Entrez dans le merveilleux jardin de Jitka

La maison d’Hänsel et Gretel existe, nous l’avons découverte ! Bleue et blanche, elle se tapit à Lasne, en Brabant wallon. Véritable artiste aux doigts de fée, sa propriétaire, Jitka Modrakova déploie tout son talent et des trésors de fantaisie dans son jardin extraordinaire.

Il y a 23 ans, quand nous avons racheté la fermette, le grand tilleul était déjà là, explique Jitka Modrakova. J’ai eu l’impression de revenir chez moi, car c’est l’arbre national de la Tchéquie, mon pays natal. « 

Jitka Modrakova avait 18 ans, lorsque les troupes du Pacte de Varsovie ont envahi son pays en 1968. Ses parents ont réussi in extremis à installer leur fille dans le dernier train quittant le territoire.  » J’ai pleuré pendant tout le trajet. Finalement, j’ai été accueillie à Londres, au sein d’une famille anglaise. Plus tard, j’ai acquis la nationalité britannique et, plus tard encore, mon travail m’a menée en Belgique. J’y ai rencontré Philippe, mon mari, et, grâce à lui, la Belgique est devenue ma troisième patrie. « 

L’ancienne fermette s’est transformée en charmant cottage. La longue façade blanche et le toit rouge contrastent avec les châssis et les volets bleus. Sans oublier une superbe glycine encadrant les fenêtres... Une vraie maison de conte de fées !

Passé le seuil, cette impression se renforce. Férue d’artisanat, Jitka réalise des lampes Tiffany, des figurines sous verre et des mini-serres. C’est aussi une grande collectionneuse. Chaque pièce de la maison accueille des séries entières de paniers, de poêles anciens, de verres, de lampes, de moulins à café, de moules à tarte...  » C’est plus fort que moi, il faut que j’achète ce que je trouve beau. « 

Des natures mortes en zinc

Le plus surprenant nous attend à l’arrière de la maison. Le jardin de 12 ares s’étend sur un talus assez escarpé. Au fond, un mur est envahi par le lierre. Les propriétaires des lieux ont su tirer parti de la dénivellation. Entre les parterres colorés, les arbres et les haies, des sentiers romantiques pavés à l’ancienne mènent vers un étang. Pas moins de cinq coins de repos tapis dans la verdure ont été aménagés.

Ici et là, d’étranges natures mortes attirent le regard. La plupart sont réalisées à base d’objets en zinc : une ancienne baignoire, une pompe à eau, des cuves, des paniers, des dizaines d’arrosoirs et de seaux, et même une niche forment de saisissantes compositions s’accrochent aux branches coupées d’un arbre.

Certains de ces objets ont été transformés en jardinières, d’autres se suffisent à eux-mêmes, telles de superbes sculptures. « J’ai un faible pour ma collection d’objets en zinc, explique Jitka. Comme je n’avais plus de place à l’intérieur, je les ai placés à l’extérieur... » Certaines de ces natures mortes côtoient des poteries, des statues en pierre ou des figurines en bois ou autres matériaux de récupération. On a vraiment l’impression d’être plongé dans l’univers onirique d’Alice au Pays des Merveilles. Un épouvantail en bois a perdu sa tête... transformée en pot de fleurs. Une tonnelle en métal vieilli et rouillé est envahie par un rosier grimpant. Le mobilier d’extérieur a été chiné sur les marchés aux puces et parfois même au parc à containers !

Palette d’automne

Hormis quelques buis bien taillés, des hauts bouleaux et des haies mixtes (cornouiller et acacia), le jardin opte pour le style à l’anglaise. Les années que Jitka a passées au pays de sa gracieuse majesté n’y sont sans doute pas pour rien.

L’aspect féerique est renforcé par le choix des rosiers grimpants (variétés Albertine rose saumon et American Pillar à la floraison carmin), ainsi que par l’abondance de plantes grimpantes : lierre, chèvrefeuille et clématite. Une clématite a même été plantée dans un grand pot et s’étend sur le sol de la petite terrasse. Ailleurs, Jitka a permis aux branches d’un mûrier de s’enrouler sur deux arceaux de métal. Une jolie manière de se faciliter la cueillette l’automne venu !

