Les hôpitaux s’humanisent

Les hôpitaux multiplient les initiatives pour se rendre plus chaleureux, pratiques et efficaces. Architecture, repas, information... Tout est repensé pour le bien-être des patients.

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On connaissait les clowns, qui viennent faire sourire les petits patients de pédiatrie, ou encore les nombreux bénévoles, qui se relaient inlassablement pour accompagner un patient à la consultation, pousser une chaise roulante... Mais aujourd’hui, les initiatives foisonnent pour faire de l’hôpital un lieu plus accueillant et plus humain.

Architecture : on pense à tout !

Elles n’ont l’air de rien les chambres d’hôpital ? A première vue peut-être. Mais leur conception n’est pas laissée au hasard. Le choix des matériaux, la couleur des murs, l’éclairage, et une foule de détails qui échappent souvent à l’oeil du malade, sont longuement réfléchis.

Aux Cliniques Saint-Luc, à Bruxelles, le service de soins intensifs, rénové, a été inauguré en mai 2007.  » Nous avions deux problèmes : un manque de lits et un manque de surface, raconte Françoise Colleye, assistante de gestion en médecine aiguë. L’architecture n’était plus adaptée, depuis 1976. Notre priorité ? Le patient. Nous avons aussi voulu limiter l’angoisse, l’impression de lourdeur, liée à la présence d’appareils médicaux. Nous sommes partis d’études sur le vécu du patient en soins intensifs. On a relevé un manque de sommeil (bruit, alarmes, lumière...), et un manque d’intimité. Le résultat ? Une chambre isolée, qui réduit les nuisances sonores et lumineuses, et garantit hygiène et intimité « . Les détails sont partout : des matériaux qui accrochent moins la poussière, le choix du mobilier, des couleurs gaies sur le mur...

 » Nous avons beaucoup investi dans la gestion de la lumière, en faisant jouer un cycle jour/nuit : la lumière démarre doucement le matin, est au maximum vers midi, puis diminue. Le patient garde ainsi la notion du temps. Tout cela est adapté à chaque chambre, selon la pathologie du patient, et géré par ordinateur. Autre amélioration, l’installation de petits spots dans les murs, pour la nuit : les infirmières peuvent entrer et vérifier un drain, un monitoring, sans allumer les néons et réveiller le patient ! « 

Huit programmes musicaux sont à la disposition des malades.  » Ils permettent de diminuer l’angoisse et la douleur, selon des études scandinaves. La musique isole aussi le patient des nombreux bruits des soins intensifs. « 

Enfin, des lieux d’accueil ont été aménagés.  » Ce sont de petits parloirs, au mobilier confortable, pour se retrouver après un décès ou pour attendre des nouvelles du patient, etc. « 

A Liège, au CHU, on a pensé à l’accueil.  » Quoi de plus impressionnant qu’un hall d’hôpital ?, demande Manuel Merodio, de la direction générale du CHU. Nous avons mis en place un poste avancé. C’est une rotonde esthétique et bien visible, au milieu du hall, pour accueillir et diriger les gens. « 

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L’alimentation prend du galon

Le plateau d’hôpital ? Pas réputé pour redonner le moral ! Mais des initiatives commencent à voir le jour.  » Le repas doit être un moment de bien-être et de réconfort, souligne Manuel Merodio. Ici, nous avons changé d’opérateur. C’est un effort financier pour l’hôpital, mais il en vaut la peine. Les repas sont plus variés, et de meilleure qualité. Une équipe de diététiciennes prend en compte la pathologie du patient, mais aussi ses exigences particulières justifiées. « 

A Mons, l’hôpital Ambroise Paré a mis en place une initiative originale. Depuis trois ans, les patients sont au régime... méditerranéen !  » L’idée est de faire comprendre au patient ce qu’est une alimentation équilibrée, explique Corine Depresseux, coordinatrice diététicienne. L’alimentation méditerranéenne est le modèle par excellence, que ce soit pour des pathologies cardiovasculaires, en diabétologie, en oncologie... Le patient se voit proposer davantage de fruits et légumes, des céréales complètes, une cuisine à l’huile d’olive et non au beurre, etc. C’est un choix de la direction, qui a voulu revaloriser l’alimentation : ce budget a augmenté de 30 %.  » L’établissement s’est aussi fixé comme objectif de dépister la dénutrition à l’hôpital.

Au CHU Saint-Pierre, à Bruxelles, comme dans plusieurs hôpitaux, le patient peut également choisir un menu adapté à ses convictions philosophiques et manger casher ou halal, par exemple, si toutefois sa pathologie le permet.

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L’humanisation des soins

Peu diplomates, les médecins ? Ou débordés, un peu endurcis, voire un peu maladroits ? Communiquer au patient un diagnostic de cancer ou un mauvais résultat d’examen n’est pas chose aisée. Mais pour le patient, recevoir cette information l’est encore moins.

