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Le périnée, ça se muscle !

Environ 90 % des femmes de 35 à 75 ans souffrent au moins une fois dans leur vie de fuites urinaires. Bonne nouvelle, il existe plusieurs solutions pour éviter ce genre de désagrément.

Les muscles du périnée ne se voient pas, ce qui explique qu’on les oublie facilement. Rares sont donc les femmes qui les exercent spontanément. Pourtant, un périnée tonique est indispensable.  » Les muscles du plancher pelvien assurent l’ouverture et la fermeture du vagin, de l’urètre et du rectum, précise le Pr Alexandra Vermandel, kinésithérapeute spécialisée en rééducation périnéale. Nous les utilisons à longueur de journée. Quand il y a une file devant les toilettes, ce sont eux qui nous permettent de nous retenir d’uriner suffisamment longtemps, lorsque nous avons un orgasme, ce sont eux qui se contractent en rythme. Lorsque nous allons à selle, ils permettent l’ouverture du rectum. Comme les biceps ou les mollets, le périnée s’entretient. On n’est jamais trop âgé pour muscler cette partie du corps et apprendre à mieux s’en servir, même après des années de négligence. « 

Plus on tarde à traiter les problèmes de fuites urinaires, plus on risque de complications !

Un plancher pelvien affaibli, qui n’est plus capable de se détendre et de se contracter correctement fait courir, à terme, un risque de prolapsus de la vessie et de l’utérus (descente d’organes), et donc de fuites urinaires.  » Les publicités pour les protections féminines semblent suggérer que les fuites urinaires sont une fatalité. C’est totalement faux ! Résultat, seule une femme sur cinq concernée par l’incontinence urinaire consulte un médecin. C’est dommage, car depuis quelques années le monde médical s’intéresse de plus en plus à cette problématique et la science a fait d’énormes progrès, au point que 90 % des troubles trouvent désormais une solution ou une nette amélioration « , insiste le Pr Stefan De Wachter, urologue.

Telle mère...

L’affaiblissement du périnée est lié à différents facteurs. La grossesse et l’accouchement en sont deux.  » Environ 60 % des femmes connaissent des fuites urinaires pendant leur accouchement, un indicateur assez fiable pour la suite. Mais l’hérédité et la morphologie entrent également en ligne de compte. Si votre mère a souffert de fuites urinaires, votre risque est multiplié par trois, puisque vous avez hérité d’un tissu conjonctif moins résistant. La synthèse de collagène (garant d’une peau jeune) a aussi son importance. Toutes les femmes n’en produisent pas la même quantité et la production diminue au fil du temps. Ce processus est responsable de l’apparition de rides mais aussi d’une perte de fermeté de la peau autour du vagin et de l’anus. A la ménopause, la production d’oestrogènes chute fortement, or ces hormones contribuent à stimuler les muscles et les tissus conjonctifs, et à assurer une bonne irrigation sanguine. Citons encore le surpoids et la constipation chronique, responsables d’un excès de tension sur le plancher pelvien. Sans oublier le diabète, la toux chronique et la cigarette. « 

L’affaiblissement du périnée est souvent en cause dans les cas d’incontinence à l’effort, forme la plus fréquente chez la femme.  » Cela se produit typiquement quand on tousse, on éternue, on saute ou on court. Les muscles n’ont plus assez de force pour absorber la pression dans la cavité abdominale et pour fermer hermétiquement l’urètre. Ce n’est pas un problème qui se résout de lui-même. Si cela devient gênant mieux vaut consulter sans tarder. Cette forme de fuites urinaires se traite plutôt bien mais plus on tarde, plus on risque des complications. « 

La force et la condition

Lorsqu’une femme se plaint de pertes urinaires liées au stress ou à des efforts, les muscles du périnée sont les premiers à être dans le viseur.  » Ce sont des muscles qu’on peut renforcer très vite et apprendre à mieux utiliser, à condition de les exercer ! Lorsqu’elle est réalisée correctement, la rééducation périnéale aide les femmes dans 60 à 80 % des cas. Problème, jusqu’à 50 % des femmes ne contractent pas leur périnée correctement, ce qui rend l’exercice vain.  » Dans ces conditions, inutile, en effet, de rentrer chez soi avec une liste d’exercices à faire. Il faut d’abord apprendre la bonne méthode auprès d’un kinésithérapeute spécialisé.

