GUY LEGRAND ANCIEN RÉDACTEUR EN CHEF DE CASH! © FRANK BAHNMÜLLER

Devons-nous vraiment déconsommer?

Le mot n’existe pas officiellement, mais il fut beaucoup utilisé ces derniers mois. Notamment quand on a appris que la consommation des Belges avait baissé de 1,8 % en décembre 2018, par rapport à décembre 2017. Et ceci indépendamment de l’évolution des prix, puisque ce chiffre est exprimé en volume. Certains s’en sont réjouis, d’autres inquiétés. Arguments de ces derniers : moins de consommation, ce sont moins de revenus pour l’Etat et donc pour le financement des pensions, des soins de santé, etc. Arguments des premiers : moins de consommation, c’est moins de gaspillage et de pollution. Donc, c’est bon pour la planète et le climat. Qui a raison ? Sans entrer dans le détail, les arguments des deux camps sont pertinents. A ceci près qu’on peut plus facilement trouver une compensation aux revenus qu’à la pollution. Par contre, qualifier d’historique cette récente baisse de la consommation procède d’un malentendu.

LA FABRICATION D’UN JEAN POLLUE 10TONNES D’EAU.

Premier point : on a déjà observé plusieurs reculs dans le passé. Début 2001 par exemple. Et ceci sans retenir 2009 (-1,5 %), une année de crise. Surtout, la consommation des ménages se calme depuis un bon moment. Voyez les chiffres. Entre 1960 et 2010, elle a progressé de 2,6 % par an en moyenne. Soit presque autant que le PIB (+2,8 %), ce produit intérieur brut qui mesure l’ensemble de la richesse produite en un an dans le pays. Si on ne retient que la période 1996-2010, les chiffres sont de respectivement +1,6 % et +1,9 %. De 92,8 % de la progression du PIB, on est revenu à 84 %.

Deuxième point : le recul est assez prononcé dans certains domaines, grâce au progrès technologique, mais oui ! Des appareils ménagers qui consomment moins, comme la publicité nous l’affirme à l’envi, et des consommateurs plus attentifs, cela finit par influencer les données nationales. Ainsi la consommation d’électricité des ménages et PME (c’est l’univers retenu par les statistiques) a-t-elle reculé de 7 % en Belgique au cours des dix dernières années. Alors que le nombre d’objets utilisant du courant a clairement augmenté ! Quant à la consommation d’eau, elle a plongé : on est, en vingt ans, revenu de 121 à 95 litres par jour et par personne.

Déconsommation donc, et sans perte de confort puisqu’on se situe ici sur le terrain de l’économie et non de la privation. Peut-on faire mieux, doit-on aller plus loin ? Un domaine retient l’attention, après qu’il ait fait scandale l’an dernier : le textile. Les invendus détruits chaque année représentent des milliards d’euros, alors même que ces vêtements ont engendré des pollutions considérables dans les pays producteurs. La fabrication d’un jean (qui passe pour triste champion dans ce domaine) nécessite au total 10tonnes d’eau, rejetée avec colorants, détergents et autres produits nocifs. Est-il opportun, pour protéger la planète, d’infléchir la production de vêtements en achetant par exemple un jean de moins ? A chacun de décider...

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