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Les cheveux gris, c’est sexy !

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Une écrivaine française consacre un livre entier au blanchiment de ses cheveux. Et immédiatement, les réactions pleuvent, passionnées, parfois contre, surtout pour. Et ce, alors que les femmes sont de plus en plus nombreuses à assumer leur chevelure grise qui n’a plus rien d’un renoncement à la séduction.

Cheveux gris, cheveux blancs. Ce sujet aurait été plus attendu dans nos pages beauté. Mais aujourd’hui, il s’agit de bien plus que cela. Car cette vogue, sur laquelle nous nous étions penchés il y a une décennie déjà lors de ses balbutiements, est un signe qu’il y a quelque chose qui change dans la société par rapport à l’acceptation de l’âge et du vieillissement.

Il y a dix ans donc, nous notions que de plus en plus d’Américaines issues des classes supérieures, et de plus en plus jeunes, affichaient sans complexe leurs cheveux gris. Avec pour objectif de se faire respecter dans le monde des affaires et dans la sphère politique. Car dans l’univers masculin, le gris est synonyme d’expérience et de respectabilité. Raison pour laquelle sans doute, les hommes se coupent moins les cheveux en quatre que les femmes lorsqu’apparaissent leurs premiers cheveux blancs.

Mais les wonder women (ah, les beaux cheveux blancs de la très chic Christine Lagarde, patronne du Fonds Monétaire International) ne font pas bande à part. Le monde de la mode, toujours en recherche de signes distinctifs, s’est lui aussi blanchisé. Il y a bien sûr le talentueux et inénarrable Karl Lagerfeld (Chanel) et sa coiffure poudrée, mais aussi des mannequins comme Kristen McMenamy connue pour avoir arrêté les colorations à 40 ans. Il y eut Miranda Priestley, personnage central du Diable s’habille en Prada, inspiré par l’emblématique rédactrice en chef de Vogue, Anna Wintour et incarné par Meryl Streep. Magnifique Meryl Streep qui, dans la vraie vie, assume elle aussi, comme désormais tant d’autres actrices, leur grisonnement. Et puis il y a toutes celles qui, avec leur peau dénuée de rides, comme Lady Gaga, Katy Perry ou Rihanna ont joué à se teindre en gris, même si là, l’objectif est plus vraisemblablement de faire le buzz.

Aujourd’hui, pas besoin de faire appel à un institut de sondage, il suffit de regarder autour de soi dans la rue pour constater à quel point les chevelures grises sont devenues nombreuses. Banalisées. Au point qu’on ne les remarque plus que si on y prête attention.

Pour quelle raison arrêter les colorations ? Beaucoup avancent leur envie d’en finir avec cette corvée et craignent, en ces temps où on se rend compte qu’on mange et on respire des saletés à foison, les produits chimiques appliqués à même le crâne.

D’autres, trouvent cela beau, tout simplement. Et il est vrai que plusieurs mannequins avec lesquels nous travaillons nous disent que, depuis qu’elles ont laissé leurs cheveux gris, leur visage a acquis plus de caractère... et elles se voient proposer davantage de contrats qu’à l’époque où elles se teignaient.

Certaines femmes brandissent leur blanche toison comme une déclaration de guerre aux diktats !

Enfin, il y a celles qui brandissent leur blanche toison comme une affirmation de soi (c’est moi, je suis comme ça, je ne mens pas) ou, de manière plus politique, comme une déclaration de guerre à la norme établie et aux diktats. Ce qui est évidemment éminemment louable, à condition... de ne pas remplacer une injonction (sois belle, sois jeune) par une autre (sois vraie, sois grise). Car, sur la base de bonnes intentions, est né un mouvement très prosélyte (les réseaux sociaux sont à cet égard une extraordinaire caisse de résonance) et c’est là que le bât blesse. En effet, si les grises se voient jugées par des réflexions qui sont d’une violence inouïe, dès le moment où elles abordent la cinquantaine, les teintes s’entendent aussi poser la question :  » Mais pourquoi te teins-tu encore ? C’est tellement mieux de ne pas et blablabla.  » Parce que ça ne me va pas, parce que je n’ai pas envie ! Mais pourquoi faut-il se justifier ? Et la pression augmente encore lorsqu’on avance en âge. 80 ans ?  » Comment, tu vas être la dernière à rester blonde et blablabla !  » Et alors ? Pourquoi devrait-on renoncer à ce moment de recoiffage de moral chez le coiffeur si on le vit comme tel ?

Je reprends les mots de mon coiffeur, Henri, qui arbore, lui, une magnifique chevelure immaculée :  » Pourquoi faudrait-il se torturer ? Le blanc ne va pas à tout le monde et peu ont naturellement un beau blanc comme l’actrice Denise Grey. Tout le monde n’a pas envie d’être confronté à un changement d’image. Il faudrait aussi parler de celles qui font machine arrière... Ce qui est important, c’est d’être en accord avec soi-même « .

