Dirk Deraedt © FRANK BAHNMULLER

Vacances

Dans l’aile des soins intensifs d’un hôpital, les vacances sont traditionnellement synonymes de période calme. Le pic annuel et saisonnier des infections respiratoires est derrière nous depuis belle lurette. En outre, beaucoup de gens sont en vacances: ce n’est pas la période de l’année où on choisit de se faire opérer, en tout cas pour les interventions non-urgentes. Et ceux qui tombent malades se trouvent souvent à l’étranger et sont pris en charge dans une clinique locale. Pour les cardiologues qui travaillent en Espagne sur les « costas », l’été est souvent chargé. Dans d’autres services, l’agitation est plus constante tout au long de l’année. Ainsi, l’oncologie ne connaît pas de saisons, et la maternité continue heureusement à tourner à plein régime. Cela dit, en temps normal, il règne un certain calme dans les hôpitaux pendant l’été. Certains services sont même fermés. L’agenda du bloc opératoire est réduit, ce qui permet au personnel de souffler un peu, voire de profiter de congés bien mérités.

Avant d’avoir le temps de dire ouf, je suis en train de faire un massage cardiaque à l’homme qui s’est effondré...

Les vacances donc. Pour mes e-mails, je prévois une réponse automatique signalant que je suis absent. Il fait chaud.

Avant de sortir faire du shopping avec ma femme et notre petit garçon, j’enfile un bermuda, qui dévoile... deux jambes blanches comme des salsifis. Pas très cool, mais peu importe: bientôt je serai sur une île des Caraïbes, où le soleil au zénith fera monter mon hâle. Mais de manière prudente et non sans m’enduire de lotion, évidemment. Pas question de rapporter un mélanome en guise de souvenir! Un flacon de crème solaire indice 50 et nos passeports, voilà tout ce qui manque encore à nos bagages.

D’abord les passeports. Nous garons la voiture devant la maison communale. Ma femme attend dehors, notre fils dans les bras. Devant la porte d’entrée, j’aperçois un homme âgé qui promène son chien. Il est immobile. Son visage un peu gris est tourné vers moi, mais il n’a pas l’air de me voir. Les portes vitrées de la maison communale s’ouvrent et j’entre dans le hall. Quelque chose me dit de jeter un regard en arrière. Je vois l’homme s’agripper à un appui de fenêtre, puis s’effondrer sur le sol. Avant d’avoir le temps de dire ouf, je suis en train de lui faire un massage cardiaque. Ma femme appelle les urgences, puis vient m’aider. Un passant tient notre fils dans les bras. Une autre personne s’occupe du chien qui aboie désespérément.

Les urgentistes prennent le relai et s’activent à réanimer le patient. Son flux sanguin revient à la normale. L’homme est embarqué dans l’ambulance. Il se trouve que je connais le médecin urgentiste. « Merci, cher confrère », me lance-t-il, en refermant la portière du véhicule. « Et bonnes vacances! »

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