Chenini, où les maisons berbères sont creusées dans les flancs de la montagne. © Myriam Thys

Comme une Berbère en Tunisie

Outre ses paysages spectaculaires, le sud de la Tunisie abrite aussi une culture berbère fascinante. Des villages troglodytes, des pépites architecturales comme les ksour, des citadelles dans le désert... Invitation à un merveilleux voyage dans le temps.

Tozeur, située entre le massif de l’Atlas et le Sahara, est une ville oasienne pleine de vie et un point de chute idéal pour découvrir le désert. Le soleil y joue avec les ombres dans un entrelacs de ruelles bordées de maisons couleur sable aux façades ornées en relief. Dans la médina du XIVe siècle, le calme règne, alors que le restant de la ville bruisse en permanence. Chaque antique porte en bois raconte une histoire. Il n’y a qu’un magasin de souvenirs avec, sur le toit, la plus belle des terrasses et le meilleur troquet de la ville: bienvenue au Café Berbère!

Un univers magique

Attention, passage de dromadaires! A peine ai-je dépassé ce panneau d’avertissement qu’un troupeau me barre la route. En suivant leurs traces, je longe quelques oasis. Il y en a une vingtaine dans ce sud profond, qui abritent environ deux millions de palmiers-dattiers. Non loin de Tozeur, je découvre Chebika: avec Tamerza et Midès, l’une des plus belles oasis d’altitude dans le pays. Au milieu d’un paysage aride, où le vert est bien la dernière couleur qu’on s’attend à voir, les palmiers semblent se frayer un chemin à travers un canyon, où des sources alimentent une rivière et une chute d’eau, gages de vie.

Une nomade occasionnelle

Chott el-Djerid, le plus grand lac salé d’Afrique avec ses 5.861 km2, ressemble de loin à un immense miroir reflétant le ciel. Totalement asséché, il a des allures lunaires. C’est ce qu’a dû se dire George Lucas qui y a planté le décor du premier épisode des films Star Wars. Au milieu du désert, je marque une pause à Onk Jmel, près d’une formation rocheuse en forme de tête de dromadaire, et je me reprends à penser à Star Wars. Ici, la grande attraction est Mos Espa (alias Tatooine), un village berbère typique, rempli de drôles d’objets robotiques. Lui aussi a servi de décor à la saga originelle, celle des années 1970. Pour ma part, je suis plutôt venue profiter du désert et du calme infini, avec en point culminant le soleil qui sombre derrière une dune et embrase le ciel.

Le ksar Ouled Soltane.
Le ksar Ouled Soltane.© Myriam Thys

Une tempête de sable

Au Musée du Sahara, à Douz, un Berbère me raconte la vie dans le désert: les mariages qui durent des jours, la langue des nomades et la signification des symboles que les filles se font tatouer sur le visage. « A partir de 1963, les femmes ont pu librement s’habiller et ces tatouages ont été interdits, mais les jeunes filles les remplacent aujourd’hui par des dessins au henné », s’amuse-t-il. Fathi, qui m’accompagne dans le Sahara, est lui aussi un pur Berbère. Né au sein d’une famille nomade, il dort en général dans le désert. « Il reste pas mal de semi-nomades, assure-t-il, car quand vous avez été envoûté par le désert, ça ne vous quitte plus. »

Les routes sont inexistantes, mais mon guide connaît le Sahara comme sa poche. J’ai rarement vu autant de nuances de sable qu’ici: du blanc crayeux à l’ocre et au rouille. Tout à coup, la nuit tombe et, au loin, un énorme nuage jaune fonce droit sur nous. Fathi me donne un turban pour me protéger le nez et la bouche. J’ai déjà vécu quelques tempêtes de sable, mais celle-ci est à la fois puissante et étrangement belle. Je comprends totalement la fascination que Fathi ressent pour le désert. « L’appel du Sahara va grandissant, poursuit-il. La vie devenant de plus en plus trépidante, les gens ont besoin d’espace. Or, de la place, ici il y en a, car la Tunisie compte pas moins de 40.000 km2 de désert de sable. »

Le dromadaire était l'unique moyen de traverser le désert avant l'apparition des Jeeps et autres 4X4.
Le dromadaire était l’unique moyen de traverser le désert avant l’apparition des Jeeps et autres 4X4.© Myriam Thys

