Carte historique de Namur. © http://www.ngi.be/FerrarisKBR/index.jsp?l=fr

Voyagez dans le temps grâce aux cartes anciennes !

Votre maison à la campagne existait-elle déjà il y a plusieurs siècles ? Où passaient les fortifications de votre ville ? Est-ce à cause d’elles que votre rue a une forme bizarre ? Autant de questions dont les réponses se retrouvent sur les cartes anciennes de Belgique. Bonne nouvelle : elles sont nombreuses à être accessibles gratuitement en ligne !

Si la cartographie est un art qui remonte à l’Antiquité, elle est longtemps restée très approximative. Schématiques ou symboliques, les plans les plus anciens ne reflètent que partiellement la réalité.

La Table de Peutinger, probablement réalisée au IIIe siècle (avec des emprunts plus anciens), est ainsi la carte la plus ancienne dont il nous reste une copie et qui signale plusieurs villes ou relais (en latin, vici) situés sur l’actuelle Belgique : Turnaco (Tournai), Vogo Dorgiaco (Waudrez, près de Binche), Pernaco (Braives) ou Atuaca (Tongres). Il s’agit en réalité d’un recueil d’itinéraires parcourant tout l’Empire romain. Inutile d’essayer de vous y repérer : la carte n’avait pas vocation à être réaliste et se rapproche des plans actuels de métro. Son utilité était avant tout pratique : elle permettait de connaître la distance à parcourir entre deux haltes, les rivières à traverser, etc.

Les cartes du Moyen-Âge ne valent pas mieux, que du contraire : quand elles ne sont pas complètement fantaisistes, elles n’ont aucune validité géographique (Jérusalem est souvent en leur centre, les terres sont entourées d’un océan concentrique) et sont plutôt destinées à la réflexion philosophico-religieuse. Il faut attendre le XIIe siècle pour que les premières cartes marines un tant soit peu réalistes fassent leur apparition. Pour trouver des cartes locales de l’intérieur des terres, il faudra encore patienter un peu... A de rares exceptions près, il est donc impossible de retrouver des cartes de sa ville avant le XVe siècle.

Par la suite, heureusement, les cartes ont tendance à se multiplier. Bonne surprise : de nombreux sites vous permettront de les contempler depuis votre ordinateur, à votre aise et avec la possibilité de zoomer sur les moindres détails. Petit passage en revue des sites qui accapareront vos prochaines heures de temps libre :

