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Le monde virtuel devient réalité

Thème populaire de la science-fiction dans les années 90, le métavers est aujourd’hui une réalité pour des dizaines de millions de personnes.

En octobre dernier, le géant des réseaux sociaux Facebook a changé de nom en Meta, en référence au métavers ou monde virtuel. Si beaucoup ont soupçonné Mark Zuckerberg de chercher à faire diversion après une série de polémiques, la stratégie d’entreprise est réelle.

L’échec second life

Ce n’est pas la première fois que cette idée est lancée. Dès 2003, Linden Lab faisait le buzz avec le lancement de Second Life, un logiciel permettant aux utilisateurs d’incarner des personnages virtuels dans un monde entièrement numérique. Malgré la forte médiatisation et l’intérêt d’entreprises, Second Life n’est jamais parvenu à s’imposer, même s’il existe toujours.

Parmi les nombreuses raisons de cet échec, citons notamment une prise en mains difficile, des graphismes complexes, des graphismes saccadés, une expérience shopping en 3D difficile, une monnaie virtuelle (le Linden $) n’inspirant pas confiance. Si les technologies actuelles permettent aujourd’hui de surmonter plusieurs de ces obstacles, on ne peut dire que les casques de réalité virtuelle imaginés par Meta sont devenus monnaie courante.

Mais les pronostics sont ambitieux. Les analystes de Bloomberg Intelligence ont estimé que le métavers, (500 millions $ en 2020), devrait représenter un marché de 800 milliards $ en 2024. Brian Nowak, analyste chez Morgan Stanley, évoque pour sa part un potentiel à long terme de 8.000 milliards $ aux États-Unis.

Numérique authentique

Les spécialistes mettent notamment en avant le développement des non fungible token, ou NFT. Basés sur la technologie blockchain et réputés inviolables, ces jetons désignent une sorte de fichier numérique auquel un certificat d’authenticité a été attaché.

Les NFT bousculent déjà le marché de l’art, permettant de certifier des oeuvres numériques ou de faciliter la copropriété d’oeuvres physiques. En décembre, une vente de NFT de l’artiste anonyme PAK a totalisé plus de 91 millions $. Les spécialistes soulignent que les NFT permettent de combiner l’achat d’une oeuvre et l’appartenance à une communauté numérique et/ou dans la vie réelle.

Les NFT sont aussi au centre des nouvelles villes virtuelles où plusieurs parcelles se sont vendues pour plus d’un million $ ces derniers mois. Notamment sur Decentraland qui a fait parler d’elle en début d’année à la suite de son partenariat avec l’Open d’Australie de tennis, également organisé en virtuel.

L’organisation a de plus mis en vente 6.776 NFT représentant chacun une balle de tennis numérique unique (couleur, texture, forme) et un carré de 19 cm de côté d’un terrain de tennis. Si l’un des 11 plus beaux points du tournoi atterrit dans la zone en question, l’acheteur du NFT pourra recevoir la balle physique utilisée lors de ce match dans un étui exclusif.

Les marques sont prêtes

Les entreprises multiplient déjà les initiatives. Gucci a vendu des sacs virtuels, dont certains plus chers que dans leur version physique. Nike a annoncé en novembre son projet Nikeland sur Roblox (voir plus haut). Budweiser, célèbre marque du géant brassicole AB InBev, a mis en vente une collection inédite de 1936 cannettes numériques uniques sous la forme de NFT. Charli Cohen et Pokémon se sont associés à la chaîne britannique Selfridges pour ouvrir une boutique sur Electric City, la ville virtuelle dédiée au shopping de Yahoo. Dyson a ouvert un show-room en réalité virtuelle sur Oculus Lab App pour permettre de découvrir et de tester ses produits en vue d’un achat physique. Republic Realm se positionne déjà en société immobilière virtuelle, achetant des terrains bien situés dans les mondes virtuels.

Gucci a vendu des sacs virtuels, dont certains plus chers que dans leur version physique.

Quelles opportunités?

L’avenir virtuel se joue-t-il avec un casque sur la tête? Pas forcément. L’immersion fantasmée par Mark Zuckerberg, ou Steven Spielberg dans la dystopie Ready Player One, n’est qu’une proposition de métavers. De nombreux autres mondes virtuels moins immersifs existent.

Parmi les acteurs les plus actifs, on retrouve les éditeurs de jeux vidéo: Epic Games avec sa célèbre franchise Fortnite, la plateforme d’origine danoise Unity Technologies, Take Two (Grand Theft Auto) a annoncé le rachat du spécialiste des jeux mobiles Zynga pour 11 milliards $ afin de renforcer son offre métavers. Le plus avancé est toutefois Roblox. Vous ne connaissez probablement pas cette plateforme lancée en 2006 et cotée en Bourse depuis début 2021, mais vos éventuels petits-enfants si. Devenue un véritable phénomène aux États-Unis, deux tiers des 9-12 ans y jouant, puis dans le reste du monde, la plateforme accompagne aussi ses utilisateurs qui grandissent.

Son point fort est sa communauté. Roblox compte 9,5 millions de développeurs – ayant mis au point 40 millions de jeux- et 50 millions d’utilisateurs quotidiens, pouvant jouer ou discuter ensemble. Cette communauté virtuelle attire les marques: Gucci, Nike, Adidas, Netflix, LOL, Lego... Ce qui devrait générer une nouvelle source de revenus à côté de la vente de Robux permettant d’acheter des jeux/options payants et de personnaliser son avatar. David Baszucki, cofondateur et CEO de Roblox, cible aussi la musique et l’éducation (ayant déjà développé sa propre formation de programmation en ligne).

Brian Nowak estime qu’Alphabet (Google) a aussi toutes les cartes en main pour s’imposer dans le métavers grâce à Android (système d’exploitation de 70% des smartphones dans le monde) et plusieurs acquisitions ciblées ces dernières années. Parmi les fournisseurs des métavers, les spécialistes épinglent Matterport, spécialiste des données spatiales permettant notamment de numériser des bâtiments, ou Nvidia, leader des puces graphiques.

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