Comptez en moyenne cinq séances pour maîtriser la technique. Prenez rendez-vous chez un kiné spécialisé dans la rééducation périnéale, car tous n’ont pas suivi la formation ad hoc.  » Nous expliquons à nos patients le mode de fonctionnement de ce muscle et dans quelles circonstances il faut le contracter, précise le Pr Vermandel. L’accent est mis autant sur la musculation proprement dite que sur la posture qui permet de maintenir la tension pendant un certain moment. Par un contrôle vaginal manuel, le kiné vérifie que la patiente mobilise les bons muscles. Un appareil de biofeedback traduit visuellement la contraction musculaire. Mais ce petit dispositif ne fera pas l’effort à votre place ! On contrôle également l’importance des fuites urinaires et leur évolution au bout d’un mois d’exercices, à l’aide de protections absorbantes. La rééducation suppose qu’on s’exerce chaque jour chez soi, jusqu’à intégrer les exercices dans une routine quotidienne. Une fois le périnée correctement musclé, il reste à l’entretenir : cinq minutes par jour suffisent. Après, vous pourrez à nouveau courir, danser, sauter... La vie sexuelle a également tout à y gagner. « 

Les exercices sont optimaux lorsque le tissu conjonctif est en bon état.  » Ce n’est pas parce qu’on note un relâchement que les exercices du périnée ne servent à rien, au contraire, mais ils ne suffiront pas, note le Prof. De Wachter. On peut comparer cela avec un tuyau d’arrosage : posé sur un sol mou, vous aurez beau marcher dessus, vous ne pourrez pas l’écraser comme s’il était posé sur un sol dur. La solution passe par une intervention chirurgicale mais, ici encore, il faut muscler le périnée au préalable pour que le résultat soit valable et, surtout, durable. Sans cela, il est inutile d’opérer. « 

Une technique chirurgicale peu invasive

A l’étranger, les suites des opérations du périnée ont pu, voici quelques années, provoquer des complications, avec à la clé l’un ou l’autre scandale qui a laissé des traces sensibles.  » Cela a suscité pas mal d’angoisses et, par manque d’information, beaucoup de femmes ont renoncé à se faire opérer déplore le Pr De Wachter. Depuis, la recherche médicale a encore progressé, et on dispose de centres spécialisés qui recourent à des techniques bien plus ciblées. L’opération est nettement moins invasive qu’avant – on pratique une petite incision au niveau du vagin – et donne d’excellents résultats. L’intervention la plus courante consiste à placer une bandelette synthétique sous l’urètre. Elle s’y fixe, créant ainsi un plancher plus ferme contre lequel le périnée peut se contracter de manière plus efficace. Cette opération n’est pas envisageable pour toutes, le médecin qui décide au cas par cas. »

Après l’opération, il est primordial d’exercer son périnée, d’adopter la bonne posture pour uriner et d’éviter la constipation en se nourrissant correctement pour éviter toute pression inutile.

Dora, 58 ans: « La rééducation a changé ma vie »

Le périnée, ça se muscle !

« Mes problèmes de périnée ont commencé il y a quelques années, après une opération ratée pour traiter une descente de l’utérus. J’ai dû être réopérée, ce qui a atteint localement les tissus et affaibli mon périnée qui est devenu très difficile à contrôler. Heureusement, je me suis adressée à un kiné spécialisé en rééducation périnéale. Il m’a appris à renforcer ce qui me restait de muscles. Cela m’a permis de reprendre une vie normale. Le fait de voir un spécialiste a fait toute la différence, car, au début, je ne comprenais absolument pas quels muscles contracter, puis relâcher. Si seulement j’avais su cela avant mon opération !

J’ai appris toutes sortes de trucs, comme regarder par-dessus mon épaule quand je sens venir un éternuement. Cette torsion, qui peut éventuellement aller jusqu’aux genoux, aide à détendre le plancher pelvien. Sans ces exercices, je serais aujourd’hui quasi incontinente ! Ils sont devenus une sorte de réflexe, dès que je sors du lit. Les femmes font une fixation sur le ventre, les seins et les fesses mais elles devraient surtout penser à leur périnée. C’est bien plus important ! »

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