© WIM KEMPENAERS

Dites-le plutôt avec des fleurs

Elle est l’une des dernières patientes de ma consultation du matin et illumine ma journée avec son ensemble rose fleuri. Quel contraste avec la blouse blanche de médecin, boutonnée jusqu’au cou, que je dois porter depuis le début de la pandémie.

Rita*, 75 ans, s’assied devant moi. Elle m’explique que, depuis quelques semaines, elle doit prendre le bus pour faire ses courses, et qu’elle a dû le prendre aussi pour venir à ma consultation. A pied, elle n’y arrive plus. Elle ne comprend pas ce qui lui arrive. Ses promenades quotidiennes lui faisaient du bien. Comme elle doit désormais souvent reprendre son souffle, cela ne lui procure plus vraiment de plaisir.

Elle est fatiguée et aimerait retrouver son énergie. Ce sont plutôt les essoufflements qu’elle mentionne qui m’inquiètent. Je l’ausculte, mais je ne constate rien d’alarmant. Seuls ses pieds sont un peu gonflés mais c’est le cadet de ses soucis. « C’est comme ça depuis longtemps, docteur. » Elle semble soulagée que je ne trouve rien de particulier et sort son portefeuille. Pas entièrement rassurée, je propose à Rita de faire une prise de sang.

Je reçois les résultats le soir et je la rappelle. Je lui explique que son coeur est en surrégime. Je lui suggère de se rendre aux urgences le soir même, car ses valeurs sanguines me semblent quand même fort élevées. Rita est contente que j’aie trouvé une explication à ses symptômes mais ne se laisse pas convaincre d’aller directement à l’hôpital. « Je viens de me mettre à cuisiner: je reçois des amis ce soir! »

Parfois, le médecin ne peut rien faire de plus qu’informer son patient et lui donner un avis argumenté. C’est ensuite au patient de voir ce qu’il veut en faire. Chacun a le droit de décider. J’en ai ce soir la parfaite illustration. Rita me dit qu’elle ira aux urgences le lendemain matin. Dans toute relation, y compris celle entre un médecin et son patient, il est primordial de savoir écouter l’autre et faire des compromis (responsables). Comme ici.

Quelques semaines plus tard, Rita revient me consulter, à nouveau vêtue d’un ensemble pimpant. Cette fois, son pas est assuré. On lui a posé une nouvelle valve cardiaque et son coeur fonctionne à nouveau parfaitement. Ses séances de rééducation se passent très bien. Elle a pris le temps de s’arrêter chez le fleuriste et me tend un bouquet de roses. « Merci! »

* Rita est un nom d’emprunt.

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