Le Bernina Express à l'assaut des montagnes suisses. © MYRIAM THYS

Voyage panoramique en Suisse

Le Bernina Express rouge vif se tortille dans un paysage féerique pour relier les sommets enneigés des Grisons en Suisse aux palmiers de la Méditerranée en Italie.

Il règne une certaine agitation dans la station de Filisur, le premier arrêt de notre aventure ferroviaire dans la plus belle région des Alpes suisses. Notre Swiss Travel Pass nous permet d’emprunter à volonté les lignes Bernina et Albula que partage le Rhätische Bahn. Cette ligne de chemin de fer légendaire débute à Coire (Chur en allemand), franchit deux cols de montagne en passant par une multitude de tunnels et de viaducs impressionnants avant d’atteindre son terminus dans la ville italienne de Tirano. Nous avons choisi d’effectuer ce parcours de 130 km, réputé un des plus spectaculaires du monde, tantôt en train, tantôt à pied.

UN PASSAGE PÉRILLEUX

Gruëzi! Un homme âgé nous salue et nous propose de faire la visite guidée de Filisur. « Avant la construction de la gare en 1909, personne ne s’aventurait jusqu’ici, raconte-t-il. Aujourd’hui, le village compte pas moins de quatre hôtels.  » Notre guide improvisé nous fait découvrir des maisons du XVIe et XVIIe siècle dans le plus pur style Engadine: façades en stuc blanc, fenêtres évasées et sgraffites. Un café pris sur une terrasse ensoleillée et nous voilà prêt à grimper les 10 km qui nous séparent de Bergün. Première halte: le viaduc de Landwasser, véritable chef d’oeuvre de 65 mètres de hauteur construit en 1901. Le tortillard rouge est d’une ponctualité irréprochable: nous venons à peine d’arriver au belvédère panoramique qu’il pointe le bout de son nez.

L'agréable ville de Bergün.
L’agréable ville de Bergün.© MYRIAM THYS

Nous longeons la rivière Albula jusqu’à Bellaluna, un ancien village de mineurs qu’on dit hanté. Après une traversée assez hasardeuse, nous voilà à la croisée des chemins, les pieds mouillés. Il commence à faire très chaud et les derniers kilomètres grimpent allègrement. À notre arrivée à Bergün en fin d’après-midi, le vin blanc suisse bien frais est particulièrement apprécié. Pour rester dans la thématique du train, nous visitons le musée des Chemins de Fer Albula pour tout savoir sur les prouesses d’ingénierie du Rhätische Bahn.

UNE ARCHITECTURE EXCEPTIONNELLE

Le tronçon Bergün-Preda est de loin le plus spectaculaire de la ligne rhétique grâce à son architecture à nulle autre pareille. Le train escalade pas moins de 400 mètres en 6,5 km seulement en multipliant les boucles dans les tunnels hélicoïdaux. À Preda, nous entamons une randonnée de 700 mètres de dénivelé en direction de Spinas. Nous découvrons un des plus beaux endroits d’Helvétie, le lac de montage de Palpuogna aux eaux cristallines. Le sentier continue à grimper dans le décor somptueux des Alpes des Grisons et nous avons l’impression d’être seuls au monde.

Impossible d’oublier le fil rouge de notre périple ne fût-ce qu’un instant: les convois rouge sang sillonnent continuellement le paysage verdoyant. Une fois passé le point le plus haut (2.466 m), le train entame sa descente vers Spinas et la station mondaine de Saint-Moritz. L’occasion de goûter la fameuse tarte aux noix d’Engadine chez Hauser, un établissement très chic où résonnent des notes de jazz. Outre les boutiques luxueuses, les cafés hors de prix et les célébrités qui fréquentent les lieux en toute discrétion, la station est célèbre pour son ambiance particulière et son splendide lac.

