Bea Cantillon © BELGAIMAGE

« Impératif d’augmenter la pension minimum »

Le gouvernement précédent a voulu affiner le lien entre travail et pension. Mais qu’en est-il alors que la croissance et l’emploi sont mis à mal par la crise du Covid? Nous avons posé la question à Bea Cantillon, professeur à la faculté de sociologie de l’Université d’Anvers, qui jette un regard critique sur l’avenir des pensions et prône un nouveau contrat social.

Comment assurer à tous une pension décente?

Il est impératif d’augmenter la pension minimum. Mais depuis la crise du covid, le contexte a changé. La stratégie – allongement de la vie active, réduction de la dette, croissance économique et augmentation de la productivité – visant à maintenir les pensions à un niveau soutenable est mise en veilleuse. Il faudra un certain temps avant de retrouver le niveau de prospérité d’avant la crise. Se penchant sur les dépenses de la sécurité, la Commission sur le vieillissement avertit que, d’ici un an, nous aurons atteint l’augmentation normalement prévue pour...2060!

Ce sont surtout les dépenses en matière de chômage qui vont augmenter. Aujourd’hui, il n’est pas seulement question de la viabilité du système des pensions mais aussi, beaucoup plus largement, de la répartition de la charge. Nous avons déjà observé un glissement de la pauvreté qui ne concerne plus les seules personnes âgées. Elle menace également la population active, salariés au chômage ou indépendants.

Parallèlement, vous ne comprenez pas la volonté d’augmenter les pensions maximum...

Le montant de certaines pensions est beaucoup trop faible. Je suis donc favorable à une augmentation des pensions les plus basses. Cependant, au vu du contexte actuel, je comprends difficilement la volonté du gouvernement d’augmenter les pensions maximum. Le plafond salarial (partie du salaire qui sert au calcul de la pension) augmente cette année. Ce qui signifie une augmentation mécanique des pensions maximum. Même chose pour le coefficient de correction servant au calcul des pensions des travailleurs indépendants (69% de leurs revenus).

Cette monstrueuse anomalie héritée du passé doit être amendée. Nous devons réfléchir à la manière de dépenser l’argent avec la crise. Nous ne pouvons pas nous contenter de constater que les anciennes stratégies visant à maintenir les pensions à un niveau soutenable ne sont plus suffisantes ou impraticables. Comme déjà évoqué, nous sommes confrontés à un énorme problème de répartition de la charge. Nous avons impérativement besoin d’une base de financement plus large. C’est une question intergénérationnelle. Comment pouvons-nous répartir la charge entre jeunes et seniors? Nous sommes confrontés à un nouveau contrat social.

On ne parle plus de la pension à points...

Le système de pension à points est une technique parmi d’autres. L’idée est que la pension doit évoluer en même temps que la prospérité générale du pays. Lorsque la situation est favorable la pension peut être un peu réévaluée, mais si elle vient à se détériorer, la pension doit pouvoir diminuer.

Cette idée prend une résonnance nouvelle aujourd’hui. On avance ensemble, on recule ensemble, jeunes et seniors. Ceci étant, le système à points ne résoudrait pas non plus tous les problèmes auxquels nous devons faire face aujourd’hui. Par contre, le bonus pension refait sa réapparition dans les projets du gouvernement. Il est vrai qu’un bon équilibre entre travail et temps libre peut inciter à prolonger sa carrière quelque temps.

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