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Transmettre son héritage avec raison

La question de l’héritage inquiète certains parents plus que d’autres. Il y a parfois la peur que l’argent soit mal dépensé, ou que les petits-enfants n’en profitent pas. Ou encore un enfant ayant plus de besoins que les autres. Comment orienter son héritage dans la direction voulue?

Déshériter complètement un enfant n’est pas possible. Les enfants sont ce que l’on appelle des héritiers réservataires et, ensemble, ils ont toujours droit à au moins la moitié de votre succession. En revanche, vous êtes libre de disposer comme vous l’entendez de l’autre moitié. Certains imaginent pouvoir déshériter leurs enfants en donnant, de leur vivant, tous leurs biens à des tiers. Ce n’est pas une solution, car la réserve de vos enfants n’est pas calculée sur ce que vous laissez derrière vous à votre décès: les anciennes donations comptent aussi. Mais d’autres solutions existent.

1. RETARDER L’ENTRÉE EN POSSESSION DE L’HÉRITAGE

Vous pouvez déshériter temporairement vos enfants en faveur de votre partenaire survivant.

Via le contrat de mariage

Une technique simple consiste à se marier sous le régime de la communauté universelle ou régime légal, selon lequel tous les biens ou presque sont repris dans la communauté de biens. En incluant une clause d’attribution de communauté dans votre contrat de mariage, l’intégralité de votre patrimoine ira d’abord au partenaire survivant et ensuite seulement à vos enfants.

Via une clause d’accroissement

Si vous êtes mariés sous le régime de la séparation des biens ou si vous vivez ensemble et possédez chacun des biens en propre, vous pouvez recourir à une clause d’accroissement, aussi appelée tontine. Cette technique est surtout utilisée dans le cadre de l’acquisition d’un bien immobilier, mais elle l’est également pour des biens mobiliers, un portefeuille d’investissement par exemple. Les deux partenaires mettent leurs portefeuilles propres en commun, soit (et de préférence) par acte notarié, soit de manière privée. Le survivant reçoit le portefeuille de son partenaire décédé. Ces biens échappent donc totalement à l’héritage.

Il est important que la souscription d’une telle clause se déroule dans les règles. Faites-vous conseiller par un professionnel, car les règles diffèrent selon les régions. Si vous ne remplissez pas les conditions, la partie que le partenaire survivant reçoit grâce à cette clause pourrait être qualifiée de donation.

Est-ce une solution intéressante?

Faire attendre vos enfants plus longtemps est une option, mais elle n’est et ne reste qu’un report dans le temps. Toutefois, si le partenaire survivant opte ultérieurement pour une rente viagère (voir point 2), cela réduira sérieusement l’héritage. Sachez aussi que cette solution touche tous vos enfants.

Favoriser un enfant en difficulté

Certains parents pensent également au déshéritement pour favoriser un enfant qui a besoin de davantage d’aide, par exemple un enfant en situation de handicap. Vous pouvez lui laisser la totalité de la partie disponible (la moitié) de votre héritage. Vous pouvez également convenir dans un pacte successoral qu’un enfant recevra plus que les autres et que ces derniers ne réclameront pas la réserve à laquelle ils ont droit. L’inverse est également possible: si votre enfant à problème est très endetté, vous pourriez souhaiter lui laisser le moins possible. Renseignez-vous auprès de votre notaire.

2. RÉDUIRE VOS AVOIRS VIA UNE RENTE VIAGÈRE

Dépenser votre capital est une autre solution, mais vous ignorez combien de temps vous vivrez et donc combien dépenser pour laisser derrière vous le plus petit patrimoine possible.

La rente viagère immobilière

Une manière classique de réduire son patrimoine est de vendre son logement en viager. L’acquéreur n’achète généralement que la nue-propriété de votre bien, de sorte que vous continuez à l’occuper au titre d’usufruitier. En échange, il vous verse une rente à vie. L’expression n’est pas à prendre au pied de la lettre, car la plupart des rentes sont aujourd’hui limitées dans le temps, 15 voire 20 ans au maximum.

Si vous vendez à un particulier, la rente n’est pas imposée. Autrement dit, vous ne devez pas la déclarer à l’impôt des personnes physiques et elle n’a aucune incidence sur le montant de votre pension. En revanche, si vous vendez à une société, la rente est imposée. Pour pallier la différence, la solution consiste à demander une rente plus élevée.

La rente viagère financière

La rente financière ou plan rente est une technique moins connue. Le principe est simple: vous remettez un capital à une banque ou à une compagnie d’assurance qui, en contrepartie, vous verse une rente mensuelle à vie. Généralement, la rente financière a la forme juridique d’une assurance branche 21 ou d’une assurance épargne. Au départ, vous payez une taxe de 2% sur la prime et des frais d’entrée qui peuvent s’élever à plus de 4%, un pourcentage négociable.

Étant donné que le contrat est conclu avec une personne morale, vous serez également imposé: 3% du capital abandonné ou un précompte mobilier de 30%. En principe, mais la chose est assez rare, il est possible de conclure ce type de contrat avec une personne privée. Ce qui évite la taxation.

Est-ce une solution intéressante?

La rente viagère est un outil efficace pour déshériter vos enfants. Sachez toutefois qu’elle ne permet pas d’en déshériter un seul: tous le seront. Vous renoncez à la pleine propriété de votre logement ou de votre capital en échange d’une rente. Mais les taux d’intérêt actuels sont extrêmement bas et très peu d’institutions financières proposent encore ce produit.

3. DÉMÉNAGER À L’ÉTRANGER

Si vous décidez de vous expatrier dans un pays, l’Angleterre par exemple, qui ne connaît pas le principe de la réserve, vous n’avez plus à vous soucier des règles successorales belges. Vous pourrez donner tous vos avoirs, ou les léguer par testament, à la personne de votre choix sans que vos enfants puissent s’y opposer. La législation hollandaise est également plus souple en matière de déshéritement que la nôtre.

S’expatrier, est-ce une solution intéressante?

La piste peut être intéressante, mais il faut réellement s’expatrier! Une boîte postale dans un pays étranger ne suffit pas. Si vous avez encore des intérêts professionnels ou autres en Belgique ou si vous y possédez encore des biens immobiliers, le fisc risque de s’intéresser à vous, examinant les circonstances réelles de votre déménagement à l’étranger.

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