Au Centre hospitalier de Mouscron, le Dr Franck Cornelis, chef de service de cancérologie et hématologie, s’est penché sur la question. Avec un objectif : l’humanisation des soins.  » Notre souci est d’améliorer l’accompagnement du patient et de sa famille après l’annonce du diagnostic de cancer, avant la mise en route du traitement, explique-t-il. Grâce à notre  » consultation oncologique globale systématique « , qui a remporté le Prix Gert Noël 2006 de la Fondation Roi Baudouin, chaque nouveau patient et sa famille sont reçus systématiquement par le médecin, l’infirmière, la psychologue et la diététicienne. Mieux informé, le patient affronte le diagnostic et le traitement de façon plus sereine. Nous envisageons d’élargir cette approche à d’autres services. C’est un investissement en temps de la part de chaque soignant, et un investissement financier de la part de l’institution. « 

Aux Cliniques universitaires de Mont-Godinne, l’humanisation des soins est également une préoccupation.  » Mais c’est plus un état d’esprit que des actions particulières, souligne Benoît Hallet, directeur administratif. Pour quiconque travaille chez nous, le patient est la priorité. Si une infirmière a deux actions à mener en même temps, par exemple, et si l’une concerne le patient, elle n’hésitera pas. Nous n’oublions pas que le patient est dans une situation défavorisée : il est affaibli, n’a pas le  » savoir « . On l’informe, on répond à ses questions. « 

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La communication

Comme toute entreprise, l’hôpital travaille sa communication. Ainsi, au CHR de Namur, de nouvelles brochures viennent d’être élaborées.  » L’une est une brochure d’accueil général, explique François Nelis, responsable de la communication. Elle donne des chiffres, des infos sur le fonctionnement de l’hôpital, l’organigramme médical, etc. La deuxième est destinée aux patients qui vont se faire hospitaliser. Elle fournit des informations pratiques, pour démystifier l’entrée à l’hôpital. Une troisième concernera la maternité. « 

Informer les patients sur place est aussi dans l’air du temps. Au sein des Cliniques Saint-Luc, l’Espace Roseau accueille des associations de patients.

 » Nous avons sept associations, chacune représentant une pathologie différente, explique Cécile Van Achter, coordinatrice. Nous espérons en accueillir d’autres. Les patients peuvent y rencontrer des bénévoles qui les informent, répondent aux questions, distribuent de la documentation, etc. « 

La communication se retrouve jusqu’au lit du patient ! A Saint-Luc, par exemple, des terminaux multimédias viennent d’être installés auprès de 56 lits, en cardiologie et en chirurgie digestive.  » Ce sont des écrans tactiles, avec accès TV, internet, et clavier numérique permettant de répondre aux emails, d’écouter la radio, de trouver des informations médicales à destination du patient, explique Nicolas Rolin, chef de projet. C’est un service payant. Cette demande ressortait de nos enquêtes de satisfaction. Le terminal permet de diminuer le sentiment de solitude du patient. Nous envisageons d’étendre cet accès à tout l’hôpital, en plusieurs phases. « 

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Des maisons d’accueil pour les proches

Comment rester aux côtés d’un proche hospitalisé ? Pas évident, quand on vient de loin, voire de l’étranger... Désormais, la Belgique compte sept maisons d’accueil (Cliniques Saint-Luc, Cliniques de Mont-Godinne, hôpital Erasme, hôpital Reine Fabiola, Institut Jules Bordet, U.Z. Antwerpen, et U.Z. Leuven). Elles proposent un hébergement à prix modique, à proximité des hôpitaux. Ces maisons ont vu le jour au début des années 80.

 » Avant, l’alternative était de faire des allers-retours fatigants et coûteux entre l’hôpital et chez soi, explique Martine Sangoi, coordinatrice de la maison d’accueil  » Les Coquelicots « , de l’hôpital Erasme. Désormais, les proches peuvent être hébergés pour 10 à 20 ? par jour selon les maisons. Pour le patient, c’est important d’être entouré. Mais l’équipe de soins y trouve également son compte : lorsqu’un patient refuse les soins, ou d’être alimenté, ses proches interviennent, donnent un coup de main. « 

Les maisons fonctionnent grâce à des bénévoles.  » Une règle essentielle est que les personnes hébergées participent aux tâches ménagères. Cet aspect est d’ailleurs positif pour les proches, il les aide à ne pas perdre le fil du quotidien. D’autant que les séjours peuvent durer des semaines, voire des mois. « 

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Les frères et soeurs d’enfants hospitalisés

Un enfant hospitalisé à long terme demande à la famille une sacrée organisation. Surtout quand il y a des frères et soeurs. Aux Cliniques Saint-Luc, à Bruxelles, les ateliers Arcadie donnent un coup de main aux familles.