Mais quelle que soit la raison de ne plus se teindre, il est clair qu’aujourd’hui, il ne s’agit plus d’un renoncement. Aujourd’hui, il n’est plus un âge qui sonne le glas de la séduction. Toutes témoignent : les cheveux blancs n’empêchent pas les attirances et parfois les favorisent. Il y a dix ans, nous le clamions : les cheveux blancs, c’est sexy. On persiste et signe !

7 choses que les (futures) grises doivent savoir

Passer au gris, ce n’est pas seulement signer la fin de la corvée des colorations ou changer de couleur de cheveux, c’est aussi changer d’identité physique et devoir revoir son look...

Carmen Dell'Orefice, mannequin, 86 ans
Carmen Dell’Orefice, mannequin, 86 ans© ISOPIX

1. Se poser les bonnes questions

Francoise Hardy, chanteuse
Francoise Hardy, chanteuse© BELGAIMAGE
Passer au gris, même lorsqu’il s’agit d’un choix délibéré, reste confrontant. C’est toujours le cas lorsqu’on change de couleur de cheveux ; ce l’est encore davantage avec le gris/blanc qui est un signe de l’âge. Le regard des autres sur nous change, bien sûr, mais avant tout le nôtre sur une image que nous rencontrons plusieurs fois par jour reflétée dans un miroir ou, à l’improviste, dans les vitres d’un bus. Suis-je prête à passer le pas ? Et en ai-je vraiment envie ? Avant de passer à l’acte, essayez une perruque. Non, le gris, qui a le pouvoir de révéler la beauté de certaines, ne met pas tout le monde en valeur. A chacune de voir. De toute manière, arrêter les colos ne présente aucun danger pour les cheveux (en voilà un bel euphémisme) et tout essai est réversible.

2. Bien vivre l’entre-deux

Avant d’avoir de beaux cheveux gris, il faut passer par la case vilaines repousses. Un stade d’autant plus difficile que beaucoup penseront que vous vous négligez et ne manqueront pas de vous le taire sentir. Le premier conseil est de se blinder psychologiquement et de préparer quelques réponses humoristiques. Pour le reste, la patience est de mise. Mais on peut donner un coup de pouce à la nature, en réalisant des mèches et, dès que possible, en coupant plus court pour essayer d’homogénéiser. Certaines choisissent de mettre une perruque le temps que toute la chevelure soit passée au gris.

3. Entretenir son gris

Emmylou Harris, chanteuse et musicienne
Emmylou Harris, chanteuse et musicienne© ISOPIX

Que celles qui laissent libre cours au blanc pour être libérées du coiffeur et des autres contraintes de soins capillaires retournent à la case départ. Car le cheveu blanc est du style hyper-sensible qui attrape tout ce qui passe. Impuretés, pollution, il absorbe tout cela avec entrain. Dépourvu de mélanine, il est fragile et se fait allègrement molester par les UV. Pour contrer le cheveu cassant et terne, à la structure frisottante ou rigide et rêche, il existe toute une panoplie de produits spécifiques et efficaces destinés à hydrater, protéger, nourrir sous forme de shampooings, après-shampooings, masques, sprays... Il existe par ailleurs toute une batterie de produits anti-jaunissement qui ont le pouvoir d’éviter que ce beau blanc aristocratique ne vire au jaune, ce qui est encore plus vrai chez les fumeuses. Le bon truc : le shampooing sec pour cheveux gris et blancs qui déjaunit tout en donnant du volume. Ceci dit, pour un beau gris, il convient parfois de prendre rendez-vous avec un bon coloriste. Long ? Court ? Mi-long ? Tout est possible à condition que la coupe soit soignée. Sachez que le vrai blanc a souvent un rendu plus jeune et plus tendance que le gris.

4. Adopter sa garde-robe

Ce qui vous sied en brune ne vous flatte pas nécessairement en grise. Notre credo, c’est qu’il faut tendre à être bien dans son âge. Mais, soyons sérieux, l’objectif n’est pas non plus d’avoir l’air plus âgée. Or, le cheveu blanc, est, par nature, et sauf exception, un marqueur de l’âge. Ce qui veut dire que, pour éviter de le renforcer, il ne faut pas lui adjoindre d’autres signes liés au vieillissement sous peine d’accélérer la course du temps. Sans pitié, on se séparera de tout ce qui est vieillot, usé, élimé, plus au goût du jour ou pendouille. Attention à tout ce qui est à la mode aujourd’hui et est ravissant sur une jeune fille, comme les jupes à fleurettes, les imprimés sixties, le manteau en fourrure hérité de notre grand-mère ou des couleurs vintage comme le vieux rose qui donnera, sur nous, l’impression que nous avons emprunté la machine à voyager dans le temps depuis la station 1965. Suivre la dernière mode n’est pas nécessairement intéressant, mais s’inscrire dans l’air du temps bien.

