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12 questions sur les intestins

Nos intestins méritent toute notre attention car ils jouent un rôle majeur dans notre état de santé !

Nos intestins régissent de nombreuses fonctions, de la digestion à nos états d’âme. Mais comment reconnaître les signaux qu’ils nous envoient ? Nous avons posé la question au Dr Luc Colemont, gastro-entérologue et fondateur de Stop CancerCôlon et au Dr Danny De Looze, gastro-entérologue à l’UZ Gand.

1 Existe-t-il un transit idéal ?

Dr Colemont :  » C’est un mythe de croire qu’il faut aller à selle une fois par jour. A chacun son rythme. Ce sont les intestins qui décident. De temps à autre, le système se grippe. Exemple typique : les vacances. Nous sommes nombreux à constater une modification de notre transit suite à un déplacement fatigant, lors duquel on a moins bu d’eau, moins bougé, mangé irrégulièrement ou différemment, subi du stress, etc. Mais le rythme normal reprend de lui-même en quelques jours. Ce n’est que si on remarque des problèmes de transit réguliers – avec alternance de diarrhée et de constipation, ou un amaigrissement soudain -et que cela dure plus de six semaines, que cela peut indiquer un problème sous-jacent.

Les occidentaux consomment trop peu de fibres alors qu’elles sont indispensables à la bonne santé de la flore intestinale.

Dr De Looze :  » Le réflexe orthocolique nous pousse à aller aux toilettes lorsque nous nous levons, nous buvons un café, nous marchons. Le réflexe gastrocolique, lui, envoie un signal au côlon que de nouvelles réserves arrivent et que les anciennes peuvent être expulsées lorsque notre estomac se remplit. C’est pourquoi de nombreuses personnes doivent aller aux toilettes après un repas. Ce que vous expulsez n’est pas le repas fraîchement mangé, mais ce que vous avez digéré depuis longtemps. »

2 Que peut-on faire pour améliorer le transit ?

Dr De Looze :  » Il faut boire beaucoup d’eau, de préférence pendant les repas. Cela permet aux fibres d’absorber l’eau et de faciliter le transit. Chez certains, la caféine peut être légèrement stimulante. Gare à l’alcool qui, lui, a un effet déshydratant !

Faire du sport et manger des fibres est également très important pour un bon transit. Parmi les aliments riches en fibres, citons les fruits, les légumes, les céréales complètes et les légumineuses. L’apport quotidien recommandé est de 30 g de fibres pour une femme et de 40 g pour un homme. Si vous avez tendance à être constipé, manger deux kiwis par jour peut déjà faire une grande différence.  »

3 Quelles sont les causes de la constipation ?

Dr Colemont :  » La constipation peut prendre diverses formes. Il s’agit parfois d’un problème de transit, par exemple si on ne va à selle que tous les 5 ou 6 jours, ou parfois d’un problème d’évacuation, à cause de selles trop dures ou une combinaison des deux. Il suffit d’oublier de boire suffisamment d’eau, de consommer trop peu de fibres ou de rester trop sédentaire... Parfois, la cause réside dans l’anatomie même : certains intestins présentent plus de circonvolutions que d’autres, ce qui allonge le trajet des selles et ralentit le transit.  »

4 Quand parle-t-on de problème chronique ?

Dr Colemont :  » Lorsqu’on se plaint de selles dures, qu’on va à selle moins de trois fois par semaine et que cela dure plus de trois mois. Dans un premier temps, il faut essayer d’adapter son mode de vie et ses habitudes alimentaires.

