© iStock

Ostéoporose, immunité, diabète: le rôle essentiel de la vitamine D

Julie Luong

Dans nos pays peu ensoleillés, une grande partie de la population présente des taux trop bas de vitamine D. Ostéoporose, immunité, diabète : cette vitamine joue pourtant un rôle essentiel dans notre santé.

Sommes nous tous déficients en vitamine D ? Tout d’abord, il faut savoir qu’il ne s’agit pas véritablement d’une vitamine. La vitamine D est en fait une pro-hormone liposoluble. Peu présente dans l’alimentation, elle est essentiellement synthétisée à partir d’un dérivé du cholestérol sous l’action des rayonnements UVB du soleil. Sous nos latitudes, une majorité de personnes serait en déficit de vitamine D, en particulier durant les mois d’hiver.

L’immunité

Plusieurs études ont montré que des taux élevés de vitamine D permettaient de réduire le risque d’infections hivernales comme la grippe et les rhumes. « Comme souvent, les preuves sur l’homme sont insuffisantes. Mais les modèles cellulaires et animaux nous montrent en effet que lorsque les taux de vitamine D sont suffisamment importants, les macrophages parviennent à synthétiser un peptide qui est un antibiotique naturel, capable notamment de détruire le bacille de Koch, responsable de la tuberculose ». Un indice encourageant.

 » Nous avons montré que sur une population d’étudiants en bonne santé, 50% présentaient des taux inférieurs à 12 ng/ml (nanogrammes par millilitre) de 25hydroxyvitamine D au mois de février, explique le Pr Etienne Cavalier du service de Chimie clinique du CHU de Liège. Or, s’il n’y a pas de véritable consensus chez les spécialistes autour du taux idéal, on s’accorde à dire qu’il ne faut pas descendre en dessous de 20 ng/ml. Certains pensent même qu’il faudrait atteindre des concentrations autour de 30 ou 40 ng/ml. Si le déficit de vitamine D n’épargne pas les jeunes, il est plus fréquent encore chez les aînés : un phénomène lié à la sédentarité (et donc à une moindre exposition au soleil) mais aussi à une diminution de la capacité de la peau à synthétiser cette prohormone lorsqu’on avance en âge. « 

Le cancer

De nombreuses études ont tenté de montrer le lien entre une carence en vitamine D et certains cancers comme le cancer colorectal, mais aussi le cancer de la prostate, le cancer du sein ou du pancréas. « Ces études sont aujourd’hui insuffisantes et méritent d’être confirmées », tempère le Pr Cavalier. Même son de cloche du côté de la Fondation contre le cancer qui estime qu’il est« prématuré de faire des recommandations ».

À quoi sert-elle ?

Un léger déficit en vitamine D n’est pas à proprement parler dangereux. Il ne provoque en général pas de symptômes particuliers. Mais les études actuelles tendent à montrer que maintenir un taux suffisant de vitamine D contribuerait à une meilleure santé. » On sait depuis longtemps que la vitamine D est essentielle pour maintenir des taux suffisants de calcium et qu’elle joue donc un rôle majeur dans la santé osseuse. Mais ce qu’on a découvert récemment, c’est que outre les cellules rénales qui sont connues pour posséder une enzyme capable d’activer la vitamine D, la plupart des autres cellules de notre organisme possèdent également cette enzyme et le récepteur à la vitamine D, ce qui leur permet de fabriquer de la vitamine D « , explique le Pr Cavalier. Cette substance serait donc impliquée dans toute une série de fonctions clefs de l’organisme. D’où la multiplication des études scientifiques au cours des quinze dernières années.

La santé osseuse

Indispensable à la croissance durant la petite enfance et lors du pic de masse osseuse à l’adolescence, la vitamine D joue également un rôle majeur dans la prévention de l’ostéoporose. Rappelons que le risque d’ostéoporose croît avec l’âge et concerne en majorité les femmes. Outre l’hygiène de vie, la supplémentation en calcium et vitamine D représente aujourd’hui la principale prévention de cette maladie.

Pourquoi ce déficit ?

S’exposer au soleil à raison de 10 à 15 min par jour est une bonne manière de faire le plein de vitamine D. Néanmoins, la prévention du mélanome est passée par là : nous sommes aujourd’hui très méfiants quand il s’agit de faire bronzette. Et les protections solaires bloquent la synthèse de la vitamine D à 99 % !  » Prendre le soleil un quart d’heure sur le temps de midi pourquoi pas, mais il ne faut pas perdre de vue que, pour synthétiser la vitamine D, nous devons exposer une grande surface de peau, rappelle le Pr Cavalier. Les mains et le visage, ça ne suffit pas. Il faut aussi exposer les jambes et/ou les bras, ce qui n’est pas toujours compatible avec le climat et avec nos modes de vie. Rappelons par ailleurs que la Belgique se trouve très au nord de l’hémisphère ! Cela signifie qu’à partir d’octobre et jusqu’en avril, nous aurons beau nous exposer au soleil cela n’aura aucun effet sur l’augmentation de notre taux de vitamine D. »

Le diabète

Une étude a montré récemment qu’une supplémentation en vitamine D avait un effet bénéfique sur le contrôle de la glycémie chez des personnes atteintes de diabète de type 1. Concernant le diabète de type 2 – le plus fréquent -, certaines études suggèrent aujourd’hui qu’un déficit en vitamine D pourrait favoriser l’apparition de la maladie : cette substance jouerait en effet un rôle important dans la sécrétion d’insuline et la résistance à l’insuline.

