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Une chute comme dans les années 80?

Valeur sûre, l’immobilier est sous la menace de la remontée des taux. Les indicateurs avancés s’affolent déjà et rappellent un vieux scénario lorsque la valeur réelle des appartements avait fondu de plus de 30% en quatre ans.

Dans les chiffres, le marché immobilier semble plutôt bien résister. Selon le dernier baromètre des notaires, le nombre d’opérations a baissé de seulement 1,7% au cours des neuf premiers mois de l’année 2022. Et les prix ont poursuivi leur envolée: +7,6% pour les maisons et +3,4% pour les appartements. Toutefois, cette relative sérénité apparente masque de vives tensions.

La hausse des taux

Les demandes de crédits hypothécaires sont ainsi en chute libre selon les enquêtes de la Banque centrale européenne (BCE). En net, 64% des banques de la zone euro anticipaient ainsi un recul des demandes de prêts immobiliers au 4e trimestre 2022, comparable au printemps 2020 en plein confinement ou au second semestre 2008 durant la crise financière.

La principale raison de cette chute de la demande est la remontée des taux d’intérêt. La relation entre le marché de l’immobilier et les taux n’est en effet plus à démontrer. Plus le taux est élevé, plus la capacité d’emprunt des candidats acheteurs est limitée.

Imaginons un couple pouvant consacrer 1.200 ? à son emprunt hypothécaire suivant ses revenus. En mars 2022, le taux pour un crédit fixe à 20 ans était de 1,2% en moyenne selon Guide Épargne, soit une capacité d’emprunt de 255.933 ?. Au taux moyen de 3,4% renseigné en décembre 2022, le couple ne peut plus emprunter que 208.756 ?, soit 18,5% de moins.

La chute des années 80

Historiquement, la remontée des taux à partir de 1979 avait aussi déclenché la dernière chute de l’immobilier en Belgique. Les prix des appartements et des maisons d’habitation avaient ainsi baissé en 1981, 1982 et 1983 selon les données de Statbel. Le décalage par rapport à la montée des taux s’explique largement par la durée des transactions immobilières.

Au total, le prix des appartements avait baissé de 9,5% à 37.749 ? (de l’époque). Les maisons d’habitation (2 et 3 façades) et villas (4 façades) avaient connu un repli similaire. En tenant compte de l’inflation (galopante au début des années 80), la perte de valeur réelle dépassait les 30%.

Des prix élevés

L’autre argument plaidant aujourd’hui en faveur d’une correction immobilière est le niveau élevé des prix après l’envolée de la pandémie. Selon Stabel, les prix médians d’un appartement ou d’une villa (4 façades) en Belgique ont effet bondi de plus de 20% entre 2019 et mi-2022.

Sur la base de critères comme le niveau de prix ou l’endettement des ménages, le Comité européen du risque systémique (CERS) a averti du risque de vulnérabilités dans le secteur de l’immobilier résidentiel dans différents pays européens dont la Belgique (ainsi que le Luxembourg, les Pays-Bas et le Royaume-Uni notamment).

La chute des sociétés immobilières

En Bourse, où les investisseurs ont coutume d’anticiper les problèmes, ces menaces se reflètent déjà sur les cours des actions immobilières. L’indice européen des sociétés immobilières, le Stoxx 600 REITS, a ainsi perdu jusqu’à plus de 30% l’année dernière. Pour certaines, le plongeon a même dépassé les 50% comme VGP, spécialiste belge des entrepôts logistiques.

Même Vonovia, le géant allemand détenant pas moins 549.000 logements en Europe, a perdu jusqu’à plus de la moitié de son cours. Cette chute est toutefois en partie liée à son investissement dans son concurrent Adler, accusé de fraude comptable.

Selon une analyse du Fonds monétaire international (FMI), les prix de l’immobilier pourraient ainsi chuter au cours des trois prochaines années. Dans un scénario pessimiste, la baisse atteindrait 10% dans les économies avancées (comme l’Europe occidentale et l’Amérique du Nord).

En y ajoutant l’influence de l’inflation (qui dépasse les 10% sur 12 mois en Belgique), la perte de valeur est déjà réelle en 2022 et pourrait s’accentuer en 2023-2024.

Des opportunités d’achat, pas de vente

Est-ce que cela justifie de vendre précipitamment des biens de rapport que vous posséderez pour en racheter plus tard? Évidemment que non. Les seuls droits d’enregistrement (12% en Flandre ; 12,5% en Wallonie et à Bruxelles) dépassent la baisse redoutée des prix nominaux.

L’opportunité de conserver des biens immobiliers d’investissement dépend aujourd’hui surtout des réglementations environnementales. Les trois Régions ont déjà suspendu l’indexation des loyers des logements avec les pires labels énergétiques. La Flandre a instauré une obligation de rénovation pour les nouveaux propriétaires de logements avec un label énergétiques E ou F, ce qui n’est sans doute qu’un début.

Si cela ne vous rebute pas, la perspective de quelques années moins bonnes sur le marché immobilier pourrait vous offrir des opportunités d’achat.

L’immobilier coté en Bourse

Le durcissement des normes énergétiques s’ajoute à bien d’autres éléments à gérer pour le bailleur, comme la perception des loyers, les petits et gros travaux divers, les cautions, etc. En investissant dans une société immobilière, vous déléguez cette gestion à une entreprise professionnelle. Cela vous permet aussi de diversifier votre exposition dans différents segments et pays. Même en investissant dans des sociétés belges dont les dividendes ne sont soumis qu’au précompte belge de 30% (ou parfois 15%) et pas à une double taxation (pays d’origine et Belgique) comme les coupons de sociétés étrangères. Les analystes de Degroof Petercam ont revu leur conseil à la hausse sur de nombreuses sociétés immobilières en décembre dernier. Du côté belge, ils ont recommandé à l’achat différentes sociétés qui s’échangent aujourd’hui à un cours inférieur à la valeur actuelle de leur patrimoine immobilier:

? Aedifica (maisons de repos et cliniques)

? Cofinimmo (soins de santé, bureaux, commerces)

? Inclusio (logements sociaux)

? Xior (kots étudiants)

? Retail Estates (commerces)

? VGP (entrepôts logistiques)

Ces sociétés offrent de plus des rendements de dividende net de 4% à 6%, à l’exception d’Inclusio (3,2% net).

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