Si cela ne suffit pas, le médecin peut prescrire un laxatif, par exemple un gel à base d’huile de paraffine. Les préparations stimulant les intestins ne doivent jamais être prises en continu, car elles contiennent un actif qui peut rendre le gros intestin paresseux.  »

5 Quelles sont les fibres les plus intéressantes pour les intestins ?

Dr Colemont :  » Les Occidentaux consomment trop peu de fibres, alors qu’elles sont indispensables. Les fibres non-fermentescibles sont peu assimilées par les intestins mais absorbent beaucoup d’eau. Elles assouplissent les selles et accélèrent le transit. On en trouve dans les céréales et les aliments complets... Si vous êtes constipé, consommez du psyllium ou des graines de lin avec beaucoup d’eau. On a également besoin de fibres fermentescibles. Elles constituent une source de nutriments pour les bonnes bactéries intestinales qui les fermentent. On les trouve dans les légumes, les fruits, les fruits secs, etc.. »

6 De quoi la diarrhée peut-elle être le signe ?

Dr Colemont :  » La diarrhée devient problématique si elle se produit plus de 3 à 4 fois par jour et qu’elle dure 2 à 3 mois, surtout si, en plus, on perd du poids. Cela indique une mauvaise absorption des nutriments dans l’intestin grêle. Les causes de la diarrhée chronique peuvent être très diverses. Cela peut notamment indiquer une infection parasitaire ou la présence d’un germe pathogène, comme la salmonelle. Une autre cause possible de diarrhée est l’intolérance au lactose ou au gluten. Par ailleurs, il existe des médicaments qui, parmi leurs effets secondaires, provoquent la diarrhée. C’est le cas des antibiotiques, mais aussi certains médicaments contre le diabète. Le problème d’absorption des sels biliaires ou colite collagène (une maladie inflammatoire de la muqueuse du côlon), qui survient parfois chez les femmes d’une cinquantaine d’années, peut également provoquer des diarrhées à long terme. Ce n’est que dans des cas exceptionnels qu’il s’agit de quelque chose de grave, comme une tumeur.  »

12 questions sur les intestins
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7 Que peut-on faire contre les ballonnements ?

Dr Colemont :  » Lors du processus de fermentation et de digestion, les bactéries intestinales produisent des gaz. Une partie est réabsorbée par la paroi intestinale, une autre est évacuée lors de l’expiration et une dernière sous forme de vents. Tout le monde produit environ un litre de gaz par jour. Lorsque les bactéries intestinales provoquent trop de gaz l’air a du mal à s’échapper du côlon et on se sent ballonné. Un problème très gênant qu’on peut essayer de résoudre en mettant plus de fibres à ses menus et en mangeant plus lentement. D’autres remèdes possibles sont l’huile de menthe poivrée, qui a un effet calmant, idéale en cas de crampes, ou un médicament à base de siméthicone qui absorbe l’air dans les intestins.  »

8 Que se passe-t-il quand on a des crampes au ventre ?

Dr Colemont :  » Nos intestins sont constitués de différentes couches de muscles qui sont constamment en mouvement. Ces muscles se contractent pour pousser la nourriture et les selles vers la sortie. Lorsque les intestins sont trop stimulés, cela provoque des contractions ou des spasmes qu’on ressent comme des crampes douloureuses. Cela peut aussi s’expliquer par la présence d’un microbe dans un aliment ou une réaction d’hypersensibilité à un aliment particulier. Si les crampes reviennent régulièrement, il peut y avoir localement une grosseur qui gêne le passage. Le fait de se réveiller chaque matin avec des crampes et une sensation de ballonnement indique souvent un syndrome du côlon irritable.  »

9 Que faire en cas de présence de sang dans les selles ?

Dr Colemont :  » Il ne s’agit, en général, que d’une petite thrombose, c’est-à-dire une veine qui a cédé à l’extrémité du rectum. Cela peut se produire lorsqu’on pousse trop fort en allant à selle ou en cas d’hémorroïdes enflammées. On peut arrêter soi-même le saignement en s’allongeant sur le côté et en appliquant une compresse. On peut prévoir un contrôle chez son médecin, surtout si cela a tendance à se répéter.

