L'anévrisme qui a causé la mort d'Albert Einstein n'était pas cérébral... © getty images

Faut-il craindre la rupture d’anévrisme?

L’anévrisme cérébral est une dilatation artérielle au niveau du cerveau. En cas de rupture, le pronostic s’avère très sombre. Comment savoir si on est à risque?

L’anévrisme cérébral est une dilatation d’une paroi artérielle au niveau du cerveau qui, en tant que telle, est bénigne. « La structure des artères au niveau du cerveau a sa particularité, explique le Pr Olivier De Witte, directeur du service de neurochirurgie de l’Hôpital Universitaire de Bruxelles. Au niveau de leurs subdivisions, ces vaisseaux sanguins s’avèrent plus fragiles. Cette fragilité implique parfois le développement de renflements, de petits ballons au niveau de la bifurcation des vaisseaux. » La possible rupture de ces renflements – on parle alors de « rupture d’anévrisme » – est tristement célèbre, car elle est souvent considérée comme un synonyme de mort subite, que rien ne pouvait laisser présager. Mais pour effrayant qu’il soit, cet accident n’entraîne pas systématiquement le décès et s’avère beaucoup moins fréquent qu’on pourrait le penser. « En réalité, seuls 3 à 4% de la population portent des anévrismes au niveau du cerveau et une rupture ne touchera qu’1% de ces patients, rassure le Pr Olivier De Witte. La probabilité est donc faible. »

S’il y a des personnes ayant souffert d’un anévrisme dans votre famille, il faut en discuter avec votre médecin généraliste

Une « explosion »

Difficile d’expliquer pourquoi et quand se rompt un anévrisme. « Il n’existe, à l’heure actuelle, pas d’éléments identifiés qui expliquent cette rupture, poursuit le neurochirurgien. Mais si cela arrive, cela provoque un afflux de sang très important dans la boîte crânienne, un hématome. Comme la boîte crânienne circonscrit un volume défini, qui ne peut pas varier, le sang qui se répand va rapidement comprimer le cerveau. Passé un certain volume, cela provoque un arrêt de la circulation, auquel cas la mort cérébrale est très rapide, quelques secondes suffisent. » L’issue est directement fatale dans près d’un cas sur deux. « Ceux qui survivent, parce que l’hémorragie était moins importante et s’est arrêtée spontanément, parlent d’un mal de tête comme ils n’en ont jamais connu, comme une explosion dans le crâne. » L’actrice Emilia Clarke (Game of Thrones), qui en a souffert à l’âge de 24 ans, évoquait pour sa part une sensation très douloureuse « d’élastique qui enserre le cerveau ». Il s’agit alors d’une urgence médicale. Après coup, une proportion importante des survivants en garde des séquelles majeures, apparaissant dans les deux semaines suivant la rupture. Celles-ci seraient dues aux produits de la dégra dation de l’hématome, qui provoqueraient une diminution de la taille des vaisseaux sanguins cérébraux et, partant, la mort de certaines zones du cerveau, insuffisamment irriguées. Ces répercussions s’approchent de celles consécutives à un AVC.

La présence d’un anévrisme cérébral étant généralement asymptomatique, il n’existe pas de signes manifestes de sa présence. Beaucoup passent d’ailleurs sous les radars ou sont découverts fortuitement, au cours d’un examen pour tout autre chose. Quelques facteurs de risque de développement et de rupture de l’anévrisme ont néanmoins été identifiés, tels que le fait d’être de sexe féminin, fumeur, d’avoir pris la pilule contraceptive, mais aussi l’âge (la probabilité augmente avec le temps) et/ou une prédisposition génétique. « C’est pourquoi, s’il y a des personnes ayant souffert d’un anévrisme dans votre famille, il faut vraiment faire une mise au point et en discuter avec votre médecin généraliste pour qu’il vous prescrive des examens. »

Traiter ou pas?

Si un anévrisme est découvert, un traitement peut être envisagé pour autant que le risque de rupture soit objectivé. Mais ce n’est pas nécessairement le cas: tout dépend de la taille de l’anévrisme et de sa structure. Puisque ce type d’accident s’avère rare, une surveillance suffira le plus souvent. « Les opérations sur un anévrisme sont hyper délicates et ne sont pas décidées à la légère », souligne le Pr De Witte. Il en existe de deux types: l’embolisation vise à faire monter un petit cathéter à l’intérieur d’une artère jusqu’au cerveau, pour boucher l’anévrisme depuis l’intérieur. L’autre option consiste à ouvrir la boîte crânienne pour aller « clipper » l’anévrisme, et l’exclure du réseau sanguin. Des opérations aujourd’hui bien maîtrisées, mais où le risque de complications n’est pas absent (1 à 3% des cas).

Pr Olivier De Witte Neurochirurgien (HUB)
Pr Olivier De Witte Neurochirurgien (HUB)

Anévrismes: les principaux facteurs de risque

? Prédisposition génétique (plusieurs cas dans la famille)

? Sexe féminin

? Consommation de tabac

? Âge (la probabilité augmente avec le temps)

? Prise de pilule contraceptive

Ces autres anévrismes

Même s’ils sont encore plus rares, des anévrismes peuvent apparaître sur des artères ailleurs dans le corps, notamment au niveau de l’abdomen. Ceux-ci sont le plus souvent asymptomatiques et détectés lors d’un examen de routine, puisque situés dans des zones bien plus surveillées. Ce n’était autrefois pas le cas: ce sont d’ailleurs des ruptures d’anévrismes abdominaux qui ont provoqué les décès de Charles de Gaulle et d’Albert Einstein!

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