© iStock

Héritage: La clause qui protège le conjoint

Outre le don bancaire, la clause d’attribution optionnelle reprise dans le contrat de mariage est une autre technique de planification successorale. A condition qu’elle ne soit pas dépassée...

1. Qu’est-ce que c’est ?

Lorsqu’on insère une clause d’attribution optionnelle dans son contrat de mariage, on on donne à son conjoint la possibilité de choisir dans la communauté conjugale ce qui lui convient le mieux (souvent l’habitation familiale en pleine propriété et l’épargne). On s’écarte du coup du « partage par moitié » que prévoit la loi pour les biens communs d’un couple. Evidemment, il doit y avoir une communauté conjugale. C’est le cas lorsqu’on est marié sous le régime légal (sans contrat de mariage), sous le régime de communauté universelle ou sous le régime de la séparation des biens avec communauté réduite. Attention, la clause d’attribution optionnelle ne s’applique qu’aux biens communs, pas aux biens propres.’

2. Est-ce fiscalement désavantageux ?

Cela dépend du choix que fait le conjoint survivant en fonction de la situation au moment du décès. Une veuve de 50 ans ayant trois enfants aux études préférera généralement prendre davantage de biens dans la communauté qu’une veuve de 90 ans. La veuve de 50 ans a, en effet, encore de nombreuses années devant elle et doit encore assumer les frais d’études de ses enfants. La veuve de 90 ans se contentera d’une part plus modeste de la communauté pour laisser le reste à ses enfants. Elle estime n’avoir pas besoin de plus et fiscalement, ce sera aussi plus intéressant. Parce que chaque choix a ses conséquences fiscales.

3. Et en cas de séparation de biens ?

En cas de séparation de biens, il n’y a pas de communauté de biens et une clause d’attribution optionnelle n’est donc théoriquement pas possible. Mais en pratique, on contourne le problème en créant une communauté restreinte par simple acte notarié (entre 600 et 800€). Il peut aussi aller de pair avec l’adoption d’une clause d’attribution optionnelle. Autre avantage : il n’est pas nécessaire de dresser un inventaire de tous les biens qu’on possède comme c’est le cas lorsqu’on veut passer au régime légal ou à un régime de communauté universelle parce là, on change complètement de régime.

4. Faut-il passer chez le notaire ?

Oui, on a besoin du notaire et il faut être d’accord tous les deux pour adopter une clause d’attribution optionnelle. On ne peut donc pas se contenter d’adapter son contrat de mariage entre soi. Et si, plus tard, on veut modifier la clause d’attribution optionnelle, il faut aussi repasser chez le notaire.

5. Faut-il une réciprocité totale ?

La plupart des clauses d’attribution optionnelle sont parfaitement réciproques. Les conjoints ont les mêmes choix. Mais dans certains cas, il est conseillé de limiter la clause d’attribution optionnelle pour un des partenaires voire de ne l’établir qu’à sens unique.

On pense, par exemple, à une famille recomposée dont l’importante communauté de biens se compose essentiellement des biens propres (à l’origine) d’un des conjoints et qu’on a fait glisser, pour des raisons fiscales, dans la communauté de biens par un apport dans le contrat de mariage. Sans entrer dans les détails, le « nouveau » conjoint pourrait, via une clause d’attribution optionnelle, diminuer l’héritage des beaux-enfants.

6. Faut-il tenir compte de la réserve des enfants ?

Non ! Lorsqu’on veut s’attribuer mutuellement plus que ce que la loi ne prévoit par contrat de mariage, il ne faut pas tenir compte de la réserve des enfants. Alors qu’il faut en tenir compte quand on rédige un testament.

7. Combien ça coûte ?

On peut adopter une clause d’attribution optionnelle quand on établit le contrat de mariage (et donc avant d’être mariés) ou l’y intégrer plus tard. Dans tous les cas, il s’agit d’un acte notarié qui revient à 500€ environ.

À SAVOIR. On constate que, dans la pratique, un notaire sera plus cher qu’un autre alors qu’il s’agit du même acte notarié ou de la même modification à apporter. Il vaut donc mieux se renseigner sur les prix à l’avance.

8. Sur quoi est-on taxé ?

Les biens que le conjoint survivant choisit dans la communauté grâce à la clause d’attribution optionnelle ne passent pas par la succession mais par la liquidation/partage de la communauté conjugale. Et pourtant il faut payer des droits de succession ! Le conjoint survivant paie des droits de succession sur tout ce qu’il reçoit en plus de la moitié des biens communs (l’autre moitié lui appartenant).

9. Une clause d’attribution optionnelle est-elle encore une bonne solution ?

Une simple mais bonne clause d’attribution optionnelle doit permettre au conjoint survivant de choisir « à la carte » les biens qu’il veut prendre parmi les biens communs. Autrement dit, il doit – pour chaque bien précis, mobilier ou immobilier – pouvoir décider s’il le prend en pleine propriété ou en usufruit.

Si ce n’est pas le cas, c’est que la clause d’attribution optionnelle date. En règle générale, on peut dire qu’elle est dépassée si elle est d’avant 2008. En effet, les anciennes clauses d’attribution optionnelle ne prévoient que quatre ou, dans le meilleur des cas, huit options possibles. Le conjoint survivant dispose de peu de marge de manoeuvre pour réaliser le choix idéal. Mieux vaut faire rayer cette ancienne clause d’attribution optionnelle et la remplacer par une nouvelle version ( ± 500 € ).

Une bonne clause d’attribution optionnelle doit en outre être simple et claire pour un profane. Les clauses d’attribution optionnelle sont bien souvent trop longues et trop complexes, ce qui complique énormément le choix pour le conjoint survivant. Le mieux est de se renseigner auprès de son notaire.

10. Si le conjoint survivant n’est plus capable ?

Avec le vieillissement de la population, il arrive de plus en plus souvent qu’au décès d’un des conjoints, l’autre n’a plus la capacité mentale de choisir. Si ce conjoint survivant avait établi un mandat de protection extrajudiciaire, les enfants peuvent choisir pour lui/elle sans que cela problème et faire le meilleur choix. S’il n’existe pas de mandat, la clause d’attribution optionnelle prévoit que le choix doit être effectué dans un certain délai (généralement 4 mois) et qu’à défaut, une des options sera automatiquement retenue. On revient alors souvent au droit successoral classique même si une autre option reste toujours possible

Par Johan Adriaens, Estate Planner

Contenu partenaire