Jamie Lee Curtis, actrice
Jamie Lee Curtis, actrice© GETTYIMAGES
Bien sûr, la sobriété est une valeur sûre, mais la mode est un plaisir et on aurait tort de ne pas en profiter. D’autant plus que, quand on passe au gris, il faut l’assumer fièrement. A vous, les tenues fortes et audacieuses, les gros bijoux, les robes à motifs sophistiqués, les couleurs. Et le noir très stylé. Pour celles dont la chevelure est à dominante blanche, contrairement à l’idée reçue, il faut éviter de jouer le mix de vêtements trop colorés, car cela tourne vite vite au carnaval. En cas d’hésitation, on retient que le monochrome a beaucoup plus de classe. Le détail qui fait la différence : on assortit son rouge à lèvres et son vernis à son sac ou ses chaussures. Le cheveu blanc n’aime pas le doré, mais adore l’argenté (tendance de l’hiver 2017) et les brillances. Pour le reste, impossible d’édicter des règles, l’essentiel étant de tenir compte de son style et de sa carnation. Le total look blanc, par ex., est merveilleux pour celles qui ont le teint mat mais donne l’air malade aux teints clairs.

5. Solliciter un regard extérieur

Il est amusant de constater que les femmes qui passent au gris s’habillent spontanément de façon plus féminine. Je me souviens de cette lectrice, la soixantaine, arrivée en vêtements de sport informes dans le studio de notre photographe en clamant :  » Moi, je ne me sens bien que comme ça « . Point. Pour les besoins de la photo, nous l’avons habillée en robe, talons hauts, coiffée, maquillée, bijoutée. L’observer en train de se découvrir en jolie femme devant le haut miroir, avec une immense émotion, compte sans aucun doute parmi les souvenirs les plus gratifiants de ma carrière. Ceci pour vous dire que lorsqu’on procède à un changement aussi radical que passer d’une couleur de cheveux à une autre, et donc, d’une partie importante de sa garde-robe, il est intéressant de demander conseil à des  » regards neutres « , à des personnes qui n’ont pas de lien affectif avec vous (coiffeur, esthéticienne, conseiller en image...).

6. Revoir son make-up

Helen Mirren, actrice
Helen Mirren, actrice© ISOPIX

Il est fort à parier qu’en changeant de couleur de cheveux, votre palette habituelle de maquillage ne conviendra plus non plus. Petit mot liminaire : le maquillage est indispensable si on ne veut pas taire grise mine. Pas besoin d’en taire trop, mais un petit coup de rouge à lèvres donne immédiatement meilleure mine. Et puis, il y a le teint qu’il faut nécessairement rehausser avec un fond de teint proche de sa carnation naturelle. Pour les yeux, on se dirigera vers l’argenté, les couleurs froides et de toute manière brillantes car le mat a tendance à assombrir le visage. Pour les lèvres, oui aux couleurs qui claquent, oui au fuchsia et au rouge cerise ; en règle générale, non à l’orange. Avec l’âge, les sourcils ont tendance à s’affiner et c’est tant mieux pour celles qui arborent les cheveux à tendance plutôt blanche. Dans le cas contraire, et s’ils sont restés très foncés, il faut veiller à les estomper un peu. Les coiffeurs peuvent procéder à une petite décoloration.

7. Voir et être vue

Et, enfin, n’oublions pas les lunettes, pour celles qui en portent, poste non négligeable s’il en est, car la monture doit être en adéquation avec le reste du look tout en s’adaptant à la structure de votre visage. Là aussi, il ne s agit pas de pécher par trop de timidité. Des lunettes un brin originale avec des cheveux blanc, cela renforce encore votre personnalité ! Non, les grises ne sont pas de discrètes petites souris !

Craquantes, les tempes grises?

Je viens de fêter mes 54 ans et ils ont encore gagné du terrain. Mes premiers cheveux blancs, je m’en souviens très bien, sont apparus sournoisement au détour de la quarantaine. Très discrets dans ma chevelure châtain. Dans un premier temps, ils m’ont même amusé :  » Ben ça alors, j’aurais jamais cru que ça m’arriverait pour de vrai ! « . Le souci, c’est que, depuis, la discrétion ils n’en ont plus rien à faire et que, sans gêne aucune, ils ont envahi mes tempes ! Les bonnes copines, pleines de sollicitude face au mâle vieillissant, me rassurent gentiment  » Un homme aux tempes grises, c’est trop craquant ! « . Euh, bon, d’accord, mais mes cheveux blancs ne vont pas s’arrêter en si bon chemin. Ils vont continuer à conquérir le reste de mon crâne. Que faire ? Me laisser séduire par la teinture à domicile ? Rater mon coup, me retrouver avec des reflets roussâtres et devoir porter une casquette de base-bail pendant quelques semaines ou me raser la tête ? Ou faire confiance à un pro et devoir répéter la manoeuvre tous les quinze jours pour éviter la repousse ? Mmmmmmmh, rien de bien excitant ! D’autant plus que ma barbe de trois jours, elle, est constellée de poils blancs. Et que, un étage plus bas, quelques poils blancs, toujours eux, prennent un malin plaisir à faire coucou dans l’ouverture du col de ma chemise. Ma solution, pour le moment ? Porter les cheveux très courts et éviter de me regarder dans un miroir, parce que, franchement, quand je ne me vois pas, je ne pense pas une seule seconde à leur couleur !

SERGE LVOFF

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