1 Mode d'évaluation identique pour les donations mobilières et immobilières

Lors du décès d'un parent, les enfants doivent rapporter à la succession (remettre fictivement dans le patrimoine du défunt) les donations dont ils ont bénéficié par le passé. Imaginons que vous ayez donné à votre fils un studio d'une valeur de 100.000 ? et, au même moment, 100.000 ? en espèces à votre fille : ces deux donations seront ajoutées à vos avoirs au jour de votre décès pour former, ensemble, la masse successorale fictive. Pourquoi fictive ? Parce que ces donations ne font plus partie de vos actifs et qu'elles ne sont pas taxables. Pourquoi faut-il les ajouter ? Parce que c'est l'unique manière de mettre les héritiers sur un plan de stricte égalité et de ne pas léser les enfants de leur part réservataire, la partie de l'héritage à laquelle ils ont droit quoi qu'il arrive. Si vous laissez un capital de 200.000 ? à votre décès, on pourrait penser que, tenant compte des deux donations " rapportées ", la masse fictive s'élève à 400.000 ?.
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Lors du décès d'un parent, les enfants doivent rapporter à la succession (remettre fictivement dans le patrimoine du défunt) les donations dont ils ont bénéficié par le passé. Imaginons que vous ayez donné à votre fils un studio d'une valeur de 100.000 ? et, au même moment, 100.000 ? en espèces à votre fille : ces deux donations seront ajoutées à vos avoirs au jour de votre décès pour former, ensemble, la masse successorale fictive. Pourquoi fictive ? Parce que ces donations ne font plus partie de vos actifs et qu'elles ne sont pas taxables. Pourquoi faut-il les ajouter ? Parce que c'est l'unique manière de mettre les héritiers sur un plan de stricte égalité et de ne pas léser les enfants de leur part réservataire, la partie de l'héritage à laquelle ils ont droit quoi qu'il arrive. Si vous laissez un capital de 200.000 ? à votre décès, on pourrait penser que, tenant compte des deux donations " rapportées ", la masse fictive s'élève à 400.000 ?.Les choses ne sont pas aussi simples car les donations faites à vos enfants ne sont pas de même nature : l'une est immobilière, l'autre mobilière. Dans la législation actuelle, elles font l'objet d'une évaluation différente pour déterminer le montant de la succession. Pour ce qui concerne les biens meubles, c'est la valeur au jour de la donation qui est prise en compte. En d'autres termes, les 100.000 ? en espèces donnés à votre fille compteront toujours pour 100.000 ?, peu importe le nombre d'années entre le jour de la donation et celui de votre décès. En revanche, pour un bien immobilier, c'est la valeur au jour de votre décès qui est prise en considération. Imaginons que le studio qui valait 100.000 ? au moment de la donation en vaut 150.000 au jour de votre décès. Cela change tout puisque la masse fictive est portée à 450.000 ?. Chacun des enfants ayant droit à 125.000 ? (la moitié de 250.000 ?), votre fille peut réclamer 25.000 ? à son frère.La nouvelle loi successorale supprime cette différence dans l'évaluation des biens meubles et immeubles : les deux sont rapportés à la succession à la valeur qui était la leur au jour de la donation - soit, dans notre exemple, 100.000 ? pour chaque enfant - mais indexés (sur la base de l'indice des prix à la consommation) à la date du décès. Pourquoi cette indexation ? Pour que les enfants soient traités de manière égale si les donations n'ont pas été effectuées en même temps.Il n'existe pas de lois sans exceptions. Parmi les plus importantes, on relèvera la donation sous réserve d'usufruit : vos enfants reçoivent des biens meubles ou immeubles mais vous vous en réservez le produit. L'évaluation sera faite à la date du décès.Il faut également mentionner l'instauration d'un régime transitoire : si, pour des raisons qui vous appartiennent, vous ne souhaitez pas que la nouvelle loi s'applique aux donations consenties avant le 1er septembre 2018, vous avez la possibilité - jusqu'au 31 août 2018 - de faire une déclaration en ce sens devant notaire. L'ancienne loi restera d'application pour les donations que vous aurez effectuées par le passé.Dans le cas où vous n'auriez effectué de donation qu'à un seul de vos enfants, le législateur est parti du principe - dans la loi actuelle comme dans la nouvelle - qu'en dépit des apparences, vous aviez l'intention de traiter pareillement vos deux enfants. Si vous avez effectué un don de 100.000 ? à votre fils mais que vous n'avez pas eu le temps de faire de même pour votre fille, votre fils devra rapporter ce don à la succession et donc partager avec sa soeur. Pour favoriser un enfant en lui donnant plus qu'à un autre, vous devez explicitement mentionner qu'il s'agit d'une