LA CHRONIQUE DE GUY LEGRANDancien rédacteur en chef de Cash ! © FRANK BAHNMÜLLER

Les pensionnés au paradis

Anecdote authentique : à un jeune garçon rentrant de sa première journée d’école primaire, les parents demandent :  » Et alors, c’était comment à l’école ?  » Et le gamin de répondre, avec un grand soupir :  » Oh-la-la, vivement la pension !  » Cet écolier eut ensuite davantage d’ambition, m’a-t-on assuré. Avait-il de ses grands-parents la perception d’une vie idyllique ? Bénéficier d’un revenu garanti sans (plus) devoir travailler, est-ce une définition du paradis ? Certes, la pension est un revenu de remplacement, souvent très inférieur au revenu professionnel qui a précédé. Par ailleurs, le fait de ne plus « travailler » est parfois assez relatif... Il reste que le statut de pensionné fait des envieux, auprès d’anciens collègues toujours au boulot, par exemple. Mais pas seulement : libres de leur temps mais également de leur lieu de vie, du moins en théorie, les pensionnés suscitent aussi des envies auprès de certains Etats du Sud de l’Europe qui, précisément, leur offrent le paradis.

A Malte et à Chypre, on peut même acheter la nationalité du pays !

Ce dernier aura-t-il les couleurs du soleil et la saveur de l’huile d’olive ? Peut-être, mais ce n’est pas le sujet : quand l’Italie et le Portugal promettent le paradis aux retraités de l’Europe du Nord, c’est sur le plan fiscal. En début d’année, Rome a ainsi instauré un impôt de 7 % à peine sur les revenus étrangers des pensionnés qui viendraient s’établir dans la Botte.

Une occasion en or d’aller couler des jours tranquilles en Toscane ? Non : cette région célèbre dans le monde entier n’a pas besoin d’attirer davantage de monde. Il s’agit de venir soutenir l’économie des zones défavorisées du Sud, ce Mezzogiorno toujours à la traîne. C’est un peu différent, même si ni la Sicile ni les Pouilles ne manquent de charme. Cet impôt-plancher est toutefois limité à 5 ans. En montrant l’exemple dès 2013, le Portugal s’était montré plus généreux : pas d’impôt pendant 10 ans. Plusieurs milliers de retraités, français en particulier, ont répondu à l’appel.

Paris s’en est d’ailleurs ému et a pris des mesures. Pourtant, cette carotte fiscale est-elle tellement choquante ? Il y a bien pire dans la grande offensive « Viens chez moi si tu es riche » menée par divers Etats pour faire rentrer de l’argent. Au Portugal comme en Grèce, on peut obtenir un permis de séjour moyennant investissement de quelques centaines de milliers d’euros dans le pays. Avantage pour les Chinois et les Russes, principaux amateurs : pouvoir ensuite circuler librement dans l’Union Européenne. A Malte et à Chypre, avec un débours d’un gros million, on peut même obtenir la nationalité du pays ! En regard de ces excès, comme du taux d’imposition misérable des géants technologiques américains, peut-on vraiment reprocher à Rome et Lisbonne d’appâter le (petit) retraité de chez nous avec un avantage très limité dans le temps ? N’est-il pas sympathique qu’on pense aussi à lui ? A chacun de juger...

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