© getty images

Arrêter une domiciliation, pas si simple!

C’est au client à demander à son fournisseur de stopper une domiciliation. La bloquer depuis sa banque ne servira pas un grand-chose d’un point de vue contractuel...

Particulièrement depuis l’explosion des prix sur le marché de l’énergie, de nombreux Belges se sont intéressés à leurs domiciliations. Ce service bancaire, a priori parmi les plus basiques, apporte son lot de surprises. Il n’est pas si simple de faire sauter une domiciliation. Sans parler des coûts divers. Explorons le sujet.

Il y a quelques mois, le fournisseur d’énergie Mega avait décidé d’augmenter le montant des acomptes mensuels de ses clients qui avaient un contrat à tarif variable. Une décision qui n’avait pas plu aux consommateurs, car on leur ponctionnait d’importantes sommes d’argent, les mettant parfois dans des difficultés financières, particulièrement si leur compte n’était pas assez approvisionné (nous verrons plus loin les conséquences).

Ces clients, épaulés par Test Achats, avaient décidé de défendre leurs intérêts. Car il est possible de contester une domiciliation si vous n’en connaissiez pas le montant exact au départ et si son montant excède ce à quoi vous pouviez raisonnablement vous attendre.

L’organisation de défense des consommateurs avait alors porté plainte auprès de l’Inspection économique et Mega avait promis de faciliter la procédure de modification des acomptes. Le fournisseur s’était engagé à ne plus prélever d’acompte par domiciliation aux clients qui entraient une contestation par email.

L’objectif premier de Mega était d’ajuster le montant de la facture d’acompte afin d’éviter un choc trop rude lors du décompte. Mais des clients préféraient payer le solde dû par virement bancaire, voire négocier un plan de paiement raisonnable avec le service clientèle.

La banque ne peut plus rien faire

L’avantage d’une domiciliation auprès de votre opérateur télécom, de votre fournisseur d’énergie ou d’eau, voire votre centre de fitness, c’est que tous vos paiements s’effectuent automatiquement. Ils sont effectués à temps, il y a moins de formalités administratives. Mais, en cas de contestation, ça se corse. Le hic pour le consommateur, c’est que depuis 2014, il existe une réglementation sur les domiciliations européennes (SEPA). Ce ne sont plus les banques, mais les fournisseurs et les entreprises qui gèrent les domiciliations. Techniquement, si vous accordez un mandat papier ou électronique à un fournisseur de gaz par exemple, vous l’autorisez à débiter votre compte une seule fois (débit unique) ou à plusieurs reprises (domiciliation récurrente). Et techniquement encore, le rôle de la banque se limite à l’exécution de cet ordre de paiement.

Alors, comment mettre fin à une domiciliation?

Le gros désavantage d’une domiciliation, comme dans le cas Mega évoqué plus haut, c’est que le montant mensuel peut varier et le solde de votre compte peut plonger de manière « inattendue ». Même si, en principe, le créancier (le fournisseur) aura toutefois informé préalablement son client (le débiteur) du montant à payer.

Une demande d’annulation de la domiciliation et de son mandat auprès du créancier comme Proximus, ou Engie se fait par écrit. Il « suffit » de mentionner le numéro de contrat ou d’abonnement et de demander « de révoquer immédiatement ma domiciliation en votre faveur. » Le tout est daté et signé, sans oublier vos coordonnées. La demande est idéalement envoyée par recommandé.

Le créancier ne devrait plus demander de paiements à votre banque pour prélever les montants de manière automatique sur votre compte. Et il vous enverra directement un bulletin de virement pour le règlement des factures (par la poste ou de manière électronique). En cas de problème ou de refus du créancier, des plaintes peuvent être déposées auprès du point de contact du SPF Économie.

Attention, bloquer n’est pas annuler

Notez que vous pouvez bloquer, mais pas annuler, une domiciliation depuis l’App de votre banque, le PC Banking, voire même en le demandant au guichet. Grâce à ce blocage, vous pourrez empêcher un ou plusieurs créanciers de prélever un montant par domiciliation sur votre compte.

Mais attention, cette action de blocage ne va pas effacer votre dette impayée auprès du fournisseur ni mettre un terme au votre contrat et votre domiciliation. Cela signifie simplement que le créancier ne recevra plus son dû. Il vous enverra alors probablement un rappel de paiement et une éventuelle pénalité comme mentionné dans le contrat. Un conseil: informez toujours l’autre partie lorsque vous bloquez une domiciliation.