Le vaisseau du désert

Ma tente berbère au Camp Mars est plantée près d’un petit monticule au sommet plat qui jette des ombres théâtrales au coucher de soleil. Dans ce campement authentique mais qui ne cède rien au confort, j’apprends à préparer le pain des Berbères: une galette plate qu’on enterre sous les cendres brûlantes d’un feu étouffé et recouvert de sable. Au bout d’un quart d’heure, le pain est prêt! Autour du feu de camp, le ciel étoilé et très pur assure le spectacle... Au lever du jour, je monte à dos de dromadaire pour poursuivre ma traversée du Sahara. Le désert est alors à son plus beau, les dunes ont des allures de vagues orangées et le sable de dentelle raffinée. Lorsque ma monture accélère, je comprends pourquoi on surnomme le dromadaire « vaisseau du désert »: en remettant pied à terre, j’ai littéralement le mal de mer!

Le village troglodyte de Douiret.
Le village troglodyte de Douiret.© Myriam Thys

Des villages trogloditiques

Au VIIe siècle, avant l’islamisation, de nombreux Berbères ont fui dans les montagnes, où ils ont creusé des maisons troglodytiques. Ces Imazighen, ce qui veut dire « hommes libres », voulaient sauvegarder leur religion et leur liberté. Matmata, un des villages troglodytes les plus connus, où les religions n’avaient pas d’importance, est devenu leur contrée « où coule le lait et le miel ». Je passe la nuit dans l’hôtel troglodyte Sidi Driss où sont encore accrochées des photos jaunies de tournages. Véritable lieu de pèlerinage pour les aficionados de la saga, cet hôtel était l’habitation de Luke Skywalker. Les chambres y sont basiques mais très authentiques. L’hôtel a été creusé sur plusieurs niveaux, avec de petits espaces ouverts. Matmata est avec Tamezret l’un des rares villages où on parle encore la langue berbère. A Tamezret, je visite le très original Musée Berbère, où je goûte un petit déjeuner typique: du pain trempé dans de l’huile d’olive et du miel.

Chott El-Djerid, le plus grand lac salé d'Afrique.
Chott El-Djerid, le plus grand lac salé d’Afrique.© Myriam Thys

Les châteaux du désert

Près de Tataouine, le ksar Ouled Soltane, datant du Xe siècle, forme l’un des plus beaux ensembles du sud de la Tunisie. Le paysage aride et inhospitalier autour de Médenine abrite plusieurs trésors de cette architecture berbère unique en son genre. Un ksar se compose de gorfas à plusieurs étages, sortes de greniers à blé. Il n’y a qu’ici qu’on peut admirer ces monuments uniques surnommés « châteaux du désert ». Après trois autres ksour (pluriel de ksar), j’arrive à Chenini, une petite ville où les maisons berbères creusées à flanc de montagne se fondent dans le décor. Aujourd’hui, 80 familles y vivent encore dans des conditions qui n’ont guère changé depuis le Xe siècle. Tout est calme, hormis l’animation qui règne dans la mosquée blanche, offrant un fort contraste avec les maisons de couleur ocre. Lorsque l’imam a fini de chanter, un silence apaisant s’installe dans la ville.

Les éleveurs mènent une vie semi-nomade.
Les éleveurs mènent une vie semi-nomade.© Myriam Thys

Pratique

Y aller: Bruxelles-Tunis, chaque jour du 26/3 au 29/10, à l’exclusion du mercredi en hiver – tunisair.com

Tunis-Tozeur, tunisairexpress.net

Se loger: Ksar Rouge à Tozeur, ksar-rouge.tn

Infos: discovertunisia.com, contact belgium@discovertunisia.co

Le village de tentes de Camp Mars.
Le village de tentes de Camp Mars.© Myriam Thys
L'oasis de Tozeur.
L’oasis de Tozeur.© Myriam Thys
Une chambre de l'hôtel troglodyte Sidi Driss.
Une chambre de l’hôtel troglodyte Sidi Driss.© Myriam Thys
Un fabuleux lever de soleil sur les dunes du Sahara.
Un fabuleux lever de soleil sur les dunes du Sahara.© Myriam Thys

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