Exceptionnellement, il peut s’agir d’un polype ou d’une tumeur en position basse. Un peu de sang sur le papier toilette ou dans le sous-vêtement est généralement dû à des hémorroïdes gonflées. Le surpoids, une alimentation trop épicée ou un excès d’alcool peuvent provoquer une inflammation, voire l’éclatement d’une veine, ce qui entraîne une perte de sang plus importante.  »

10 A quelle fréquence faut-il faire des analyses de selles en prévention du cancer du côlon ?

Dr Colemont :  » Les directives internationales recommandent de se faire tester tous les deux ans dès 50 ans. À Bruxelles, on peut se rendre à la pharmacie pour obtenir un kit de test. En Wallonie, la première fois, on doit consulter son médecin pour faire le test, ensuite il vous sera également envoyé par la poste. Ces mesures sont encore insuffisantes. On sait qu’un adulte sur six développera un cancer du côlon avant ses 50 ans. Je suis donc favorable à ce qu’on commence la dépistage dès 45 ans, comme le recommande d’ailleurs l’American Cancer Foundation ! Même après 74 ans, le test reste intéressant pour beaucoup de gens. On peut se rendre chez son généraliste ou acheter un test d’auto-évaluation chez le pharmacien. L’examen visuel se fait sous anesthésie légère, il n’est donc pas douloureux. Il n’y a aucune raison de ne pas le faire, car cela permet de détecter avec certitude tous les polypes et tumeurs. Avant le test, on prépare son côlon, trois jours à l’avance, en adoptant un régime pauvre en fibres. La veille au soir, on boit un liquide spécial pour vider les intestins. Pendant l’examen, une sonde flexible munie d’une caméra est insérée dans le rectum pour examiner tout le côlon de l’intérieur. La plupart des polypes peuvent être enlevés immédiatement. Au bout d’une demi-heure, tout est terminé, mais on n’est pas autorisé à conduire une voiture.  »

11 La coloscopie révèle parfois des diverticules. De quoi s’agit-il ?

Dr Colemont :  » Les diverticules sont des petits renflements sur la paroi extérieure du côlon, causés par un affaiblissement de la paroi musculaire. Ils se produisent fréquemment entre 50 et 60 ans. De l’intérieur, ils ressemblent à de petites fissures dans la paroi intestinale. Fissures qui risquent de retenir des selles, ce qui peut provoquer une inflammation (diverticulite). Il en résulte de minuscules perforations intestinales, qui provoquent parfois des crampes douloureuses et stimulent le péritoine. La douleur se manifeste généralement en bas à gauche de la dernière courbure du côlon. On prescrit le plus souvent des antibiotiques.

Si cela se répète souvent et que les diverticules ont l’air nombreux, on peut retirer la partie concernée du côlon. La diverticulose peut aussi être chronique. Ici, on ne parle pas vraiment d’inflammation, mais la personne ressent des douleurs abdominales continues et a des selles tantôt trop dures, tantôt trop liquides. En cours d’inflammation, on vous recommandera de manger peu de fibres. Mais dès que la situation se sera normalisée, mieux vaut, au contraire, passer à des menus riches en fibres.  »

12 Pourquoi le stress impacte-t-il si facilement les intestins ?

Dr Colemont :  » Cela s’explique par le lien étroit qui existe entre le cerveau et les intestins, d’ailleurs qualifiés de second cerveau. C’est une communication à double sens : le transit influe sur notre humeur et notre humeur influence nos intestins. En situation de stress, le cerveau envoie des signaux aux intestins.

Des expériences scientifiques l’ont clairement démontré. On a plongé les mains d’une cohorte de volontaires dans de l’eau glacée. Ce stimulus de douleur dans le cerveau a provoqué l’arrêt complet du transit et le côlon a réagi en se contractant totalement. Chez certaines personnes, le lien est plus développé que chez d’autres. Certains éléments indiquent aussi que la sensibilité intestinale diminuerait avec l’âge.  »

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