LA SALLE DE BAL DES ALPES

Nous décidons de nous rendre de Saint-Moritz à l’hôtel d’Alp Grüm en train et de faire le trajet retour à pied. Le hameau ne compte que quelques chalets et une gare qui fait aussi office d’hôtel. Alp Grüm cumule les records: c’est le point le plus haut de toute la ligne, la station la plus élevée des Grisons et le logement le plus original de notre périple.

Cap à présent sur le col de Bernina. Le tortillard traverse de pittoresques pâturages parsemés de vaches en direction de Lago Bianco et Lago Nero. Plus on approche des lacs, plus les nuages qui se reflètent dans les eaux bleutées et laiteuses sont grandioses. Un petit en-cas réconfortant et nous voilà requinqués pour marcher jusqu’à Diavolezza où un téléphérique nous amène directement à la grande salle de bal des Alpes. De l’énorme plateforme aménagée à 2.973 mètres d’altitude, la vue sur l’impressionnant glacier de Morteratsch et le massif de la Bernina est époustouflante. Le spectacle est encore plus féerique depuis le jacuzzi du spa aménagé une centaine de mètres plus haut.

Vue sur le Lago Bianco et le Lago Nero.
Vue sur le Lago Bianco et le Lago Nero.© MYRIAM THYS

Nous débarquons à Cavaglia pour admirer un curieux phénomène naturel: les marmites des géants. Le jardin des glaciers se trouve à 500 mètres seulement de la gare. Sous la forte pression constante de l’eau des glaciers, les pierres et le sable ont creusé dans la roche des cavités glaciaires, des « moulins ». C’est ainsi que cette région rocheuse au pied du massif de la Bernina est devenue une véritable oeuvre d’art naturelle.

D’ici, la randonnée tout en descente jusqu’à Poschiavo est une promenade de santé. Nous marchons vers l’Italie en sifflotant, le pied léger. Le bourg de Poschiavo regroupe des maisons bourgeoises et des palais italiens. Le quartier des Espagnols aux maisons luxueuses de riches commerçants de la vallée qui avaient fait fortune en Espagne au XIXe siècle est une des curiosités. Les pizzoccheri, la spécialité de la région (rien à voir avec la pizza), sont des pâtes à base de farine de sarrasin, mélangées à des pommes de terre, du chou et beaucoup de fromage. Délicieux mais plutôt lourd.

UN WAGON PANORAMIQUE

Le temps de faire le tour du lac de Poschiavo en train et nous voilà repartis en direction du viaduc circulaire de Brusio. Pour prendre de la hauteur, le convoi doit accomplir deux boucles de 100 mètres de diamètre chacune, une prouesse technique qui laisse tout le temps aux voyageurs d’admirer la beauté du paysage plutôt que l’obscurité d’un énième tunnel. Encore sous l’émotion suscitée par le viaduc emblématique, nous nous dirigeons vers notre ultime destination, Tirano, où le train caracole dans les rues le plus normalement du monde.

Tirano est une agréable petite ville italienne aux nombreux palais où règne un parfum de Méditerranée. Comme nous avons effectué à pied de nombreux tronçons du légendaire parcours ferroviaire à l’aller, nous décidons de faire le trajet inverse en train uniquement, cette fois dans le wagon panoramique accroché à l’extrémité du Bernina Express. Question de profiter pleinement, le temps de quelques heures, d’une des plus belles lignes de chemin de fer du monde.

Pratique

Y ALLER: Vol Swiss Air jusqu’à Zurich et train jusqu’à Chur.

RANDONNÉE 8 jours de randonnée avec nuitées, p.déj., railpass,etc. eurotrek.ch

INFOS myswitserland.com

Le train emprunte des viaducs vertigineux.
Le train emprunte des viaducs vertigineux.© MYRIAM THYS
Randonnée dans les chemins de montagne.
Randonnée dans les chemins de montagne.© MYRIAM THYS
La petite ville de Poschiavo.
La petite ville de Poschiavo.© MYRIAM THYS
Le lac de Palpuogna.
Le lac de Palpuogna.© MYRIAM THYS

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