LA CHRONIQUE DE GUY LEGRANDancien rédacteur en chef de Cash ! © FRANK BAHNMÜLLER

Votre argent va-t-il dévaluer ?

Il faut que vous le sachiez : certaines personnes envisagent de nous piquer un peu d’argent à l’intérieur même de notre portefeuille. Et ceci en toute légalité ! Il ne s’agit donc pas ici de vous mettre en garde contre une bande de pickpockets, mais de vous informer de l’inquiétante réflexion menée par deux cadres du Fonds monétaire international (FMI), qui est quand même la principale instance financière mondiale et non un club de joyeux fantaisistes. Ces personnes s’expriment à titre personnel, c’est vrai, sans l’aval de leur patronne Christine Lagarde. Pourtant, si on leur a permis de publier leur étude sur le blog du FMI, c’est qu’elle ne semble pas extravagante. Et c’est vrai qu’à défaut d’être sympathique, elle est en tout cas logique.

L’argent physique serait automatiquement dévalué au fil du temps !

Voici ce dont il s’agit. Les banques centrales maintiennent depuis plusieurs années les taux d’intérêt au plancher, manière très classique de soutenir la conjoncture économique en rendant le crédit bon marché. Avec plus ou moins de succès... Mais voilà que cette conjoncture faiblit à nouveau, un peu partout dans le monde et surtout en Europe. Ici, la croissance attendue cette année est de 1,3 % à peine; en automne dernier, on prévoyait encore 1,9 %. Comment relancer la machine ? Recette classique : abaisser les taux de 2 ou 3 %. Impossible, penserez-vous, puisqu’on se situe déjà à zéro. Mais oui, c’est possible : on les fixera à moins 2 % par exemple. Autrement dit, sur votre compte bancaire ou carnet de dépôt, on vous retirera 2 % chaque année.

Mais non, ce n’est pas possible, objectera-t-on une fois encore : si vraiment on en arrive là, le public va évidemment se ruer dans les banques pour retirer son argent sous forme de billets. Cela ne marchera donc pas ! Première solution : on supprime les pièces et billets. Difficile à décider et à mettre en oeuvre très vite, d’autant que si certains pays y sont quasiment prêts, la Suède notamment, d’autres tiennent encore beaucoup au cash, dont l’Allemagne.

Deuxième solution et c’est ici l’idée maîtresse de nos deux lascars du FMI : la création d’un double marché monétaire. Il y aurait d’un côté l’argent électronique, celui qui serait automatiquement ponctionné du taux d’intérêt négatif, et de l’autre l’argent-papier... qui serait, lui, dévalué au fil du temps. C’est là l’astuce : cet argent physique ne pourrait être déposé sur un compte – c’est-à-dire transformé en argent électronique – qu’après déduction de l’intérêt négatif. Avec un taux de -2 %, si vous déposez un billet de 100 ? à la banque 5 ans après instauration de la mesure, vous ne recevrez que 90 ? sur votre compte. Autant le dépenser, alors ? Raté, car c’est dans la même proportion qu’un commerçant devra demander un supplément de prix si le client paye en cash. Tout produit arborerait en fait deux prix : en monnaie électronique et en cash. Tout ceci n’est pour l’instant que de la science-fiction. Espérons qu’on en reste là !

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