mettre à sa place. D’où cette question qu’on me pose souvent :  » Docteur, à ma place que feriez-vous? « . Une femme pourra s’exprimer plus facilement face à une autre femme. Il ne faut pas sous-estimer la question de la pudeur et des sentiments.

En oncologie, il importe en général peu que le médecin soit un homme ou une femme, sauf peut-être en gynécologie, où les tumeurs concernent le sein et le col de l’utérus. Certaine patientes disent ressentir plus d’empathie et de compassion de la part d’une femme médecin. »

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