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Maximum 200 euros par semaine pour les jeux de hasard en ligne

Près de 40% du chiffre d’affaires de l’industrie du jeu est réalisé sur le dos des personnes souffrant de dépendance! La vie des joueurs compulsifs et de leurs proches est un enfer. La réglementation se durcit donc en Belgique.

Une limite de 200€ par semaine et par compte de joueur va être instaurée pour les jeux de hasard en ligne. Car les troubles liés aux jeux d’argent sont un véritable fléau en Belgique (voir plus bas « Des montagnes de dettes impossibles à rembourser », « L’abstinence totale, comme les alcooliques »).

Des dizaines de milliers de personnes et leur entourage ont vu leur vie brisée à cause de cette dépendance. Alors, pour lutter contre ce phénomène croissant, le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, annonce instaurer une limite de 200€ par semaine et par compte de joueur pour les jeux de hasard en ligne.

Techniquement, chaque semaine, un maximum de 200€ pourra être déposé sur le compte de joueur. Les joueurs qui le souhaitent pourront néanmoins demander que cette limite soit augmentée. Cette possibilité n’existe pas pour les joueurs fichés sur la liste des mauvais payeurs de la Banque Nationale. La limite de jeu sera obligatoire pour tous les jeux de hasard en ligne à partir du 20 octobre. Les règles qui l’entourent ont été fixées dans un arrêté royal, publié le 20 juillet 2022 au Moniteur belge.

C’était 500 €/semaine par joueur

Le gouvernement précédent avait déjà introduit une limite de jeu hebdomadaire globale de 500€ par joueur, toutes plateformes et tous comptes de jeu confondus. Mais, dans la pratique, cela n’avait pas vraiment été appliqué.

Alors, sera-t-elle efficace cette nouvelle mesure ? C’est ce que pense Van Quickenborne : « désormais, grâce à la limite de jeu de 200€ par semaine et par compte, il sera effectivement possible de mener à bien des contrôles efficaces. La Commission des jeux de hasard y veillera. L’arrêté royal entrera en vigueur le 20 octobre prochain. De quoi laisser le temps à la Commission des jeux de hasard, à la Banque Nationale et aux opérateurs de jeux de hasard de procéder aux modifications techniques nécessaires. » Concrètement ? « La limite de jeu ne pourra être augmentée qu’à la demande expresse du joueur et pour autant qu’il ne soit pas connu comme étant un mauvais payeur auprès de la Centrale des crédits aux particuliers de la Banque Nationale de Belgique. Pour l’obtenir, le joueur demandera cette augmentation par la voie électronique à son opérateur de jeu. L’opérateur de jeux notifiera la demande à la Commission des jeux de hasard. Dans les 3 jours, la Commission des jeux de hasard vérifiera si le joueur n’est pas fiché comme mauvais payeur dans le fichier de la Centrale des crédits aux particuliers. »

Des montagnes de dettes impossibles à rembourser

« Selon plusieurs études, entre 100.000 et 180.000 joueurs actifs dans notre pays sont aux prises avec un trouble lié au jeu, avance le cabinet du ministre Van Quickenborne. Parmi eux, 40.000 à 50.000 personnes seraient gravement dépendantes des jeux de hasard, avec des conséquences qui, dans de nombreux cas, sont incalculables. »

Un risque de suicide multiplié par 15

Et de rappeler « le pillage de la totalité du compte bancaire ou de celui des membres de la famille, des montagnes de dettes impossibles à rembourser au cours d’une vie, la négligence de la santé, l’isolement social et un risque de suicide multiplié par 15 ne sont que quelques exemples des conséquences désastreuses. Un joueur pathologique consacre en effet en moyenne 42 % de ses revenus mensuels au jeu. La liste des personnes qui se sont volontairement fait exclure auprès de la Commission des jeux de hasard parce que leur comportement de jeu était devenu problématique est impressionnante. Entre-temps, 41.700 personnes se sont déjà vu interdire l’accès aux jeux de hasard. »

40 % du chiffre d’affaires de l’industrie du jeu

Le fait que la situation de la dépendance au jeu soit problématique est étayé par des études montrant que le modèle de revenus de l’industrie du jeu est basé sur les personnes souffrant d’une dépendance et non sur les joueurs récréatifs. Certaines études montrent même que 40 % du chiffre d’affaires de l’industrie du jeu est réalisé sur le dos des personnes souffrant d’une dépendance au jeu. Il est nécessaire d’agir, d’autant plus que l’essor des paris en ligne ces dernières années a vu de plus en plus de personnes tenter leur chance, que les jeux de hasard sont devenus beaucoup plus accessibles et que l’âge moyen des joueurs ne cesse de baisser.

Nouvelle étape dans la lutte contre la dépendance?

Pour les autorités, ces règles font en sorte que, « d’une part, les personnes endettées ne se retrouvent pas dans une situation financière encore plus difficile, que les dépendances restent dans une certaine limite et qu’un seuil général est créé pour les mises importantes. D’autre part, les joueurs récréatifs peuvent toujours miser ce qu’ils veulent grâce à la possibilité d’augmenter la limite. Et à partir du 1er octobre 2022, les agences de paris seront également tenues d’enregistrer l’identité de leurs clients et de vérifier s’ils ne figurent pas sur la liste des personnes exclues. Si tel est le cas, l’accès à l’agence de paris leur sera refusé. Depuis février, les jeux de hasard dans les magasins de journaux sont également fortement limités. »

Reste que les joueurs pathologiques pourront toujours se tourner vers des alternatives comme les tickets de loterie à gratter, les solutions à l’étranger, les plateformes pirates à l’étranger, les bingos dans les cafés, les tournois de poker entre « amis » dans des salles illégales. Ils pourront toujours perdre le contrôle à coups de bluff et de quinte flush royale. Car quand un joueur perd, il veut absolument se refaire...

L’abstinence totale, comme les alcooliques

Le profil du joueur pathologique a souvent été tiré. Il s’agit généralement d’un homme célibataire âgé de 26 à 45 ans. Toutes les catégories sociales sont touchées. Ils sont nombreux à subir des troubles psychologiques comme de l’anxiété et la dépression. Il en découle une cascade de problématiques. Ces malades sont plus enclins à tomber dans l’alcoolisme et dans le tabagisme. Ils connaissent plus facilement les désagréments du surendettement. Quant à leur vie de famille, c’est souvent le naufrage. Car un joueur compulsif peut entraîner dans sa déchéance une dizaine de personnes proches comme la famille et même les amis/copains qui ont prêté de l’argent.

La solution ? À l’exemple des alcooliques anonymes, l’abstinence totale en matière de jeu est le seul moyen efficace pour échapper à cette drogue. Le jeu provoque une excitation, une poussée d’adrénaline, qui offre des sensations uniques. Le problème c’est qu’il faut trouver de plus en plus d’argent pour assouvir ses besoins. Cette quête finit par briser les liens familiaux et professionnels.

La clinique du jeu

Un joueur maladif sur sept connaît des troubles psychologiques comme de l’anxiété et subit des dépressions. Pour trouver de l’aide, il existe notamment la « clinique du jeu » du CHU Brugmann. Elle soigne les accros aux jeux de hasard. Son intervention peut aller jusqu’à l’hospitalisation en unité de sevrage cliniquedujeu.be (fr) ou gokkliniek.be (nl).

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