Quant à l’alimentation, elle nous fournit au maximum 20% des apports recommandés.  » Il faudrait que vous mangiez des steaks de thon tous les jours pour couvrir vos besoins... et encore « , plaisante le spécialiste. Les aliments naturellement riches en vitamine D sont en effet très peu nombreux. Le saumon est le champion toute catégorie, suivi du thon rouge, du hareng, du lait et des yaourts. Sans oublier les huiles de poisson comme l’huile de foie de morue, que l’on donnait autrefois pour prévenir les carences en vitamine D avant l’arrivée des compléments... moins pénibles à avaler.

L’obésité

Les personnes en surpoids sont très souvent carencées en vitamine D, ce qui a fait dire à certains qu’une supplémentation en vitamine D pourrait prévenir l’obésité. Mais de nombreux scientifiques pensent que la plus grande capacité de stockage des personnes obèses (la vitamine D étant stockée dans les cellules graisseuses) empêche en réalité cette vitamine de circuler normalement dans le sang. Cause ou conséquence : le débat reste aujourd’hui ouvert autour de la « vitamine du soleil ».

Faut-il se supplémenter ?

 » Rappelons qu’à l’origine, nous sommes des chasseurs-cueilleurs à peau foncée venus d’Afrique qui étions en permanence exposés au soleil. Aujourd’hui, nous peinons logiquement à atteindre des taux suffisants. «  Pour autant, faut-il envisager de supplémenter l’ensemble de la population ou d’enrichir systématiquement certains produits alimentaires comme les yaourts ou le beurre, ainsi que le font déjà les États-Unis ou la Finlande ?  » Le problème d’une supplémentation à grande échelle est que tout le monde ne mange pas la même chose. Certains resteront déficients », estime le Pr Cavalier.

Les maladies cardiovasculaires

Plusieurs études suggèrent un lien entre un faible taux de vitamine D et un risque accru de maladies cardiovasculaires. La vitamine D permettrait notamment de réguler la tension artérielle. « Le problème est qu’actuellement, les études ne permettent pas de dire si les personnes sont plus à risque parce que plus sédentaires – et donc davantage carencées en vitamine D – ou si c’est un effet direct de la vitamine D »,analyse le Pr Cavalier.

Si la vitamine D n’est toxique qu’à des doses très élevées (avec un risque pour les reins), il faut aussi noter que certaines personnes – peu nombreuses – présentent une mutation de l’enzyme qui dégrade la vitamine D : à grande échelle, la supplémentation crée donc pour elles un risque potentiel.

Les chutes et les fractures

Le risque de chute et de fracture diminue chez les personnes qui prennent chaque jour 800 unités de vitamine D. C’est ce qu’a pu établir une étude suisse menée auprès de personnes ayant déjà fait des chutes sérieuses. Inutile, en revanche, de prendre une plus forte dose, car au sein du groupe étudié la protection n’a pas semblé meilleure au-delà de 800 IE par jour.

Ceci étant dit, pour la plupart des adultes, une supplémentation entre 800 et 2.000 UI (unités) par jour pourrait s’avérer bénéfique, en particulier durant les mois d’hiver.

 » Il est très délicat de donner des recommandations générales. Ce qu’on sait, c’est que si on reste dans cette zone-là, on ne prend pas vraiment de risques « , assure le Pr Cavalier. Selon votre âge, votre mode de vie et vos problèmes de santé spécifiques, votre médecin peut vous conseiller sur l’opportunité d’entamer une supplémentation. En Belgique, la vitamine D est en vente libre. Le tout est évidemment de ne pas se tromper dans les dosages. » Il faut surtout être prudent avec les complexes vitaminiques qui peuvent contenir d’autres composants comme la vitamine A, potentiellement toxique « , rappelle encore le spécialiste.

La mémoire et la démence

Tout semble indiquer que la vitamine D influencerait de manière positive le fonctionnement du cerveau. Une récente étude internationale l’atteste : la carence en vitamine D s’accompagne d’une baisse de la vue et de la mémoire. Une étude britannique menée auprès de personnes de 65 + a également pu établir qu’un faible taux de vitamine D dans le sang augmente le risque de développer la maladie d’Alzheimer. Des tests expérimentaux sont actuellement menés et devraient nous dire si une supplémentation en vitamine D permet de freiner ce processus.

Contenu partenaire