 » L’enfant, s’il peut se déplacer, peut retrouver ici ses frères et soeurs et faire des activités (peinture, bricolage...), explique Martine Delrée, coordinatrice de l’animation ludique en pédiatrie. Les ateliers sont animés par un artiste-peintre et une équipe de bénévoles. L’objectif est de permettre à l’enfant de rester en contact avec sa famille. Et les parents peuvent aussi y laisser les autres enfants de la fratrie pour aller rendre visite à l’enfant hospitalisé. « 

A l’hôpital universitaire de Gand, un service d’accueil pour frères et soeurs d’enfants hospitalisés a également vu le jour, en février 2006.

 » Les frères et soeurs ne peuvent pas passer beaucoup de temps dans la chambre du malade, pour ne pas le fatiguer, et à cause des risques d’infection, explique Ann Morez, responsable du service. Grâce au service, ils peuvent passer un court moment avec lui, puis venir jouer ici pendant que les parents restent dans la chambre. Ils peuvent aussi participer ici à un de nos ateliers créatifs, avec le malade, si son état de santé le permet. Cela aide les frères et s£urs à ne pas se sentir exclus. Le service ressemble à un living, coloré, confortable, comme à la maison. Il y a des jeux, de la musique, de la peinture... Autre avantage, si un enfant a des questions, des soucis, par rapport à la santé du malade, il n’osera pas toujours en parler à ses parents. Il arrive qu’il profite de son passage ici pour poser des questions aux pédagogues présents dans le service. « 

Pour les petits patients au long cours, il est possible d’être scolarisé pendant la maladie et la convalescence. Différentes associations organisent ce suivi.  » L’objectif est d’assurer la continuité de la scolarité, explique Guy Franck, Vice-président de l’asbl EHD (école à l’hôpital et à domicile). L’asbl fonctionne grâce à des dons, et au dévouement de plus de 400 professeurs bénévoles, en activité ou jeunes pensionnés. « 

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La médiation des plaintes

La médiation des plaintes est obligatoire dans les hôpitaux belges depuis la loi de 2002 relative aux droits du patient.

 » A Notre-Dame de Grâce de Gosselies, les plaintes des patients sont souvent liées aux urgences, à la logistique, au manque de confort, aux attentes trop longues, souligne Anita Goossens, médiateur à la clinique. J’en informe la direction, qui redressera la barre. Certaines plaintes sont récurrentes, précises, et constituent une source d’information pour amorcer des changements. Je remercie les gens d’exposer leurs problèmes : cela nous permet de prendre connaissance de certaines situations. « 

A Wervik, au St-Janshospitaal, les plaintes portent surtout sur des problèmes pratiques.  » Les gens viennent pour une température trop élevée dans les chambres pendant l’été, par exemple, raconte Liesbeth Flo, médiatrice. Il y a peu de plaintes liées aux soins médicaux. Nous relayons cette information à la direction. Parfois, ce ne sont pas les patients qui viennent, mais les infirmières, qui ont entendu les patients ou leur famille parler d’un problème particulier. « 

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Faciliter le travail

Les hôpitaux tournent 24h/24, et les horaires décalés des infirmières sont parfois difficiles à gérer, lorsqu’elles ont de jeunes enfants. Certains hôpitaux ont ouvert une crèche.

 » L’objectif est de leur faciliter la vie, explique Catherine Wagemans, responsable de la crèche des Cliniques Mont-Godinne. La pénurie d’infirmière est un problème et une crèche est un avantage pour le recrutement. Nos horaires sont calqués sur ceux des infirmières « . Une initiative tout aussi bénéfique pour le patient !  » Si une infirmière doit rester un peu plus tard avec un patient, il n’y a aucun de problème : la puéricultrice l’attendra... La crèche permet aussi d’accueillir les frères et soeurs d’un enfant hospitalisé, pendant que les parents ont un rendez-vous médical ou passent du temps avec leur enfant, par exemple. »

Sans oublier la sécurité à l’hôpital. Des familles impatientes d’apprendre un résultat, un patient un peu nerveux... Il n’est pas rare de voir la tension monter entre les murs de l’hôpital. Et les agressions, physiques ou verbales finissent par se produire.

 » Plutôt que de laisser le personnel soignant régler ces situations, certains hôpitaux font appel à des services de sécurité externes, ou mettent en place le leur, pour le bien du personnel soignant et des autres patients, explique Gregory Schwandtner, responsable Communication et Mobilité au CHU Saint-Pierre. Ici, nous avons un service de sécurité interne. L’objectif ? Laisser le personnel faire son travail. L’agent de sécurité est là pour comprendre le problème, l’analyser et prendre des mesures. « 

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