Son amour pour les floraisons estivales et automnales est évident.  » Nous sommes le plus souvent à l’extérieur de la mi-juillet à la mi-septembre. Je trouvais dommage que mes rosiers, mes alliums et mes pivoines soient déjà fanés début juillet. Je me suis mise en quête d’espèces fleurissant en plein été et en automne : marguerites, campanules, hibiscus, dahlias, fuchsias persistants, digitale (Digitalis), géraniums, phlox (Phlox paniculata), acanthes et nénuphars (dans l’étang). Vers la fin de l’été, les asters d’automne commencent à fleurir et les pommiers ornementaux (Malus) se couvrent de petits fruits rouge-orangé. Une de mes plus belles découvertes ? La haute herbe ornementale Stipa gigantea, qui peut atteindre 2,5 m. L’été, elle se pare de somptueux plumeaux. Dans les jardinières, j’aime beaucoup l’herbe à chats (Nepeta). Elle ressemble à la lavande mais fleurit plus longtemps. La plupart des gens se rendent dans les jardineries et les pépinières au début de l’automne. Moi, j’y vais en plein été. Quand je vois de jolies plantes fleuries, je les achète. »

Ne pas trop en faire

Ce sont les hortensias qui assurent principalement la floraison estivale du jardin de Jitka. Elle possède un bon tiers de toutes les variétés existantes. Outre les classiques (Hydrangea macrophylla), elle a opté pour des espèces moins courantes. L’Hydrangea petiolaris est un hortensia grimpant à fleurs blanches et à longues tiges, que l’on doit planter contre un mur. L’Hydrangea arborescens (variété Annabelle) ressemble à un véritable arbuste, capable d’atteindre une hauteur de 2,5 m. Facile à vivre, il se contente de n’importe quel sol et présente de grosses fleurs blanches larges de 30 cm. L’Hydrangea quercifolia est, lui aussi, un solide arbuste (jusqu’à 2 m de haut), doté de fleurs blanches, roses et vertes. En automne, son feuillage se colore et n’est pas sans rappeler celui du chêne.

 » L’expérience m’a prouvé qu’avec les hortensias, il ne faut pas trop en faire, s’amuse Jitka. Au début, je les soignais beaucoup et leur floraison me décevait. Ces quatre dernières années, je les ai oubliés et ils sont splendides ! Je me contente de faire attention à mes variétés bleues (lire encadré ci-contre). Je ne les taille plus et ne coupe plus les fleurs fanées avant la fin du mois de mars suivant. Elles sèchent toutes seules. « 

Cela dit, Jitka se bat contre les limaces. Son jardin des merveilles est envahi de limaces et d’escargots. En bonne fée aux mains vertes, elle ne les tue pas. « Au début, j’ai essayé les granulés empoisonnés et toutes sortes d’astuces naturelles. Mais cela ne les empêchait pas de dévorer mes plantes. J’ai alors décidé de les laisser vivre et leur ai même planté leurs végétaux favoris : les hostas ! »

Hortensias : rouge, aubergine ou bleu ?

Les fleurs bleues réclament un sol acide et ferrugineux (pH de 3,5 à 4,5).  » J’achète des granulés de sulfate d’aluminium, explique Jitka. De juin aux premières gelées, je les dissous dans de l’eau de pluie et en donne aux plantes au moins tous 15 jours. Je commence par arroser le sol tout autour, après l’avoir biné. J’ajoute de temps à autre un verre de vinaigre à l’eau d’arrosage (1 verre/10 l. d’eau) pour maintenir l’acidité du sol. « 

Dans un sol sablonneux, les hortensias restent rouges, surtout si le sol est calcaire et que vous l’arrosez avec de l’eau du robinet. Pour accentuer la couleur rouge, dispersez 2 à 3 fois par an des granulés de calcaire autour de la plante ou dissolvez-les dans l’eau d’arrosage. Attention, un excès de calcaire freine la croissance.

Pour obtenir un joli ton aubergine, parsemez, de mai à septembre, le pied de la plante de granulés d’alun mais sans en mettre trop, pour éviter que vos hortensias aubergine ne deviennent tout simplement bleus...

Le jardin de Jitka Modrakova est ouvert au public, sur rendez-vous.
Adresse : rue du Payot 8, 1380 Lasne Tél :
02 633 16 53. Entrée : 2,50 ?

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