Les recueils de cartes

  • Les plans de villes de Jacques de Deventer (conception : 1550-1565) : ces cartes (péri-)urbaines ont été établies à la demande Philippe II d’Espagne. L’atlas qui en résulte regroupe les plans de plus de 220 villes des anciens Pays-Bas et, ajoute-t-on à la Bibliothèque royale, « cette collection est exceptionnelle par son ampleur, son homogénéité et sa précision « . « De plus, pour la plupart des localités, il s’agit de la plus ancienne représentation cartographique conservée. » Une septantaine de plans sont accessibles sur Internet, avec des villes comme Arlon, Wavre, Lessines, Mons ou encore Marche-en-Famenne.
  • La carte de Jean Villaret (conception : 1745-1748) : à la suite des invasions françaises du début du XVIIIe, des ingénieurs-géographes français entreprennent de dessiner la cartographie de nos régions. Parmi eux, Jean Villaret, qui s’occupe de la portion du territoire s’étendant entre Gand/Tournai et Maastricht/Liège. Une carte très intéressante mais qui, malheureusement, ne couvre qu’une petite partie de la Wallonie. Le gouvernement flamand a récemment rendu cette carte librement accessible : si vous vivez à proximité de la frontière linguistique, il y a de fortes chances pour que vous y retrouviez votre commune. A noter que l’intérieur des villes n’a pas toujours été dessiné. (Attention : la carte a été numérisée en haute résolution et d’une seule pièce : les zones sur lesquelles vous zoomez mettent souvent du temps à être chargées, la navigation s’avère un peu pénible ...)
  • La carte du Comte de Ferraris (conception : 1770-1778) : en 1769, le général d’artillerie Joseph-Johann-Franz de Ferraris propose à Charles de Lorraine, gouverneur des Pays-Bas autrichiens, de réaliser une carte détaillée de nos régions. Après des années de travail, il remet aux autorités cet ensemble de 275 pages couvrant presque l’intégralité du territoire de la Belgique actuelle (si ce n’est quelques enclaves étrangères) et une partie des zones frontalières. Un travail cartographique à vocation militaire d’une précision jusqu’alors inégalée dans toute l’Europe occidentale : on y retrouve le relief, les bâtiments, les gués et ponts, les chemins creux, l’occupation des sols, etc. Les cartes sont d’ailleurs encore très utilisées par les archéologues et les historiens actuels. Ajoutons à cela qu’elles sont esthétiquement très plaisantes et qu’une bonne partie des rues et chemins actuels sont déjà présents : il y a là de quoi passer des heures à se balader dans la campagne du XVIIIe siècle !
  • L’atlas des voiries vicinales (conception : 1841) : « Une législation du 10 avril 1841 destinée à localiser l’ensemble des chemins et sentiers vicinaux est à l’origine de cet atlas, explique-t-on sur le géoportail de la Wallonie. Ce type d’atlas existait pour chaque ancienne commune et visait à répertorier et cartographier la petite voirie publique. L’Atlas reconnaît donc les droits de passage acquis par le public sur les sentiers et chemins locaux et en garantit leur protection. Chaque atlas comportait les plans primitifs (plan général détaillé) et la partie descriptive (tableau explicatif des différents tronçons de voirie). » Cet atlas est encore utilisé pour prouver l’existence de servitudes de passage ou de sentiers publics, de plus en plus souvent sauvagement privatisés par des propriétaires peu désireux de voir des promeneurs passer sur leurs terrains. Le site ici mentionné ne couvre que la Région wallonne.
  • La carte de Philippe Vandermaelen (1846-1854) : lorsque la Belgique prend son indépendance, en 1830, il apparaît rapidement qu’il est nécessaire d’établir une carte précise du territoire. Philippe Vandermaelen, chargé de cette mission dès 1831, établit notamment une carte de la Belgique à l’échelle 1/20.000e. Là encore, il s’agit d’une mine d’informations pour les historiens et archéologues : « Le bâti et les voies de communication sont représentées, ainsi que des éléments d’occupation du sol. Les courbes de niveau, inventées vers le milieu du XIXème siècle n’apparaissent que sur une partie des feuilles« . A noter que les Cantons de l’Est, qui ne rejoindront le giron de la Belgique qu’après la Première Guerre mondiale, ne sont – en toute logique – pas représentés. Dans un même registre, en couleurs et un peu plus tardive, il existe aussi une Carte du dépôt de la Guerre (1865-1880). Les sites ici mentionnés ne couvrent que la Région wallonne.

Les outils transversaux :

Les outils ci-dessous réunissent en une seule interface plusieurs recueils et collections présentés plus haut, ainsi que d’autres cartes introuvables ailleurs.

  • Le portail Cartesius. Inauguré en 2015, ce moteur de recherche vous donne librement accès à une partie des collections cartographiques de la Bibliothèque royale, des Archives de l’Etat, de l’Institut géographique national et du Musée royal de l’Afrique centrale. Du splendide panorama de ville datant de la Renaissance aux cartes de propagande du XXe siècle, il y en a pour tous les goûts. Un outil formidable, mais qu’il faut apprivoiser : face à la masse de documents, l’interface est basée sur des zones de recherches à définir à partir d’une carte contemporaine. Il est aussi possible d’effectuer des recherches via mots-clés, dates, échelle... Compliqué ? Pas de panique : les concepteurs ont prévu un tutoriel vidéo.
  • Le portail WalOnMap est l’application cartographique du géoportail de la Wallonie. Pour superposer cartes anciennes (de Ferraris, de Vandermaelen ou l’atlas des voiries) et carte actuelle, il suffit de cliquer sur « Consulter la carte », puis sur « Catalogue du géoportail » et enfin « Cartes anciennes ». L’icône « oeil » permet ensuite de sauter d’une carte à l’autre en toute simplicité.

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