J’ai testé : les coulisses d’un chocolatier

 » C’est en 1857 que Jean Neuhaus, immigré suisse, ouvre une officine à la Galerie de la Reine, en plein coeur de Bruxelles. Pour adoucir les médicaments, il les enrobait de sucre. Au fil du temps et des générations Neuhaus, l’officine se transforme en confiserie avec l’invention de la praline belge en 1912 et trois ans plus tard du ballotin luxueux qui remplace le cornet. Aujourd’hui, ces pralines sont encore tout à fait belges, fabriquées ici à Vlezenbeek !  » Voilà, en (très) résumé, l’historique de la société que nous dresse son patron Jos Linkens, avant d’entamer une visite instructive dans les ateliers qui produisent des milliers de pralines par jour...

Des odeurs alléchantes

Avec une poignée d’autres gourmands curieux, j’enfile une blouse blanche, un chapeau, de jolis chaussons bleus et je me désinfecte les mains. C’est parti pour la visite ! Caroline Vindevogel, responsable de la communication, nous guidera. A peine avons-nous franchi la porte menant aux ateliers que l’agréable odeur du chocolat chaud, des ganaches et des noix grillées titillent nos narines. On découvre d’abord la cuisine où un maître chocolatier montre comment tempérer le chocolat.  » Comme le chocolat a 50°, je vais faire descendre sa température en le manipulant sur cette grande table de marbre « , explique David Deyaert en étalant l’alléchante masse brune à l’aide d’une spatule et en répétant ce mouvement rapide. C’est grâce à une bonne température que la praline brille et croque... On quitte la cuisine pour descendre dans les ateliers. Sur le trajet, mes papilles s’excitent follement à la vue de massifs cylindres de massepain prêts à être transformés en bouchées nappées de chocolat.

Une activité captivante

Nous traversons ce grand espace en longeant les diverses lignes de productions. Les imposantes et bruyantes machines s’agitent. Les pralines naissantes défilent paisiblement sur les tapis interminables. Les travailleurs s’appliquent à leur poste avec minutie. L’activité qui m’entoure est captivante... Ici, à la chaîne à nougatine, j’admire le travail d’une dame qui place calmement, avec une précision indispensable, les carrés de nougatine dans les emplacements qui lui sont réservés. Ah, chouette, on peut goûter un morceau de cette délicieuse confiserie qui sert de base aux pralines Caprice et Tentation. Saviez-vous que ces dernières étaient les stars chocolatées de l’Exposition universelle de 1958 ? Plus loin, une dizaine de mains féminines et masculines fourrent ces nougatines de crème fraîche avant de les déposer sur un tapis qui les conduira sous un fin rideau de chocolat puis au frigo. En fin de parcours, j’ai la chance d’en déguster une (même deux...) Miaaam, une praline à la fois fondante et croquante. On passe à une autre ligne de production pour découvrir l’élaboration de la praline Albert, créée en 1959 à l’occasion du mariage du prince avec Paola. Les moules sont chauffés avant d’accueillir une mince couche de chocolat qui servira de coquille dans laquelle une machine déposera une noisette par empreinte avant son remplissage avec du praliné. Et, bien, sûr, on en savoure quelques-unes en fin de course. La visite se poursuit en longeant la ligne des truffes, celle des pralines à la framboise et enfin le département emballage. Ici, pas moins de neuf personnes sont alignées : l’une après l’autre, elles remplissent les ballotins au fur et à mesure de leur avancée sur le long tapis roulant.  » Quand il y a un doute sur la qualité esthétique des pralines, on les retire du circuit pour ensuite les vendre à prix avantageux dans la boutique, sur ce site « , précise Caroline Vindevogel en pointant du doigt quelques douceurs déposées dans une caisse qui séparent les travailleuses. Allez, nous, nous allons en fabriquer de magnifiques pralines sans aucun défaut (hum, hum...). Direction la cuisine !

Mes propres pralines

Comme les vrais, j’enfile une toque et je m’installe devant le plan de travail où nous allons réaliser des mendiants. Quelle bonne idée ! J’opte pour mon chocolat préféré, celui au lait.  » Appuyez sur la poche tout en la tournant entre vos doigts et en visant au milieu du cercle dessiné sur le papier de cuisson « , explique le maître chocolatier Gilles Dupont. Je m’applique pour que le chocolat ne déborde pas des cercles tout en réfléchissant déjà aux ingrédients que je déposerai sur mes mendiants. Des amandes ? Des raisins secs ? Des pistaches ? Des morceaux de framboises ? Des violettes ? De la meringue ? Le choix est difficile mais je dois agir car le chocolat commence à durcir ! Bon, ben ce sera un mélange d’un peu de tout, voilà ! J’enfonce bien les fruits secs dans le chocolat et, hop, mon oeuvre est placée au frigo pendant un quart d’heure. Juste le temps de m’immiscer dans l’atelier voisin : celui des iconiques pralines Caprice. Armée d’une poche, je vise – assez maladroitement, disons-le franchement – dans l’orifice de la nougatine pour la garnir de crème fraîche à la vanille de Madagascar, avant de la plonger dans une casserole de chocolat fondant. Je récupère la praline avec une fourchette qu’il faut ensuite bien tapoter sur le rebord du récipient afin d’éliminer les éventuelles bulles d’air. Je confectionne quelques pralines tout en grignotant une poignée de pistaches chipées sur l’autre table... Voilà, il ne reste plus qu’à attendre que toutes nos créations originales sortent du frigo. Sûrement que ces pralines  » picassiennes  » sont impropres à la vente mais pas à mon estomac en tout cas. D’ailleurs, ô chance, je peux emporter mes propres chocolats, pour le plus grand bonheur de ma famille et de mes gourmands collègues de la rédaction ! En tout cas, après avoir vu et testé le travail fourni, je dégusterai désormais les pralines avec un regard, enfin plutôt un palais, différent...

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