La maladie de Dupuytren est aussi connue sous le nom de la maladie du cocher. © getty images

Quand les doigts se replient

La maladie de Dupuytren provoque une flexion des doigts vers la paume de la main, rendant difficile voire impossible toute manipulation. Heureusement, il existe des traitements qui permettent de corriger ce problème handicapant.

Très courante, la maladie de Dupuytren touche davantage les hommes que les femmes. « On constate qu’un 50+ sur trois présente des bosses sur les doigts. Seul un sur dix ne peut plus étendre les doigts normalement. Les douleurs sont rares, sauf celles provoquées par certains traitements », explique Ilse Degreef, chirurgienne de la main et professeure à l’UZ Leuven.

Les causes de la maladie

La maladie est causée par un épaississement progressif du tissu conjonctif situé entre la peau et les tendons de la paume de la main qui s’accompagne de l’apparition de nodules, c’est-à-dire des durcissements ou des petites bosses. A un stade ultérieur, des brides fibreuses sous-cutanées se forment et tirent les doigts vers la paume. L’auriculaire et l’annulaire sont généralement les plus touchés.

« Les nodules peuvent ne pas évoluer mais peuvent tout aussi bien s’aggraver. Dans ce cas, les cellules cicatricielles produisent de plus en plus de collagène et de tissu conjonctif ce qui conduit à la formation et au développement de brides fibreuses. Il arrive aussi que les nodules disparaissent d’eux-mêmes. » Dans de nombreux cas, la maladie est héréditaire. Si votre père ou votre grand-père a développé la maladie, il y a davantage de risques qu’elle soit évolutive et/ou plus sérieuse.

« Il n’existe encore aucune mesure préventive contre la maladie de Dupuytren, souligne la Pr Degreef. On fait beaucoup de cas de la radiothérapie ou des rayons pour stopper le processus de durcissement mais il y a autant d’arguments pour que contre. En tout état de cause, les résultats des études disponibles à ce jour ne semblent pas très convaincants et cela sans compter que, sur le long terme, la radiothérapie pourrait avoir des effets inverses à ceux recherchés puisqu’elle provoque l’apparition de nouveaux tissus cicatriciels. »

Quels traitements?

« Nous ne traitons le patient que si les gestes du quotidien deviennent difficiles. Nous le guidons dans le choix du traitement en lui indiquant les conséquences possibles d’une intervention immédiate ou, au contraire, ce que peut lui apporter le fait d’attendre. » Traiter la maladie aussi rapidement que possible n’est pas nécessairement la meilleure option. « Nous espérons que ce sera le cas dans un avenir proche mais, à l’heure actuelle, aucune méthode n’offre une garantie de succès à 100% ni un résultat durable. La plupart des traitements sont plus ou moins efficaces mais les résultats à long terme restent très aléatoires. »

Il n’existe malheureusement pas (encore) de médicaments. « Les anti-inflammatoire sont utiles contre les bosses ou les douleurs. Des médicaments permettant de ralentir la maladie ou d’augmenter l’efficacité d’autres traitements sont à l’étude. »

Un type d’intervention a déjà fait ses preuves, du moins chez les patients qui la tolèrent et à condition que ce soit techniquement possible. Elle consiste à redresser les doigts et à poser une attelle. L’attelle – qui enserre un ou plusieurs doigts – doit être portée 24 heures sur 24 pour espérer que les doigts retrouvent leur position naturelle.

Une autre méthode consiste à sectionner les brides fibreuses qui se sont développées sous la paume de la main (aponévrotomie). « Cette technique se pratique à l’aide d’aiguilles que le chirurgien introduit sous la peau pour inciser les brides fibreuses jusqu’à ce qu’elles lâchent. En très peu de temps, le patient peut commencer à étirer doucement les doigts. Cependant, un risque limité de dommages nerveux ou vasculaires n’est pas à exclure. L’intervention peut aussi échouer lorsque les brides sont trop épaisses.

Si chez certains patients l’aponévrotomie permet d’éliminer définitivement le problème, ce n’est pas le cas pour ceux atteint de la forme héréditaire de la maladie, qui présentent un risque plus élevé de récidive. »

LES Infiltrations

Jusqu’à récemment, des infiltrations de collagénase offraient une alternative intéressante à la chirurgie. Ce produit dissout l’excès de collagène et fait disparaître les brides fibreuses en quelques jours à peine. « Il permettrait d’éviter beaucoup d’opérations mais, malheureusement, il n’est plus disponible chez nous car le laboratoire américain qui le produit le commercialise à un prix exorbitant. Nous avons bon espoir qu’un produit similaire, en cours de développement en Europe, pourra être rapidement mis sur le marché. »

Le traitement le plus invasif est celui la chirurgie de la main: les tissus conjonctifs atteints sont légèrement incisés par voie sous-cutanée. Parfois, les brides fibreuses sont simplement coupées. « Le but de ces opérations est de conserver la plus grande mobilité possible. Plus l’intervention est simple, meilleur est le résultat et plus le rétablissement est rapide. Dans les cas les plus graves, il faut enlever la peau pour pouvoir opérer et procéder ensuite à une greffe de peau.

L’amputation est le dernier recours mais elle s’impose quand le doigt rentre dans la paume et provoque d’intenses douleurs. Mais même la chirurgie ne garantit pas un résultat durable. Je mène actuellement des recherches pour affiner encore les techniques microchirurgicales afin d’augmenter les chances de succès. »

Pommades et kiné

L’efficacité des pommades à la vitamine E sur les doigts touchés n’a pas (encore) été scientifiquement prouvée. « Il ne faut pas les écarter d’emblée. Certains patients rapportent une sensation plus douce au niveau des mains. On obtient des résultats similaires avec des pommades anti-inflammatoires. C’est au patient de juger celle qui lui convient le mieux. »

« Des exercices, comme un léger étirement des doigts, ne sont pas recommandables dans tous les cas, souligne la Pr Degreef. Les cellules cicatricielles sous-cutanées réagissent à un étirement et, généralement, elles se contractent encore davantage. La kinésithérapie d’après traitement est certainement utile mais trop peu utilisée voire même sous-estimée. Or, des exercices permettent d’apprendre à bouger et étirer à nouveau les doigts. »

Ce sont surtout l'auriculaire et l'annulaire qui sont touchés.
Ce sont surtout l’auriculaire et l’annulaire qui sont touchés.
Le Pr Degreef, chirugienne de la main.
Le Pr Degreef, chirugienne de la main.

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