donation " hors part, avec dispense de rapport ". Si vous n'avez pas de descendants directs - enfants ou petits-enfants - et que vous avez déjà donné une partie de vos biens à un frère ou à une nièce par exemple, en vertu de la loi actuelle, ils doivent rapporter les donations dont ils ont bénéficié dans la succession de vos héritiers légaux, en l'occurrence, selon l'ordre de succession, vos autres frères et soeurs ou, à défaut, vos neveux et nièces, etc.Ce ne sera plus le cas avec la nouvelle loi. Un don à un frère, une soeur, un neveu ou une nièce sera toujours considéré comme un don " hors part " qui ne devra pas être rapporté à la succession. La nouvelle loi part donc du principe que vous souhaitiez effectivement favoriser un héritier en particulier.La réduction est une autre technique liée aux donations : elle garantit qu'on ne touche pas à la part réservataire des enfants. Avec la nouvelle loi, cette part ne sera plus aussi importante qu'actuellement. Aujourd'hui, deux enfants ont droit chacun à un tiers de la succession, quatre enfants ont droit - ensemble - aux trois quarts. La nouvelle loi stipule que, quel que soit le nombre d'enfants, la part réservataire ne s'élève plus qu'à la moitié de la succession, vous laissant la libre disposition de l'autre moitié. En d'autres termes, deux enfants ont droit chacun à un quart, quatre enfants chacun à un huitième. Mais ce n'est pas là que se situe le principal changement. Quand, aujourd'hui, on touche à la part réservataire de vos enfants parce que, par exemple, vous avez donné à votre filleul un appartement dont la valeur dépasse la moitié de la valeur de votre patrimoine, ce bien donné en nature doit retourner à la succession, en tant qu'appartement.La nouvelle loi change la donne : si leur part réservataire est amputée du fait de cette donation immobilière, vos enfants pourront effectivement réclamer la part qui leur revient mais pas l'appartement lui-même. Le même principe s'applique au rapport : il s'agira d'argent et non plus du bien en nature. De la même manière, en cas de réduction, l'évaluation des dons se fera sur la base de la valeur des biens au jour où ils auront été donnés, indexés au jour du décès. Aujourd'hui, la valeur prise en compte est celle au jour du décès.Au sein d'une même famille, tous les dons ne sont pas nécessairement identiques : si, pour certains, la preuve existe qu'il s'agit d'un don officiel, d'autres sont des dons cachés. Prenons un exemple. Vous avez quatre enfants. Vous avez fait à votre fille aînée un don manuel d'argent (pas de preuve) pour acheter un terrain et, plus tard, vous lui avez à nouveau donné de l'argent mais sous la forme d'un don bancaire (pour lequel il y a une preuve) pour l'aider à y construire une maison. Par ailleurs, vous avez vendu à votre plus jeune fille un appartement pour un prix dérisoire et qu'elle n'a même jamais payé. Votre fils aîné a reçu un terrain à bâtir. Enfin, votre plus jeune fils a reçu l'appartement des grands-parents quand ceux-ci ont déménagé dans une maison de repos. Pour tous ces dons - officiels et cachés - vous avez toujours scrupuleusement veillé à ce que chacun reçoive la même chose. C'est peut-être vrai dans les faits mais pas aux yeux de la loi. Car vous ne possédiez pas quatre appartements ou quatre terrains de même valeur. Dans de telles situations, il aurait été utile d'établir des pactes successoraux (interdits jusqu'ici).La réforme les autorisera pour autant que vous vous adressiez à un notaire. Il ne suffira donc pas que parents et enfants se réunissent autour d'une table pour discuter du futur héritage et se mettent d'accord sur qui héritera de quoi. La nouvelle loi a prévu deux types de pactes : le pacte successoral global et le pacte successoral ponctuel.Un pacte global ou familial vous permet de prendre, en concertation avec vos enfants, toutes les dispositions pour votre succession. Ensemble, vous comparez les donations et les avantages dont chacun a bénéficié et décidez si chacun a été traité équitablement. Si tel est le cas, la signature du pacte assurera qu'aucun d'eux ne reviendra sur les donations effectuées par le passé.Si tous les enfants ne sont pas disposés à conclure un pacte global, vous pouvez envisager un pacte ponctuel. Exemple : dans une famille recomposée, des enfants pourraient consentir à ce que leur père fasse une donation à l'enfant de sa nouvelle compagne, malgré l'impact sur leur propre part réservataire. Autre exemple : un pacte ponctuel peut servir à fixer définitivement la valeur d'une donation. Il était déjà possible de le faire dans l'acte de donation lui-même mais, dorénavant, les cohéritiers peuvent convenir de la valeur à donner à une donation via un pacte successoral ponctuel.