Comment récupérer des montants déjà payés?

Reprenons l’exemple d’une facture de régularisation d’énergie importante et que vous ne souhaitez plus payer par domiciliation. Cependant, l’argent a déjà été débité de votre compte. Il existe une solution.

Le règlement Sepa prévoit une période pour faire opposition. Si vous en faites la demande à votre banque endéans les 8 semaines en avançant cette réglementation européenne, elle devra rembourser immédiatement le montant payé. Vous ne devrez pas justifier cette demande. Attention: une telle demande de remboursement ne signifie pas que la créance est annulée. La dette ne disparaît pas pour autant. Il faudra donc toujours trouver une solution avec le créancier.

Après le délai de 8 semaines, vous disposez encore de 13 mois pour contester le paiement. Mais dans ce cas, la banque ne remboursera pas le montant automatiquement. En clair? Vous devrez d’abord fournir la preuve que votre contestation est bien justifiée. Vous pouvez le faire en présentant une copie de votre accord avec le fournisseur ou encore un jugement du tribunal. » (sepastop.eu)

La double peine du compte pas approvisionné

Les domiciliations et même parfois les ordres permanents ne sont pas effectués si le solde du compte à vue est insuffisant. Pour le refus d’une domiciliation suite à un solde insuffisant, les frais varient entre 6 et 8 ? selon les banques. Oui, vous lisez bien: jusqu’à 8 ? de pénalité pour un ordre de paiement rejeté! Notons que certaines banques acceptent gratuitement deux ou trois opérations refusées par an, selon le type de compte auquel le client aura souscrit. Des institutions bancaires avertissent aussi de la première tentative de paiement infructueuse pour laisser le temps au client de réapprovisionner son compte.

Les banques n’ont pas vraiment de justifications à avancer face à ces pénalités importantes, si ce n’est qu’elles ont augmenté tous leurs frais bancaires pour trouver d’autres sources de revenus depuis que la base du métier, c’est-à-dire la collecte de l’épargne et l’octroi de crédits, rapporte moins.

Mais pour le client qui a des difficultés financières, c’est une double peine. Outre les 6 à 8 ? pour une domiciliation refusée (ou un ordre permanent), il devra aussi s’acquitter des frais de rappel de son fournisseur. Par exemple, Telenet comme d’autres acteurs télécom, facture 10 ? de frais rappel en cas de retard de paiement. Notons que le fournisseur télécom aura pris soin d’informer son abonné par mail ou par SMS que sa domiciliation aura été refusée.

Pour le client, une seule facture impayée peut donc lui coûter très cher. C’est la double peine si on additionne les frais bancaires pour un ordre de paiement rejeté et les frais de retard/rappel des fournisseurs.

Domiciliation ? ordre permanent

Il n’est pas rare de confondre domiciliation et ordre permanent. Les deux sont des manières de payer automatiquement à une période déterminée. Mais un ordre permanent n’est pas lié à une demande faite par une société ou un fournisseur que vous auriez autorisé à prélever de l’argent sur votre compte bancaire. Un ordre permanent, c’est simplement envoyer un montant de manière récurrente et automatique, par ex. 50 ? chaque mois sur le compte d’épargne de votre petite-fille. Au contraire d’une domiciliation, vous ne devez demander à personne l’autorisation pour y mettre fin. Vous décidez de tout: du jour du prélèvement, du montant, d’une éventuelle pause de quelques mois.

Pas de frais supplémentaires

« De plus en plus d’entreprises imposent le principe de la domiciliation bancaire ou encouragent le paiement via ce système », explique-t-on au SPF Économie. Car la domiciliation bancaire comporte un gros avantage pour l’entreprise: elle a plus de certitude d’être payée à temps. Mais, « si le consommateur refuse d’opter pour une domiciliation, l’entreprise ne peut pas lui imputer des frais supplémentaires. Les clauses qui ont pour objet d’augmenter le prix annoncé d’un produit en raison du refus du consommateur de payer par domiciliation bancaire sont abusives. » Des entreprises ont néanmoins trouvé la parade. Elles n’augmentent pas les frais, mais elles « octroient une remise au consommateur s’il est d’accord de payer par domiciliation. » Et ça, c’est légal.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire